samedi 6 juin 2009

Pour les amateurs de reliures romantiques... un petit bijou de finesse. (1826)


Pour faire suite au message de Xavier publié hier à propos des demi-reliures romantiques des années 1815 à 1845 environ, je partage avec vous aujourd'hui une de mes dernières "découvertes" dans le même domaine.

Il s'agit d'une jolie reliure romantique, ou plutôt de ce qu'on appellera un joli cartonnage romantique, puisqu'il ne s'agit pas à proprement parler d'une reliure, mais bien d'un "emboîtage" ou cartonnage, réalisé à l'époque du livre qui est recouvert, mais façonné "à part" et ensuite rapporté au bloc livre cousu séparément.

On trouve assez souvent de très jolies reliures (cartonnages) de maroquin plein (souvent à grain long pour l'époque considérée, des années 1810 à 1830) sur ces Almanach des dames et autres demoiselles en passant par les almanach de la cour, etc. Le plus difficile étant de les trouver dans un état de conservation acceptable voire impeccable, et là, ça se corse. Ces petits livres, souvent manipulés, car destinés à être "pratiques", nous sont parvenus assez usés par le temps et l'usage qu'on en a fait.

Comme vous pourrez le voir ci-dessous, il s'agit d'un bel exemplaire, très bien conservé, d'un de ces cartonnages "pour les dames" (ces petits livres, distribués la plupart du temps à l'occasion des étrennes, étaient destinés aux dames et aux demoiselles).

Le cartonnage que vous pouvez admirer est donc fait de maroquin à grain long, décoré sur chaque plat d'une plaque dorée avec plusieurs pièces mosaïquées de cuir de différentes couleurs du plus bel effet. Le dos du cartonnage est également décoré de faux caissons délimités par des double-filets dorés avec à l'intérieur de chaque caisson une rosace mosaïquée de différentes couleurs, à l'image du décor des plats. La doublure et la garde du cartonnage (que vous ne voyez pas, est faite d'un beau papier glacé violine estampé à froid d'un motif floral répété en semis. Le tout étant pour moi, très agréable à l'oeil.

Fait assez exceptionnel pour être remarqué (c'est en tous les cas la première fois que j'ai en mains un tel exemplaire), le cartonnage était encore conservé dans son étui d'origine, également en plein maroquin à grain long et lui aussi mosaïqué et décoré à l'image des plats du cartonnage, avec en plus des roulettes dorées et à froid supplémentaires, en encadrement des plats. Les petits côtés de l'étui présentent, comme vous pouvez le voir, un décor de roulette dorée différente pour chaque face.

Hormis quelques frottements insignifiants sur un côté de l'étui et quelques infimes traces ça et là au cartonnage, l'ensemble est exceptionnellement bien conservé. Ce qui est rare pour ce genre de livre par nature très fragile.

Ce que ce cartonnage recouvre ?

Il s'agit d'un "Almanach dédié aux demoiselles" publié à Paris chez Louis Janet, libraire. Publié sans date mais contenant un calendrier pour l'année 1827.

Comme je le disais plus haut, ces petits livres étaient offerts la plupart du temps à l'occasion des étrennes, et donc on peut supposer que ce petit volume a été imprimé vers la fin de l'année 1826 pour être offert pour le début de l'année 1827. Par ailleurs, ces petits livres étant offerts déjà reliés comme de véritables petits bijoux dans leur écrin, il est pratiquement certain que la reliure date avec précision des derniers mois de 1826. La datation de la reliure est ici facilitée par le contexte, comme s'est souvent le cas pour d'autres époques si l'on se donne la peine de chercher l'histoire du livre que l'on a la chance d'avoir entre les mains.

Ce charmant petit volume est illustré d'une jolie vignette de titre sur acier et de six jolies figures à pleine page représentant des tableaux anciens ou des vues de villes. Le reste du volume est occupé par des poésies d'auteurs pour la plupart tous oubliés aujourd'hui. On remarquera seulement une poésie de Béranger intitulée "la fuite de l'amour", une autre pièce en vers signée Boucher de Perthes, une autre de Madame Desbordes-Valmore intitulée "Trilby", ainsi qu'une dizaine de pièces restées anonymes... où l'on essaiera d'y reconnaître la plume d'un Hugo de 25 ans ou d'un Vigny de 30 ! Sans succès...

Je vous laisse admirer les photographies que j'ai essayé de prendre au mieux avec un matériel loin des studios professionnels... (ce sera pour plus tard).


Cliquez sur les images pour les agrandir





Ah si ! Un mot sur les relieurs de cette époque. D'après ce que j'ai pu glaner à droite et à gauche, ces reliures ont été pratiquées par divers ateliers renommés de l'époque. On sait que Vogel en était devenu un spécialiste et que les ateliers des Thouvenin, Ginain, Simier ne rechignaient pas à offrir ces belles babioles aux clients de leur temps.

On ne saura sans doute jamais qui a réalisé ce petit chef d'oeuvre de finesse (est-ce si important ?), néanmoins, même non signé, de ce petit cartonnage se dégage un plaisir bibliophilique non dissimulé, que je partage avec vous.

Bon samedi à toutes et à tous,
Bertrand

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