dimanche 31 mai 2009

Des roulettes dorées... encore et encore... (suite)


Voici deux nouvelles photos pour compléter le
billet d'hier au soir.

Vous avez ainsi, pour juger de la technique du doreur, la vue intégrale des deux contreplats ou doublures du volume.

Comme vous pouvez le voir, on relève d'ailleurs d'autres accidents de "roulettes" ???

J'avoue que je ne comprends pas bien comment ce résultat a été obtenu ? Des lumières de nos relieurs et restaurateurs préférés sont attendues.




Bon dimanche !

Bertrand

samedi 30 mai 2009

Des roulettes dorées... encore et encore...


Cher(e)s ami(e)s bibliocurieux,

Tout d'abord permettez-moi de vous dire mon plaisir à la rencontre bibliomaniaque franco-germanique qui eut lieu ce vendredi et ce samedi, au coeur de la Bourgogne des Eduens. Lorsque un germain rencontre un gaulois... en général... eh bien là, pas du tout !

Lorsque Martin a décidé de franchir de le Rhin pour venir causailler bouquins avec le gaulois bourru, c'était dans un objectif tout à fait "Bibliomane moderne", civilisé en somme.

Bref, tout ceci pour vous dire que l'ami Martin et moi (on laisse volontairement les femmes de coté dans cet épisode... elles ne parlent que de chaussures, corsages et autres balivernes féminopathologicochroniques... (évidemment ceux qui prennent tout sans humour sont priés de quitter le blog illico).

Donc, disais-je, nous avons manié du maroquin, palpé du vélin, caressé du beau papier de Hollande bien ferme, humé les pages de nos chers bouquins, évalué certains, dévalués d'autres, dits que ceux-là ne valaient pas un clou (rouillé !), que ceux-ci valaient leur pesant de lettres en plombs, bref, nous avons causaillé "amour du livre", nous avons aimé cela, et nous recommencerons bientôt, c'est promis.

Au détour d'un examen bibliopégimaniaque, nous sommes tombés d'accord avec Martin sur le fait qu'une des reliures qu'il avait entre les mains... nous posait un problème (encore me direz-vous ! Et alors ?).

Pour résumer, il s'agit d'un maroquin rouge, exécuté vers 1750-1770, joliment décoré au dos, mais là n'est pas le problème. Le problème se situe encore une fois au niveau de la roulette dorée en encadrement intérieur des plats... elle nous pose problème. Plus exactement, on aimerait l'avis d'un expert es reliures anciennes voire un restaurateur de reliures de cette époque ou un relieur qui connait son affaire, tout court.

Voici en photo, l'objet du délit.

Cliquez sur l'image pour voir en détail.


Comme vous pouvez le remarquer, la roulette dorée présente un décrochement dans son tracé. Décrochement inesthétique certes, mais surtout, que nous n'arrivons pas à nous expliquer. Comment cette roulette apposée de manière partielle sur une partie de la longueur (vers le coin) a-t-elle été poussée ? Comment procédait-on ? On dirait que la roulette a été poussée en deux fois sur toute la longueur (deux passages pour faire toute la hauteur de la roulette ??), sauf vers la fin où l'on voit nettement le décrochement ??

Qui sera capable de nous expliquer cela ?

Bonne fin de week end à toutes et à tous,
Bertrand et Martin

vendredi 29 mai 2009

Vous je ne sais pas, mais moi….


J’ai un réel souci ! Lorsque je croise un religieux ; invariablement je me demande « à quel ordre appartient-il ? », est-ce un franciscain, un dominicain, jésuite, bénédictin, cordelier, capucin, chartreux, un cistercien !!!!…bref c’est INSUPPORTABLE…(1)

Et bien depuis quelque temps, je suis sauvé ; j’ai eu le bonheur d’acquérir avec quelques deniers que j’ai pu mettre de côté le livre suivant :

Essai sur l'histoire naturelle de quelques espèces de moines. Décrits à la manière de Linné. Ouvrage traduit du latin et orné de figures. Par Jean d'Antimoine, naturaliste du grand Lama etc. etc. (2)

A Monachopolis, 1784, in-8, 131 pp., avec 3 planches dépliantes de costumes de moines non signées et 2 figures par Sébastien Leroy & gravées par Delignon (3)

(Vous pouvez agrandir la vignette, on y voit un faune « à son avantage » dansant avec un bouc)


Derrière Jean d’Antimoine se cache Pierre-Marie-Auguste Broussonnet (1761-1807) qui était secrétaire permanent à Paris de la Société Royale d’Agriculture.

Les douze chapitres décrivent énumèrent les habitudes vestimentaires des moines : le Bénédictin, le Jacobin ou Dominicain, Le Camaldule, l’Augustin, le Servite, etc.

Quand j’ai déplié pour la première fois les planches, je me suis souvenu des découpages de mon enfance, ou il fallait détacher des habits pour vêtir tel ou tel personnage ; si, si, rappelez-vous ! il y avait des languettes au niveau des épaules qu’il fallait rabattre pour y fixer les vêtements de carton.
Et bien ici, j’ai immédiatement pensé à « Habiller vous-même votre moinillon ».

C’est vraiment l’ouvrage qu’il me fallait ; avec ça j’identifie à coup sur les ecclésiastiques que je croise lors de mes errances… et j’erre beaucoup.


Voici un aperçu du contenu de ce fort utile ouvrage, ou j’ai respecté l’orthographe du temps.

Définition : Animal à figure humaine, avec un capuchon, hurlant pendant la nuit, tourmenté de la soif.

Description : Le corps bipède, droit ; le dos courbé, toujours ornée d’un capuchon. Le corps couvert de tous côtés, excepté dans quelques espèces les pieds, le derrière, les mains & la tête qui sont à nud. Du reste, animal avare, malpropre, exhalant une odeur fœtide ; oisif, aimant mieux manquer de tout que de travailler. Les moines se rassemblent en troupe au soleil levant ou couchant & aussi dans la nuit ; ils crient tous ensemble, quand un d’entre-eux a donné l’exemple ; ils accourent tous au son des cloches ; ils marchent presque toujours deux a deux ; il se couvrent de laine ; ils vivent de rapine & de quête ; ils disent que le monde n’a été créé que pour eux ; ils se multiplient furtivement, attaquent ceux de leur propre espèce, se battent, se déshonorent dans leurs assemblées pour les places lucratives & supérieurs, & portent toujours des coups cachés à leurs ennemis : le retraite, la discipline & le cachot n’est que pour les individus qui pensent & disent autrement que le chef.

La femelle ne differe du mâle que par un voile qu’elle a toujours sur la tête ; elle est plus propre, ne sort presque pas de son habitation, qu’elle a soin de tenir très-nette (a). Les jeune aiment à jouer, elles prennent tout ce qu’elles peuvent rencontrer, regardent autour d’elles, saluent les mâles en riant : les adultes & les vieilles sont malignes ; elles mordent, elles montrent leurs dents quand elles sont en colère.

(a) Elle dit Ave quand on l’interroge, elles jasent toutes à la fois, quand elles en ont la permission ; elles tremblent au son des cloches.

Différence :

L’homme parle, raisonne, a une volonté. Le moine le plus souvent est muet, ne raisonne pas & n’a point de volonté, car il est entièrement soumis à son supérieur. L’homme porte sa tête élevée ; le moine la porte penchée, les yeux toujours fixés contre terre. L’homme gagne son pain à la sueur de son front ; le moine s’engraisse dans l’oisiveté. L’homme habite avec ses semblables ; le moine cherche la solitude, se cache, fuit le grand jour, d’où il est clair que le genre le moine est très-distinct de celui de l’homme, & qu’il est intermédiaire entre celui-ci & celui du singe ; qu’il est pourtant plus rapproché de ce dernier dont il ne differe que par la voix & la qualité de ses aliments.
Usage.

Un poids inutile sur la terre, né pour manger & boire.

Métamorphoses :

Plantes. Graines, avec cotyledons en fleur, en graine.
Insectes. Œuf, chenille, chrysalide, insecte parfait.
Quadrupedes. Fœtus, enfant, jeune, adulte.
Crapauds. Œuf, tetard, crapousin, crapaud.
Moines. Oblat ou donné, Novice, Frere lai, Reverend Père.

Il me reste maintenant à trouver l’équivalent pour les nonesses et le tour est joué…

Xavier « bontems »

(1) Vous comprendrez ici : http://tinyurl.com/rx3ozc

(2) Références : Caillet 1439 ; Cohen : Livres à gravures 190 ; Quérard 363 ; Barbier 5804 ; Gay II, 168 "cet ouvrage piquant, et où toutes les formes d'une description technique et scientifique sont observées, est en effet traduit par Mr Broussonnet, du latin, de l'ouvrage allemand de Johannes Physiophilus [le baron Ignace de Born], intitulé : Specimen monacholiæ methodo Linneana tabulis tribus æneis illustratum. Mr Broussonnet, savant lui-même et homme d'esprit, n'a pu qu'ajouter du piquant à cette excellente plaisanterie. L’ouvrage sera ensuite réimprimé chez Obré, an VI-1798, in-8, en vente au prix de 12 francs, puis chez Cabanon en 1883.

(3) Béraldi-Les graveurs du XVIIIe, T.1, page 709, (Jean-Louis Delignon, 1755-1804).

jeudi 28 mai 2009

Ooooohhhh la BARBE ! ... en 1786


Voici un livre curieux qui a pour légende au frontispice :


« L’usage personnifié, vêtu des Habits de la Folie, foule aux pieds une tête antique et façonne coup de Marotte, une tête moderne. »


Pogonologie|| ou || histoire philosophique || de la barbe.|| Par M. J.A. D***.|| L'usage nous dérobe le vrai visage des choses. Montaigne|| fleuron || A Constantinople || Et se trouve a Paris || Chez Le Jay, Libraire, rue neuve des petits- || Champs, près celle de Richelieu || au Grand Corneille.|| M.DCC.LXXXVI.


1 f. + faux titre + 1 f. + frontispice + titre + 1 p. de dédicace à Monsieur B***, conseiller du roi, substitut de M. le Procureur Général au Parlement de D... + XV p. de préface + 210 pp. et errata + 1f.

Derrière M. J.A. D. [trois étoiles] se cache le sieur Jacques-Antoine Dulaure, archéologue et historien (Clermont-Ferrand, 1755- Paris, 1835), vous avez plus bas une courte biographie/bibliographie de Dulaure.

L’ouvrage est divisé en onze chapitres : De la barbe / De quelques mentons rasés / Femmes barbues / Que les longues barbes sont salutaires / Barbes postiches / Barbes dorées / Moustaches / Barbes des prêtres / Des peuples qui portent la barbe / Conclusion, et un poème de 10 pages : L’exilé à Versailles, et l’errata.


Les divers chapitres ne manquent pas de piquant, et je ne résiste pas à vous en livrer quelques phrases.

« Il est incontestable qu’une longue barbe contribue beaucoup à la santé, parce que, pendant qu’elle attire à elle les humeurs superflues qui la nourrissent, elle préserve longtemps les dents de pourriture, donne fermeté aux gencives… avantage dont sont ordinairement privés ceux qui se rasent… »

« Adrien Junius, médecin du XVIe siècle, dans son Commentaire sur le cheveu, assure que la barbe est un préservatif de plusieurs maux… »

« Toucher la barbe à quelqu’un, en couper une partie, était chez les premiers français, le gage sacré de la protection et de la confiance… »

« Un Roi du Xe siècle, mettait sa longue barbe blanche hors de sa cuirasse pour encourager les siens dans la bataille… »

« Un menton rasé fut toujours le signe de l’esclavage, de l’infamie ou de la débauche… »

« Durant la campagne de Charles XII (Roi de Suède),…il y avait un grenadier femme, ce n’était ni le courage ni la barbe qui lui manquait pour être un homme…elle fur prise et présentée devant le Tsar en 1724, sa barbe avait une aune et demie de longueur (mesure de Russie) »

« Dans le dictionnaire de Trévoux, à Paris, une femme à le visage hérissé d’une épaisse barbe, mais aussi le corps tout couvert de poils… »

« Les femmes Lombardes, avancent sur les joues les cheveux de la tempe, cela donne un petit air agaçant, fripon, cavalier, dont les femmes d’aujourd’hui sont fort jalouses… »

Il s’ensuit un avis sur le tabac : « Le tabac cause une certaine malpropreté, haleine forte, nez barbouillé, visage dégoutant, langue sèche, enivre et dérange les fonctions du cerveau, procure vomissement, énerve l’estomac, détruit la mémoire, cause des vapeurs et des vertiges… »

« Plusieurs potentats du pays d’Orient ont tressé le poil de leur menton avec des fils et des paillettes d’or… »

« On a employé les moustaches pour épouvanter l’ennemi…» (chez les Goths et les Francs.)

Tout le livre cours sur des « faits historiques » quelque peu extravagants, mais non dénués d’intérêts et en tout cas fort distrayants.

Chaque chapitre se termine par un petit fleuron ou sur de jolis culs-de lampe. (2)

Biographie de Jacques-Antoine Dulaure :

Il étudia l'architecture à Paris, puis devint ingénieur géographe. Un goût très-vif pour les recherches archéologiques lui fit entreprendre de vastes travaux sur l'histoire de la France en général et de sa province en particulier. Il publia quelques brochures piquantes sur les édifices de Paris : Lettres critiques sur la nouvelle salle des Français l'Odéon, (1782) ; Lettre sur le cirque qui se construit au Palais-Royal (1787) ; Réclamation d'un citoyen contre la nouvelle enceinte de Paris (1787), brochure curieuse et hardie qui fut poursuivie et qu'on attribua à Mirabeau, etc.

Il publia encore avant l'époque de la Révolution : Pogonologie ou Histoire philosophique de la barbe (1786), livre plein de recherches curieuses ; Singularités historiques, contenant ce que Paris et ses environs offrent de plus piquant (1788), nombreuses éditions, refondues plus tard dans les grands travaux de l'auteur ; Description des principaux lieux de la France (1788-89, 6 vol. in-12), ouvrage resté inachevé. Il faudrait citer encore d'autres écrits sur différents sujets, et dont l'abondance et la variété montrent l'étonnante fécondité des hommes du XVIIIème siècle, leur facilité d'étude et de travail.

En ce qui touche Dulaure, on lui a reproché ses opinions anticléricales et antimonarchiques. Dès le début de la Révolution, il en embrassa les principes avec ardeur et publia de nombreux ouvrages pour les défendre et les propager.

Nommé par son département député à la Convention nationale, Dulaure se rangea, dans le parti des girondins, mais ne joua d'ailleurs qu'un rôle effacé et parut rarement à la tribune. Dans le procès du roi, il vota la mort sans appel ni sursis. Il fut accusé en octobre 1793, comme fédéraliste et conspirateur. Rien de plus absurde qu'une telle accusation ; Dulaure était un homme de coterie, de faction si l'on veut, nullement un conspirateur. Dulaure parvint à s'échapper, gagna la Suisse, et fut réduit, pour vivre, à entrer, sous un nom supposé, comme dessinateur dans une manufacture du canton de Berne.

Sa proscription dura quatorze mois. Ayant décidé à quitter la carrière politique, ruiné par la faillite de son notaire, « il obtint une place dans l'administration des finances », place qu'il conserva jusqu'au retour des Bourbons.

Dulaure était avant tout un homme de lettres, un peu fourvoyé dans la politique. Il aimait les livres et passa sa vie à en acquérir et à les étudier. Il fut l'un des fondateurs de l'Académie celtique, devenue la Société des antiquaires de France. Il en reçut la présidence dans l'année 1831, et de recueils cette société d'un nombre considérable de dissertations. Outre les ouvrages cités dans le cours de cette notice, on a de lui : Des cultes qui ont précédé et amené l'idolâtrie (1805, in-8°); Des divinités génératrices ; ces deux ouvrages ont été réunis, en 1825, sous le titre d'Histoire abrégée de différents cultes (2 vol. in-8°) ; Histoire physique, civile et morale de Paris 10 vol. (in-8°), plusieurs fois réimprimée, revue et augmentée : c'est le travail capital de l'auteur et celui qui est le plus populaire ; Histoire physique, civile et morale, des environs de Paris (1825-27, 7 vol. in-8°), plusieurs fois réimprimée et qui eut, comme l'ouvrage précédent, un brillant succès de librairie : ce succès est encore loin d'être épuisé. Enfin il faudrait citer d'autres travaux historiques, spécialement relatifs à l'Auvergne, sur laquelle il avait rassemblé d'immenses matériaux. Il a laissé en manuscrit des Mémoires qui n'ont jamais été publiés. (1)

(1) : Larousse du XIX, Hoefer et Michaud pour la biographie.
(2):http://bibliomab.wordpress.com/2008/10/04/culs-de-lampe-fleurons-vignettes-ornements-du-livre-ancien/

Bonne journée,
Xavier

mercredi 27 mai 2009

Invitation à la réflexion autour de la prétention des beaux livres et de la prétention des bibliophiles.



Orgueil du livre ?
Prétention du bibliophile ?



Bonsoir,
pris par le temps en cette fin de journée, je n'ai pas le temps matériel de vous livrer un article conséquent que je j'avais prévu et que j'essaierai de vous donner demain.

Le message de ce soir sera plutôt une invitation à la réflexion autour d'un sujet qu'un interlocuteur m'a suggéré lors d'une conversation ces derniers jours.

Nous parlions livres (pour changer) et voici ce qu'on m'a dit :

"Vous savez, je n'aime pas les livres prétentieux. Une reliure simple, bien exécutée et dépourvue d'ornements ostentatoires me convient parfaitement. Inutile ces artifices de dorures et autres fioritures qui flattent l'œil et surtout l'ego du propriétaire "momentané" de ce genre de livres qui en "jettent". D'ailleurs ma préférence va aux volumes brochés, tels que parus. Évidemment en bon état, le dos solide et la couture des cahiers en bon état. Un livre à lire en quelque sorte. Pur. Sans artifices."

Et là j'ai tout de suite pensé qu'il n'avait pas forcément tort. Et je vous laisse réfléchir là-dessus. Votre grain de sel ou de poivre sera utile à tous ceux qui nous lisent ici, et qui se posent la question de savoir ce qui est "bien" en matière de bibliophilie, reliure ? brochage d'époque ? reliures jansénistes (simples) ? Reliures richement ornées ? Où est l'orgeuil ? la prétention ? Est-elle du bibliophile ou du livre ? A vous de réagir.

Pour vous mettre le pied à l'étrier de la réflexion bibliomaniaque, voici ce qu'écrivait Henri Pollès (1) :

"Que j'aime, que j'aurai aimé les reliures ! Puisqu'elles recouvrent (...) cette chose sacrée, le livre. Quel plaisir d'admirer une belle reliure : d'abord on la caresse des yeux et puis ne ne résiste pas à caresser des doigts la peau et les ors"

Bonne soirée,
Bertrand

(1) C'est au coeur de l'ancienne ville épiscopale du Tréguier (Côtes-d'Armor) qu'Henri Pollès naquit le 13 juillet 1909. Il était le fils aîné de Charles Pollès, capitaine au long-cours, et d'Eugénie Rosalie Lalauze, son épouse. Il descendait du côté paternel d'une lignée de cultivateurs de Plouëzec, dont le nom exact est Le Pollès, et du côté maternel d'une famille d'artisans originaire de Bégard et fixée à Tréguier. Henri Pollès restera toute sa vie très marqué par la Bretagne, dont il aimait à parler la langue. Sa ville natale lui inspirera ses meilleures pages. Site internet qui lui est consacré. http://www.bm-rennes.fr/accueil/henripolles/polles.htm Hommage lui soit rendu ici.

mardi 26 mai 2009

Armes et chiffre sur une reliure à la Duseuil de 1635.


Petite recherche entre amis...

Lorsque vous voyez réunis sur une même reliure datant de 1635*, en écoinçons d'une reliure, décorée à la Duseuil, de grand format in folio le chiffre et les armes ci-dessous, vous pensez à qui ?



Le même chiffre et les mêmes petites armes se trouvent également répétés de manière alternée au dos du volume.

* L'édition de l'ouvrage en question est de 1635. La reliure strictement de l'époque peut dater de quelques années plus tard tout au plus.

Bonnes recherches,
Bertrand

dimanche 24 mai 2009

Fermoir... mon beau fermoir ! Dis-moi...


Bonsoir,
message court et en forme de gageure pour ce soir. C'est Textor qui nous envoie cette image en nous demandant :

Trouvez la date des fermoirs de ce livre ( à qq années près… !).


Retrouver une période précise d'après une gravure sur bois... le type de fermoir ? L'époque de ce livre qui est présenté au roi...

Amusant non ? Qui s'y colle ?

Bonne semaine,
Bertrand

samedi 23 mai 2009

Damascène Morgand : Librairie d'exception pour livres d'exception (1890).


Voici encore un petit morceau d'émotion bibliophilique à l'état brut et intime que je partage avec vous. La correspondance a cela d'indécent qu'elle révèle sans doute plus de chose que l'expéditeur ne le souhaiterait au départ.

Voici une lettre adressée à une personne inconnue, un homme, un client vendeur à la librairie Morgand à Paris. La prestigieuse librairie Morgand et Fatout, devenue librairie Damascène Morgand au décès prématuré de l'associé Fatout, puis future librairie Edouard Rahir qui reprendra le flambeau jusque dans les années 1920. Inutile de rappeler ici l'extraordinaire librairie qu'elle fut. Plusieurs dizaines de milliers de livres presque tous précieux et rares leur passèrent entre les mains. Le bulletin qu'ils publièrent entre 1876 et les premières années du XXe siècle (Edouard Rahir successeur), donnent assez la mesure de leur talent de "dénicheurs" de beaux livres. Evidemment, le talent ne suffit pas et des espères sonnantes et trébuchantes ont été nécessaires à la réunion en catalogues de tels trésors bibliophiliques inimaginables aujourd'hui en si grande masse, même dans les librairies les plus illustres de notre beau pays, Paris et province réunies.

Je vous laisse découvrir cette missive, assez instructive quant à la manière de faire des libraires de cette trempe.

Lisez plutôt.


Transcription du texte :

[Papier à en-tête de la librairie Damascène Morgand] libraire de la Société des Bibliophiles français. 55, passage des Panoramas. Paris, le 25 février 1890.

Cher Monsieur,
J'ai reçu les six titres ravissants de la "Vie Rustique" et je m'empresse de vous envoyer sous ce pli six cents francs, prix convenu, pour ce beau travail, sur lequel vous avez été assez aimable pour vous emballer.
Mon fils vous remercie de vos aimables projets en sa faveur.
Que pourrions-nous bien entreprendre ? Les aquarelles de Giacomelli sont fort appréciées et j'ai payé, hier, à la vente Marquis le Myosotis 5200 fr. avec 5% !!!
Veuillez agréer, cher Monsieur, en attendant votre réponse, mes remerciements et mes salutations les plus dévouées.
D. Morgand (signé).

PS : Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, l'intégralité des 10 volumes du Bulletin de la librairie Morgand et Fatout (catalogue de leur librairie) est disponible en version numérisée OCR sous forme d'un fichier PDF "cherchable" (entièrement numérisé et OCRisé par mes soins - distribution totalement libre). Vous pouvez le télécharger gratuitement, attention cependant le fichier pèse près de 500 Mo !! ADSL ou liaison internet ultra-rapide recommandée !! Une icone est également présente dans la partie gauche du blog sous les vignettes de liens vers les blogs utiles.

BULLETINS DE LA LIBRAIRIE MORGAND (1876-1904) 10 volumes - 10.000 pages - plus de 75.000 notices de libraire à prix marqués - une des plus grandes librairies parisiennes de la fin du XIXe siècle.

Bonne nuit,
Bertrand

vendredi 22 mai 2009

Florilège de roulettes et autres décors dorés en encadrement intérieur des plats des reliures anciennes et modernes


Pour faire suite en quelque sorte aux messages de ces quatre derniers jours, c'est Martin qui a eu la gentillesse de nous envoyer un florilège de roulettes et autres décors dorés aux petits fers en encadrement intérieur des plats des reliures anciennes (et modernes).

Je vous laisse admirer. Demain je vous proposerai quelques autres modèles issus des reliures que j'ai sous les yeux.

Ce n'est pas une roulette mais une dentelle réalisée aux petits fers à dorer.
1692 ou peu après.



1742 ou peu après.


1744 ou peu après.


1747 ou peu après.


1748 ou peu après.


1754 ou peu après.


1764 ou peu après.


1766 ou peu après.


Sur une édition de 1770. Reliure postérieure.


1771 ou peu après.


1773 ou peu après.


1776 ou peu après.


1782 ou peu après.


1793 ou peu après.


1794 ou peu après.


1794 ou peu après.


1800 ou peu après.


Début XIXe, reliure signée Courteval.


Étonnant travail vers 1800. Mosaïque et roulette, filets.


Un grand merci à Martin,

Bonne nuit,
Bertrand

jeudi 21 mai 2009

Du bibliomaniaque ou de la métaphysique de la roulette... (Partie IV et dernière)


Toutes les bonnes choses ont une fin. Nous voici arrivés au terme de cette petite aventure bibliomaniaque.

Comme je l'ai dis dans les messages précédents (parties I, II, et III) relatif à cette reliure dont je vous proposais de déterminer la date de fabrication, il est parfois difficile de dater avec précision une reliure, soit que sa facture ne vous est pas connue (style), soit qu'un ou plusieurs éléments viennent perturber votre raisonnement. Le bibliophile qui veut savoir ce qui repose sur ses rayons se doit de faire l'effort d'apprendre à appréhender les différents styles de reliures selon les siècles, les relieurs, les périodes précises (reliures style "Directoire", reliures style "régence", reliures "hollandaises", etc etc. C'est un travail passionnant pour celui qui, suffisamment curieux pour ne pas se contenter d'entasser des livres rares sur des étagères ou dans des caisses, veut "comprendre" sa bibliothèque.

Bref, revenons-en à cette reliure. Je résume ce que vous aviez pu voir les jours précédents.

Reliure ancienne, de maroquin rouge, on voyait une roulette dorée en encadrement intérieur des plats assez typique du XVIIe siècle. On la rencontre en effet dès la fin de la première moitié du XVIIe siècle mais elle s'utilise encore jusqu'à la fin du XVIIe siècle, peut-être même dans les premières années du XVIIIe siècle, mais sans doute pas après 1710-1720.

On a vu aussi un papier marbré que certains ont donné franchement milieu XVIIe, d'autres franchement XVIIIe. Il faut dire que ce papier marbré est assez commun, sans doute le modèle le plus commun que l'on puisse rencontrer.

Le maroquin vieux rouge écrasé est typique des reliures anciennes qui peuvent avoir été effectuée depuis le milieu du XVIIe siècle jusqu'au début du XVIIIe siècle. Vous ne pouvez ni le toucher, ni le voir vraiment, mais ce maroquin ne fait pas du tout milieu XVIIIe (après 1750).

Vous avez, grâce au titre doré poussé au dos, pu déterminer qu'il s'agissait d'une édition ancienne des Caractères de La Bruyère. Il s'avère qu'il s'agit de la huitième édition originale (la plus complète) datant de 1694, comme vous pouvez le voir ci-dessous.


Mais où est le problème me direz-vous ? Voyez ce qui suit. Lorsque j'ai eu pour la première fois cette reliure en mains, je me suis tout de suite dit : "Il y a un truc qui cloche." Voyez plutôt l'aspect général de la reliure ci-dessous.


Vous voyez maintenant ce que je vous avais caché. Le décor doré au dos et sur les plats. On trouve un décor franchement milieu XVIIIe siècle sur le dos. Les caissons entre les nerfs sont ornés d'une fleurette centrale (qu'on retrouve sur différents modèles de reliures entre 1740 et 1760 environ). Cette fleurette s'inscrit dans un décor avec petits fers en écoinçons (dans les coins des caissons) et semis de points dorés autour de la fleurette centrale. Bref, un décor typiquement milieu XVIIIe. Idem sur les plats où l'on retrouve en écoinçons les mêmes dites fleurettes dans un encadrement de filet gras dorés. Typiquement milieu XVIIIe également.


Ce qui cloche ? C'est que la reliure (première reliure de l'ouvrage) est de l'époque de l'impression à quelques années près, je la date des années 1694 à 1700 (voir dentelle intérieure dorée et manière de pousser le titre au dos directement sur le maroquin du dos). Ce qui cloche ? Le décor au dos et sur les plats qui doit dater des années 1740-1750 pour le style.


Alors ?

Alors voici mon hypothèse. Je pense que la reliure, d'origine, non restaurée, date des années 1694-1700. Celle-ci était dans un décor "janséniste". C'est à dire que seul à ce moment là (1694-1700) le titre était poussé à l'or au dos, avec la roulette dorée en encadrement intérieur des plats.


De nombreuses années plus tard, aux environs de 1740-1760 (tout de même plus de 40 ans après... les styles changent, ce n'est plus la même "époque"), le décor de la reliure a été "repris", le dos a été orné comme on peut le voir maintenant, ainsi que les plats.

Ce qui donne au final une reliure "choquante" et "dérangeante" du point de vue du rendu final. Une sorte de mélange des styles dans le décor des reliures. Un peu comme si au milieu d'un plat XVIe décoré à la Grolier on trouvait un fer rocaille typique des années 1830 (mais là cela aurait été plus flagrant).

Ici, la distinction est subtile. Bien que seulement une quarantaine d'années sépare les deux travaux de décoration de cette reliure, on sent bien que le style dans la décoration a changé.

Votre avis ? Que pensez-vous de tout cela ? Ma théorie vous parait-elle valable ?
Je suis ouvert à toutes les autres hypothèses possibles bien que je n'en n'aie pas trouvé de plus satisfaisantes à cette heure.

A vos claviers,
Bonne nuit,
Bertrand

mercredi 20 mai 2009

Du bibliomaniaque ou de la métaphysique de la roulette... (Partie III)


Mini-Prolégomènes
: Pour bien comprendre ce message, se reporter aux messages des deux jours précédents et lire depuis le début cette aventure bibliopégimaniaque.

Bon, je vois bien que tout le monde est fébrile, surexcité et que je ne pourrai pas tenir les fauves-bibliophiles plus longtemps en cage... fût-elle dorée (sur marbrure)...

Alors, voilà. Je vous livre deux derniers indices avant la douche froide (qui arrivera inévitablement jeudi à la publication des images "choc")...

Premier indice de ce jour pour compléter ceux des deux jours précédents. La vue plongeante sur la tranchefile.


Deuxième indice, le titre au dos du volume. Poussé en caractères dorés directement sur le maroquin, tel que vous pouvez le voir (désolé pour les reflets).


Que conclure de tout ceci ?? Je sais, la tête vous tourne, vous vous dites "damned !! Il me faut réviser Michon et Devauchelle sur la plage cet été" ...

Alors ? Quelle date pour cette reliure ?

Bonne nuit (agitée),
Bertrand

mardi 19 mai 2009

Du bibliomaniaque ou de la métaphysique de la roulette... (Partie II)


Bonjour,

Je vois que tout le monde (enfin presque) est excité comme un bibliophile en foire par ce petit jeu de devinette bibliomaniaque (lire le message d'hier à ce sujet).

Vous trouverez ci-dessous quelques indices supplémentaires pour vous aider à situer dans l'échelle du temps la reliure dont il est question. Hier je pensais vous donner un "gros" indice, qui vous aurait mis la cervelle à l'envers... j'ai préféré vous amener tout doucement, sans rupture, vers un fil ténu, celui de l'histoire du livre, ici de l'objet livre. Cette reliure me pose problème et vous l'aurez compris, c'est qu'elle a quelque chose de bien particulier (... que vous découvrirez demain ou après-demain...), quelque chose qui m'empêche de la dater à dix ans près de façon certaine.

Quelques nouvelles photographies pour vous aider à dater la reliure.
Cliquez sur les images pour les agrandir et bien étudier les détails.


Doublure de papier marbré et roulette dorée en encadrement intérieur des plats.


Couleur et texture du maroquin.
L'aspect du maroquin peut souvent aider à dater une reliure.




Vue de détail sur les coins et les coupes, ornés d'une roulette dorée
("presque" la même qui orne le pourtour intérieur des plats - regardez bien).
Tranche dorée sur marbrure (voir photos suivantes).




Tranche dorée sur marbrure (pas très facile à prendre en photo...).
Je vous laisse juger en agrandissant l'image.

A vos tablettes. Proposez une date ou une fourchette de dates pour la fabrication de cette reliure. Je précise à nouveau que la reliure est ancienne, française, qu'elle n'a subi aucune restauration. Ce que vous voyez est d'origine et a été exécuté à la même époque. Mais laquelle ?

A demain pour le bouquet final (ou presque...)

Bonne journée,
Bertrand

lundi 18 mai 2009

Du bibliomaniaque ou de la métaphysique de la roulette...


Cher(e)s ami(e)s toqués du bouquin,

Voici une petite interrogation que je vous soumets, car cela me pose problème.

Ma question est simple : à la vue de la photographie ci-dessous, qui donne en couleurs la roulette dorée intérieure qui se trouve sur une reliure de maroquin rouge, pouvez-vous me donner votre avis sur la date d'exécution de ladite reliure, uniquement sur ce critère, et sur le type et l'aspect du papier décoré de la doublure ?

N'hésitez pas à donner votre estimation de datation (sans carbone 14 on rigole moins...) en commentaire avec tous les arguments à l'appui que vous voudrez dévoiler ici.

Saurez-vous dater la reliure uniquement en fonction du décor de la roulette et du papier ci-dessus ?


Je vous expliquerai demain ou les jours suivants le pourquoi de cette question hautement bibliomaniaque...

Bonne semaine à toutes et à tous,
Bertrand

PS : Juste un mot pour vous remercier encore une fois de votre fidélité. Ces dernières semaines le Bibliomane moderne attire en moyenne près de 150 visiteurs par jour pour environ 300 pages vues. Merci ! Le Bibliomane moderne vient récemment de diffuser son 250ème message ! 250 jours déjà ! Merci !

dimanche 17 mai 2009

Quelques fermoirs et attaches de livres du XVe et de la première moitié du XVIe siècle.


Voici pour le plaisir des yeux quelques attaches et fermoirs répertoriées dans divers catalogues de livres rares.

Comme on peut le voir, selon les pays ou villes de provenance des reliures, les attaches et fermoirs, à la fois objet utile pour la bonne fermeture des livres et objet artistique de décoration, sont très différents.

Je vous laisse admirer le travail des orfèvres en la matière. Je vous en proposerai très bientôt une nouvelle sélection. Je remercie tout particulièrement Textor et Martin, fidèles lecteurs, qui ont largement contribué à faire de cette "exposition" quelque chose de passionnant.

Allemagne. Augsbourg avant 1580.



Anvers. Vers 1537.



Augsbourg. Vers 1475.



Florence. Vers 1480.



Salzbourg. Vers 1500.



Bâle. Vers 1496.



Nuremberg, vers 1495.



Strasbourg. Vers 1525.



Autriche. Vers 1435.



Salzbourg. Vers 1478.



Ulm. Vers 1486.

La suite au prochain épisode...

Bonne nuit,
Bertrand

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...