Chers amis légèrement roussis (par le temps et l'étude évidemment),
voici quelques derniers et définitifs éléments concernant cette fameuse seconde édition du Diable boiteux de Lesage (1707) publiée par la veuve Barbin à Paris.
C'est un peu aride, mais néanmoins intéressant à mon sens.
Comparatif des exemplaires A et B : Lire le précédent article sur le sujet si vous le l'avez pas déjà fait, c'est un peu indispensable pour essayer de suivre...
LIRE L'ARTICLE PRÉCÉDENT SUR LA SECONDE ÉDITION DU DIABLE BOITEUX (1707)
Frontispice et titre identique pour les exemplaires A et B.
Les feuillets signés àij et aiij sont identiques pour A et B.
Les feuillets de la table des chapitres, l’approbation et le privilège sont identiques pour A et B.
Voici le détail de la comparaison des cahiers entre les exemplaires A et B :
Cahier A : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier B : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier C : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier D : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier E : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier F : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier G : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier H : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier I : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier K : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier L : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier M : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier N : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier O : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier P : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Q : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier R : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier S : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier T : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier V : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier X : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Y : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Z : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Aa : le tirage est différent pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Bb : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Cc : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
Cahier Dd : le tirage est identique pour les deux exemplaires A et B.
On a donc 16 cahiers pour lesquels le tirage est différent et 11 cahiers strictement identiques.
On note qu’au cahier O la seule différence est la recomposition de la seule page 168 avec dans le tirage A le mot « âge » en réclame en bas à droite, mot qui ne se trouve plus dans le tirage B.
Curiosité : Dans les deux exemplaires la page 134 est mal chiffrée 234 alors que le cahier entier a été recomposé. Etonnant non ?
Quelques pages comparées :
Petite étude du papier utilisé pour l’impression des deux exemplaires A et B.
J’ai regardé toutes les pages des deux exemplaires à la lumière (ça c'est pour Raphaël). Il apparait que l’exemplaire B a été imprimé sur deux papiers différents. Un premier filigrane (filigrane 1) (grappe de raison avec feuille) se retrouve assez souvent (coupé en deux au niveau de la queue du raisin). Ce filigrane, de par le pliage de la feuille, se retrouve toujours dans la marge extérieure droite (gouttière) des feuillets. On trouve également un bon nombre de feuillets avec un deuxième filigrane (filigrane 2) (lettres – monogramme non déchiffré car coupé lors du rognage). L’exemplaire A quant à lui a été imprimé sur le même papier pour l’ensemble du volume qui possède le même filigrane (filigrane 2). Il se trouve que le cahier D (tirage identique dans les deux cas) de l’exemplaire B est imprimé sur le même papier (filigrane 2) que l’exemplaire A. Par contre le cahier N (tirage identique dans les deux cas) est imprimé sur papier filigrané au raison (filigrane 1) pour l’exemplaire B et sur un autre papier pour l’exemplaire A. On ne peut donc en tirer aucune leçon. Vraisemblablement, deux papiers ont été utilisé pour les deux tirages de la seconde édition de 1707 du Diable boiteux, et les papiers ont été mélangés sans distinction d’usage pour l’un ou l’autre des tirages. Dans les deux cas le papier a été plié dans le même sens, il n’y a pas de différences notables pour les écarts entre les vergeures et les pontuseaux (ça c'est pour Martin).
Quelques photographies des filigranes :
Et que conclure ? Que tout ceci occupe bien son homme… pour rien ou presque !!
Je lis à l’instant dans Gervais E. Reed, Claude Barbin libraire de Paris sous le règne de Louis XIV, Droz, 1974, pp. 117 : « n° 620. Le Sage : Le Diable boiteux. 2e éd. 12° (sans ach. ; priv. du 5 juin 1707). B.N. Rés. pY2 2055 ; Ars. 8° NF 5128 (deux états). »
C’est succinct, c’est lapidaire, mais c’est dit : « deux états » pour la seconde édition.
Damned !
Donc, aucune découverte, seulement un petit amusement bibliographique entre amis.
Mais qui le savait ? Pas moi.
Et comme Rostand mettant dans la bouche de Cyrano les mots que l’on sait :
« Que dites-vous ?… C'est inutile ?… Je le sais !
Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès !
Non ! non, c'est bien plus beau lorsque c'est inutile ! »
Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès !
Non ! non, c'est bien plus beau lorsque c'est inutile ! »
Cyrano, Acte V, scène VI.
Je m'en vais heureux !
Pour l’anecdote, en relisant Reed : « La veuve Barbin débita ses livres jusqu’à sa mort à la fin de 1707. (…) Ayant quitté la maison rue de la Callandre pour en louer une autre plus petite dans la cour du Palais, la veuve Barbin, Marie Cochart, y mourut le 3 décembre 1707. » ; la querelle dans la boutique de Barbin pour se saisir du dernier exemplaire de la seconde édition (rapportée par le Journal de Verdun de décembre 1707), la veuve Barbin ne survécut donc guère à cet épisode de cape et d’épée bibliophilique.
Je vous invite à la relecture de notre précédent article sur le libraire Claude Barbin.
CLAUDE BARBIN, LIBRAIRIE PARISIEN SOUS LOUIS XIV
Bonne nuit,
Bertrand