samedi 12 juin 2010

Corneille et Chateaubriand reliés à la cathédrale et la vente des plaques à la cathédrale de l'atelier de Simier.


Bien souvent quelques images valent mieux qu'un long discours. Dernièrement, la vente d'une grande partie des plus beaux fers à dorer de l'atelier de reliure Simier (lire notre article sur le sujet) a été pour moi l'occasion d'observer dans le détail quelques unes des plus belles plaques relatives à la période romantique, période d'exercice de René Simier et donc finalement, seuls réels objets en rapport direct avec son temps. Après tout, les armes de Louis XV c'est bien joli, mais cela n'a finalement que bien peu à voir avec l'activité d'un atelier qui exerça dans la première moitié du XIXe siècle.

Je me suis donc penché plus particulièrement sur un type de reliure bien connu des bibliophiles amoureux de la période romantique, je veux parler du décor dit "à la cathédrale". Ce décor a été pratiqué entre 1830 et 1840 environ à quelques années près. Tous les relieurs chevronnés de l'époque et qui disposaient du matériel nécessaire (plaques en bronze gravées) s'y sont essayé, du plus grand au plus petit des relieurs de province. Simier y laisse sa marque avec de très belles plaques "à la cathédrale". Il y eut d'autres grands noms restés aujourd'hui dans les annales de la reliure romantique : Thouvenin frères, Khoeler, Vogel notamment.

Ce décor est à la fois sympathique et un peu facile à mon goût. Après tout il ne s'agit pour le relieur (ou plutôt doreur) d'appliquer une plaque à plat au centre des plats la plupart du temps. On est loin des reliures aux petites fers dorés pointillés du XVIIe siècle ou des reliures à dentelle ou mosaïquées du XVIIIe siècle. Mais c'est un style qui mérite d'être remarqué, facile à identifier.

Je vous propose de faire un petit retour sur les plaques dites "à la cathédrale" qui ont été vendues dernièrement lors de la vente de l'atelier Simier (2 juin 2010). Pour ce faire j'ai eu simplement à faire quelques copies d'écran du catalogue en ligne. La photographie et la notice qui les composent sont intéressantes. De plus vous avez le prix d'adjudication de chacune d'entre elles. Les voici.


Cliquez sur les images pour agrandir




Pour terminer ce billet je vous propose deux exemples de reliures dites "à la cathédrale", la premère, de petit format (in-12) est un plein veau glacé gris anthracite, sur Atala, René de Chateaubriand (Paris, Ledentu, 1834). Cette reliure n'est pas signée. La voici.



La deuxième reliure que je vous propose de découvrir est un volume de format grand in-8, plein veau cerise, sur Chefs d'oeuvre de Pierre et Thomas Corneille (Paris, Furne, 1829). Cette belle reliure est signée en pied du dos THOUVENIN. La voici.



Je vous laisse admirer ces décors, distinguer les petites différences entre les plaques utilisées, celles de la vente Simier, et vous faire finalement votre opinion sur ce titre de reliure à mi-chemin entre la reliure d'art (le corps d'ouvrage est parfait dans les deux cas) et la reliure semi-industrielle (utilisant non plus des fers mais des plaques pour décorer les plats comme ce sera le cas quelques années plus tard avec les percalines dites "éditeur" sur les plus beaux livres illustrés par Johannot, Grandville, Gavarni, etc. On voit bien que la bibliophilie ou l'art d'aimer les livres doit s'accommoder d'une évolution des techniques, des mœurs et des goûts, pour le plus grand bonheur des plus curieux.

Petite anecdote pour terminer, la plus grande et imposante reliure dite "à la cathédrale" que j'ai eu en mains était sur un in-folio de plus de 30 cm de hauteur, relié plein veau brun glacé, plats revouverts d'une seule grande plaque à froid "à la cathédrale" (quelques décors dorés ajoutés), sur une édition latine et grecque ... de Xénophon de 1550 environ. Le contraste entre l'impression XVIe et la reliure romantique a fait le bonheur d'un bibliophile audacieux. J'ai aussi vu une fois sur un des catalogues d'une des plus prestigieuse librairie de France, une reliure "à la cathédrale" en veau ou en maroquin (??) sur un livre d'heures du XVe siècle... étrange mélange. S'il n'y avait que moi je crois que j'aimerais trouver la plus belle des cathédrales sur l'édition originale de Notre-Dame de Paris de Victor Hugo (1831)... je sais qu'il en existe... mais à quel prix !!

PS : Si vous possédez une ou plusieurs belles reliures de ce type, n'hésitez pas à m'envoyer une belle photographie à bertrand.bibliomane@gmail.com, je me ferai un plaisir d'ajouter votre reliure à celles déjà présentées dans ce billet.

Bonne journée,
Bertrand

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