jeudi 5 janvier 2012

Le bibliophile mystère dans son intérieur bibliophile.



Le bibliophile mystère
(cliquez sur l'image pour l'agrandir)


Saurez-vous reconnaître le bibliophile photographié dans son intérieur présenté ci-dessus ? Une bien belle bibliothèque !

Tout fut vendu à l'encan. Et quelle vente ! Les jolies reliures que vous pouvez voir dans les deux bibliothèques fermées à l'arrière plan déchaînèrent les enchères du monde entier bibliophile. Tous les libraires, tous les amateurs étaient de la partie ! Il y eut trois opus. Cette bibliothèque se distinguait par la perfection des reliures et par la rareté des éditions modernes et du XIXe siècle, mais pas seulement !


Alors ? Vous avez trouvé ? Si vous êtes certain de votre coup, laissez chercher les autres.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 4 janvier 2012

Lorsque la Magie Noire s’empare de la Bibliophilie.

Croyez-vous à l’esprit du Malin, comme nous-autres en Bretagne ?

Le professeur Textor va encore déranger les souris (Non, Bertrand, je veux parler des rongeurs) pour exhumer du rayon « Réforme et Contre-réforme », ce grimoire maléfique qui fait la fierté de sa bibliothèque.

Fig 1 Le traité sur les Hérétiques. Un livre photogénique qui a tourné dans plusieurs films : le Nom de la Rose, Harry Potter et la coupe de feu, etc…

Vous connaissez sans aucun doute le jurisconsulte allemand Conrad Bruni (Rien à voir avec Carla Bruni) qui fit paraître en 1549 un traité sur les hérétiques (1) qui mérite d’être lu encore aujourd’hui pour ses réflexions caustiques sur le religieusement correct et le foncièrement satanique.

Je vous sens dubitatif sur l’intérêt de poursuivre la lecture… Si, si, malgré son sujet austère, ce livre ne manque pas d’intérêt. Enfin, je vais tenter de vous le prouver !

1/ En premier lieu, cet ouvrage est sorti des presses particulières de l'abbaye de St. Victor, près de Mayence, la ville-berceau de l’imprimerie, où furent imprimés, au cœur de la Réforme, des livres de propagande catholique. "Les moines de St Victor étaient ardemment dévoués au Saint-Siège; vers 1540, ils organisèrent une imprimerie particulière et appelèrent pour la diriger un bon typographe de Mayence, nommé François Behem" (Deschamps). François Béhem ou Bohème est le huitième typographe de la ville de Mayence après Gutenberg.

Fig 2 L’adresse de François Béhem, à Saint Victor Près Moguntia.


Fig 3 Les hérétiques et les Schismatiques ont cela de particulier qu’ils ne croient pas à la Sainte Trinité mais qu’ils portent pourtant des tricornes.

François Behem, originaire de Meissen, avait établi sa presse en 1539 dans des maisons du monastère. Cette imprimerie continua à Saint-Victor jusqu'en 1552, année où l'abbaye, avec toutes ses dépendances, fut ravagée et détruite par le margrave Albert de Brandebourg, de pillarde mémoire. François Behem dut transférer son atelier typographique à l'intérieur de la ville, dans la maison au Mûrier. Il ne put reprendre son activité qu'en 1554. De nombreux exemplaires des livres en stock chez Behem brulèrent au moment de l’incendie, d’où la difficulté d’en trouver aujourd’hui.

Fig 4 La marque au Pélican, symbole chrétien.

Behem employa un grand nombre de marques typographiques, dont celles au Pélican sont les plus connues. Il avait obtenu, après le décès d'Yves Schoeffer, le privilège impérial exclusif, que ce dernier et ses prédécesseurs avant lui avaient eu, d'imprimer les ordonnances impériales et les procès-verbaux des diètes de l'Empire.

2/ En second lieu, la reliure de cet ouvrage est un bel exemple des productions monastiques du Saint Empire : Une demie peau de truie estampée à froid avec réutilisation d’un livre du XIVe ou XVème siècle. Un manuscrit, sans doute encore plus assommant que le traité sur les hérétiques, a été consciencieusement arraché page par page par le relieur pour faire une sorte de plat lamellé, dont on aperçoit bien toutes les strates sur une vue en coupe. Le feuillet supérieur a pris toutes les vicissitudes du temps et laisse voir les feuillets intérieurs, bien plus frais. Un décollage de la reliure permettrait de reconstituer une bonne partie du manuscrit puisque j’ai compté pas moins de trente-deux feuillets pour les deux plats !

Fig 5 Vue de la coupe. Le premier bloc d’une quinzaine de feuillets est le plat de la reliure.


Fig 6 Sous la partie manquante apparait le deuxième feuillet de la reliure.

Les motifs de la partie porcine de la reliure présentent des bustes de romains et des saints prélats, accompagnés de mentions que je ne suis pas parvenu à déchiffrer. (DEFRUCTUVEN ? APPARVITRI ?). L’ouvrage a peut-être été relié directement sur place, à l’abbaye St Victor, pour la raison qui va suivre.

Fig 7 Détail de la reliure.


Fig 8 Un saint personnage bénissant le lecteur.


Fig 9 Autre détail du second plat.

3/ En dernier lieu, vient une singulière particularité de ce livre qui n’a pas son équivalent dans toutes les bibliothèques du Monde. Il faut que je vous dise d’abord que le Traité des Hérétiques doit contenir à la suite, quand il est complet, l’édition princeps du traité de St Optat de Milève contre les Donatistes, comme mentionné sur la page de titre du premier ouvrage. Ce traité de St Optat possède toutefois une page de titre distincte et une pagination particulière. Les catalogues anciens notent que cette pièce se trouve très rarement à la suite du Traité des Hérétiques et Clément, dans sa Bibliothèque Curieuse Historique, fait le commentaire suivant : "Monsieur Meermann qui a acquis les ouvrages de Conradi Brunus m’écrit avec raison qu’ils sont fort rares et très estimés des Curieux et qu’on les joint ordinairement aux Ecrits de Jean Colchée. Il remarque en particulier sur ce traité que l’ouvrage d’Optatus Milevitanus ne se trouve pas dans son exemplaire, ni dans les autres qu’il a eu entre les mains, et il conclut que le contenu ne répond pas au titre. J’ai trouvé le même défaut dans notre Bibliothèque Royale ; et je crois que le Traité d’Optatus Milevitanus s’est vendu séparément, parce qu’il a son titre particulier et qu’il a la forme d’un livre singulier, ou que quelques personnes l’auront joint aux ouvrages de Colchée parce que c’est à ce dernier que nous en sommes redevables, comme on le verra dans un moment. Quoiqu’il en soit, il existe à la suite de l’exemplaire de M. Brunemann et porte le titre OptatiMilevitani …. ".

Maintenant observez bien ces deux photos prises de l’exemplaire Textor :

Fig 10 Le Traité de Saint Optat.


Fig 11 Le Traité de Saint Optat

Ne voyez-vous rien de curieux ?

Non, je n’ai pas photographié deux fois la même page, mais bien deux pages différentes de ce livre. (On voit la différence aux taches sur la page). Vous avez deviné ? Le relieur a réuni, à l’époque, dans cette reliure monastique, deux exemplaires complets du même ouvrage !!

Que dire d’un livre qualifié de très rare dès le XVIIIème siècle lorsque deux exemplaires sont reliés à la suite : est-il deux fois plus rare, ou deux fois moins rare ?

Et surtout, pour quelle mystérieuse raison le relieur a-t-il jugé utile de doubler l’ouvrage de Saint Optat dont les deux exemplaires sont rigoureusement identiques, même année, même tirage, etc ? Une erreur de reliure ? Le cas peut se produire pour un cahier, lorsque le relieur confond le chiffrage, et double par exemple le cahier f au lieu du cahier s. Mais doubler un ouvrage entier ! Le relieur aurait-il abusé de la Mandragore ? Ou bien est-ce délibéré et alors, pourquoi ?

Mais ce n’est pas tout. L’imprimeur, pour ne pas être en reste sur le relieur, a laissé vierge, sans raison apparente, deux pages du texte (pp 326 & 335) au sein du sixième et dernier livre du Traité des Hérésies de Conrad Bruni !!

Fig 12 Exemple d’une page mystérieusement effacée, ou bien jamais imprimée au recto, mais dont le texte se poursuit au verso.

A mon avis, cette suite d’anomalies étranges ne doit rien au hasard…. Je penche pour une intervention du Malin. Sur cette conclusion hérétique, je vous laisse admirer d’autres photos de l’ouvrage, mais ne lisez pas à haute voix les formules figurant sur les plats, vous pourriez vous transformer en griffon, et je n’ai pas l’antidote !

Fig 13 Les plats seraient-ils recouverts de formules magiques ?


Fig 14 Le plat supérieur.


Fig 15 De Haereticis in genere !


Bonne Journée,
Textor

(1) Libri sex, de haereticis in genere. D. OptatiAfriepiscopiquondamMilevitani, librisex de donatistis in specie, nominatim in parmenianum . Ex bibliotheca Cusana. Mayence (S. VictonempropeMoguntia). FrancisciBehem. Collation unique au monde : In-folio en trois parties de (28) 358 (2) pp. (16) 69 (3) pp. (16) 69 (1) pp.

mardi 3 janvier 2012

Charles Bosse, libraire et Joseph Uzanne, journaliste, vous présentent leurs meilleurs voeux pour la nouvelle année.


Carte de vœux du libraire Charles Bosse pour la nouvelle année 1901.
Son adresse est au 46 de la rue de La Fayette à Paris.
Format 16 x 10,5 cm.


Avant de revenir à des sujets plus sérieux avec un billet de notre ami et fidèle aide de camp Textor, voici deux petites images comme j'aime en dénicher (certainement lié au fait que je n'ai guère cumulé de bons points à l'école... sorte de vengeance posthume-estudiantine).

Vous avez peut-être lu le billet intitulé : "Les devantures de librairies anciennes en images par la carte postale : la librairie ancienne & moderne Charles Bosse (1871-1944)" (publié le 7 décembre 2011). Nous avions vu ensemble un rapide historique de la librairie ancienne fondée par Charles Bosse. A l'appui, une carte postale ancienne expédiée en 1932 à l'adresse du 16-18 rue de l'Ancienne Comédie à Paris. Carteret nous expliquait que Charles Bosse s'était installé au 46 de la rue de La Fayette dès 1901. Adresse qu'il occupa jusqu'en 1913, date à laquelle il acheta le fonds de la librairie Durel au 16-18 de la rue de l'Ancienne Comédie. Son activité se développa donc à cette première adresse, rue de La Fayette.

En 1901 Charles Bosse est un jeune libraire de 30 ans. Situé dans le IXe arrondissement de Paris, dans le quartier La Fayette / Richer, le 46 rue La Fayette, est aujourd'hui un immeuble de 6 étages et qui compte 19 appartements. Voici ci-dessous la façade de cet immeuble avec un jolie portail en pierre. Je n'ai pas retrouvé à quoi ressemblait la devanture de la librairie de Charles Bosse en 1901.

Le 46 rue de La Fayette en 2011. Image Google Map.


Charles Bosse s'installe donc et cherche à se faire connaître. Il fait imprimer pour le nouvel an 1901, première année du XXe siècle, une jolie carte de vœux qu'il distribue à ses clients et à ses amis. C'est Paul Avril, illustrateur célèbre (bien connu des amateurs de curiosa pour sa facilité à croquer les nudités fin de siècle), qui est mis à contribution. Il s'agit d'une gravure sur bois (peut-être de Paul Avril également). Dessin qui fut ensuite aquarellé à la main au pochoir. J'ai trouvé un exemplaire de cette carte de vœux imprimée sur papier du Japon. Il n'y a aucune annotation sur la carte. Voyez vous-même ci-dessus.

Carte de voeux du journaliste Joseph Uzanne pour la nouvelle année 1900.
Eau-forte d'après Maurice Maradon.
Joseph Uzanne habite au 168 Bd Saint-Germain à Paris.
Format 12 x 9,5 cm


Je joins à ce billet une photographie d'une carte de vœux de Joseph Uzanne (frère d'Octave Uzanne), journaliste (qui a notamment collaboré aux albums Mariani à cette époque). Joseph Uzanne habitait au 168 du Boulevard Saint-Germain (le mercredi et le vendredi matin de 9 à 12h). On suppose donc qu'il ne s'agissait là que d'une adresse de travail. Le dessin de cette carte est l’œuvre de Maurice Maradon. C'est un tirage d'après un cuivre gravé. On peut voir la cuvette nettement marquée autour de la gravure. Cette carte de voeux est pour l'année 1900. Joseph Uzanne a ajouté à la plume sous son nom : "avec ses bons souhaits et ses meilleurs compliments." Le tirage est sur papier du Japon assez fort. La carte est restée vierge. Peut-être s'agit-il d'une épreuve d'essai ? On remarquera le dessin fortement influencé par le japonisme ambiant de l'époque. Voici ci-dessous à quoi ressemble le 168 du Boulevard Saint-Germain aujourd'hui (comme hier), c'est un bel et gros immeuble haussmannien (aujourd'hui envahit par quelques boutiques au rez-de-chaussée).

Le 168 Bd Saint-Germain à Paris en 2011. Image Google Map.


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

dimanche 1 janvier 2012

1er jour de l'an : une affreuse perspective ! Lithographie de Charles Vernier de la série Actualités. Les temps ne changent guère finalement ...


ACTUALITÉS


Lithographie originale de Charles Vernier.
Épreuve coloriée à l'époque et tirée sur blanc.
Série "Actualités", numéro de la planche : 588.
Numéro de la pierre : 510.
Titre : Une affreuse perspective !...
Publiée par la Maison Martinet, 172 rue de Rivoli et 41 rue Vivienne.
Lithographie Destouches 28 rue de Paradis, Paris.
Format : 25 x 21,5 cm

Enregistrée dans la Bibliographie de la France,
Journal de l'imprimerie et de la librairie,
n°52 du 25 décembre 1858.

Je faisais un peu de tri dans mes dernières lithographies acquises dont un grand nombre est de la main de Charles Vernier (dont j'avais déjà traité ICI). Le titre de la lithographie ci-dessus était trop beau pour passer outre en ce premier jour de l'année. Il me sert donc de tremplin pour vous demander ce que vous pensez qu'il arrivera d'un point de vue livresque et bibliophile en 2012. Après vous avoir interrogé rétrospectivement sur 2011, vous voici contraint de jouer à Nostradamus et de nous dire ce que vous pensez que le sort réserve aux bibliophiles pour cette nouvelle année.

A vos claviers !

Bonne soirée de l'an !
Bertrand Bibliomane moderne

Le Bibliomane moderne vous présente ses meilleurs voeux pour cette nouvelle année 2012 : elle sera grandiose ou ne sera pas !


Il n'y a pas que les livres dans la vie ! ...

... Et au milieu coule une rivière.

Que l'année 2012 vous apporte le meilleur de vous-même !



Amitiés bibliophiles,
Bertrand Bibliomane moderne

vendredi 30 décembre 2011

Dernière tribune libre de l'année 2011 : Quel livre a marqué pour vous cette année 2011 ? Quel évènement bibliophilique ?



Chères amies bibliophiles ou bibliomaniaques (permettez messieurs que je commence par saluer les quelques Dames qui nous lisent), cher amis amateurs de bons et beaux livres, demain sera le dernier jour de l'année 2011. Une année passe si vite que l'on a parfois du mal à suivre...

J'espère que le Bibliomane moderne vous apporte (presque chaque jour) votre lot de découvertes et de surprises en "amour des livres", amour des livres, qui, on le voit bien, va souvent jusqu'à la passion la plus déréglée. Mais après tout, n'est-ce pas dans les passions déréglées qu'on retrouve un peu de soi-même ? Les blogs qui traitent de bibliophilie ou de l'amour des livres anciens et modernes de collection sont désormais en nombre et apportent, chacun à leur manière, de quoi contenter l'amateur. C'est une belle chose pour nous tous.

2012 sera une année importante à plus d'un titre, elle apportera son lot de contentements et de mécontentements, mais chacun, pour peu que la bonne santé soit au rendez-vous, et que l'économie des ménages permette à chacun de suffire aux besoins du foyer et aux "petites passions" et tout sera parfait. Espérons-le ainsi.

Il y a quelques jours de cela j'ai écouté une émission de radio dont l'invité était un éminent commissaire priseur parisien, renommé pour ses ventes VIP et plutôt orientées vers l'Art Contemporain. J'avoue que j'ai écouté cette émission avec une grande attention et que j'ai essayé d'en retirer tous les enseignements possibles pour l'avenir. Ce commissaire priseur, sans être prophétique, donnait quelques clés pour "comprendre le marché de l'art", pour "bien investir", pour "acheter de l'art". Je reste très dubitatif sur ses propos. Si je résume ce qu'il a dit et qui peut s'appliquer à n'importe quel objet d'art vendu aux enchères, cela donne quelque chose du style : "N'achetez pas ce que vous aimez ! Apprenez à aimer ce qui est bien !" (...) "Quand on collectionne il faut apprendre" (...) "Achetez au dessus de vos moyens ! Achetez des chefs d’œuvre ! Payez en quatre fois, mais quand vous avez un chef d’œuvre vous avez un chef d’œuvre... Quand vous avez quatorze croutes vous avez quatorze croutes (...)"

Il explique ensuite que la vente aux enchères est un jeu de séduction... pour lui la salle est une femme...

Très intéressant tout ça. Il ajoute : "collectionner n'est pas un problème d'argent, c'est un problème de connaissance, alors il est clair que si vous voulez acheter ..." (la phrase n'a pas été terminée... on comprend pourquoi). Vous pouvez écouter ou réécouter cet entretien intéressant ICI.

Si l'on s'en tient au domaine du livre et plus particulièrement du livre ancien ou moderne dit de collection ou rare, ces conseils sont-ils aussi judicieux ? Sans doute.

Mon humble avis sur la question est plus nuancé. Mes constats sur un peu plus de 20 années de collection, de recherche assidue du livre rare, du document curieux, m'a amené plus d'une fois à m'interroger sur ce marché, sur ses habitudes, sur ses mœurs, sur son avenir. Quelques constats : si les livres anciens et rares restent recherchés, des pans entiers sont désormais devenus complètement hors marché (je veux parler notamment des livres de références et autres bibliographies classiques, mais aussi de nombreux petits livres d'art ou de monographies, aujourd'hui sévèrement concurrencés par la numérisation et la mise en ligne des sources, je veux parler aussi des livres imprimés dans des langues mortes, latin, grec, hébreu, etc, ouvrages aujourd'hui la plupart du temps boudés par les amateurs si ce ne sont pas en même temps de riches livres illustrés). C'est ainsi. A contrario, quels sont les secteurs qui marchent ? Les livres anciens très illustrés, les grands classiques d'auteurs passés à la postérité, qu'ils soient français ou étrangers (Zola, Hugo, Maupassant, Hemingway, Proust, Céline, etc). Les autographes et les livres modernes dédicacés importants sont aussi très convoités. Peut-être me direz-vous : "comme depuis toujours". Sans doute. Les livres modernes, les livres d'artistes sont aussi à mon avis en plein essor. Autant dire que si vous recherchez des éditions anciennes d'Aristote ou de Cicéron vous avez de bonnes chances de les obtenir pour rien ou presque... mais ce n'est pas aussi simple puisque si les mêmes sont recouverts de riches reliures anciennes en maroquin ou ayant appartenu à de nobles bibliophiles tels Grolier ou Maïoli, vous avez peu de chance de les avoir à bon compte. Alors comme toujours, tout est une question de dosage, de moyens, de savant mélange de passion et de raison. Savoir se faire plaisir tout en sachant garder la tête froide. Est-il raisonnable d'acheter un livre au delà de 50.000 euros ? Doit-on d'ailleurs se poser la question ? J'ai lu hier que le manuscrit enluminé de la Vie de Sainte Catherine d'Alexandrie (vers 1474) avait finalement rejoint les collections de la Bibliothèque Nationale de France, faisant suite à un mécénat important et à diverses souscriptions à hauteur de 4,5 millions d'euros. Ce manuscrit sera d'ailleurs présenté au public courant 2012 par la BNF. Évidemment nous sommes là dans l'exceptionnel, la pièce de musée. Vous êtes-vous déjà posé la question de savoir à partir de quels critères une pièce de collection devait être classée "monument national" ? Quels autographes ? Quels livres ? Quels chefs d’œuvre de la peinture ? de la sculpture ? La réponse n'est pas aisée. Pourtant elle me semble légitime. Ce qui m'amène à revenir sur les propos du commissaire priseur évoqué ci-dessus : "N'achetez pas ce que vous aimez ! Apprenez à aimer ce qui est bien !" Je trouve cela très réducteur. Cela ne laisse la place finalement ni à la curiosité ni à la fantaisie. Et si moi je préférais Gavarni à Picasso ? Et si vous préfériez les éditions populaires du XIXe siècle imprimées sur mauvais papier aux incunables imprimés sur peau de vélin ? Et si la valeur des choses rares ne donnait finalement qu'une bien mauvaise image la curiosité des amateurs les plus nombreux. Pour tout vous dire je conçois assez mal toute cette débauche préfabriquée autour de l'Art Contemporain qu'on nous impose à longueurs de pages dans les colonnes de la Gazette Drouot notamment. J'aime avoir envie de dire : "ce n'est pas parce que vous me les montrerez mille fois que je les aimerai mille fois plus !" On a le droit d'aimer ou de ne pas aimer. On a aussi le droit de trouver que le prix de l'indécence à des limites. 180.000 euros pour une toile de Pierre Soulages "brou de noix sur papier" (1950) ... 410.000 euros pour un dessin érotique de Balthus (1954) .... alors que des toiles de petits maîtres français ou italiens du XVIe ou du XVIIe s. se vendent le plus souvent pour quelques milliers d'euros seulement, parfois beaucoup moins. Je reste songeur. Si j'adapte ce processus aux livres, je ne donne pas cher de la peau de nombreux bibliophiles qui ne s'y retrouveront bientôt plus. Car impose-t-on finalement à quelqu'un ce qu'il doit aimer ? L'amour de l'art à l'image de l'amour pour une femme nait, me semble-t-il, d'une rencontre magique, d'un instant, peu importe tout le reste, que la femme fut riche ou pauvre, jolie ou laide, l'important c'est d'aimer. Alors ? Nous verrons bien... seul l'avenir nous dira ce qu'il adviendra de tout ça, de tout ce que l'on nous impose. Peut-être suis-je totalement dans l'erreur... ou pas.


Voici donc ma question qui vous occupera si vous le voulez bien jusqu'au début de l'année prochaine (le temps que je me remette de quelques fantaisies gastronomiques et œnologiques...) :

Quel livre a marqué pour vous cette année 2011 ? Quel évènement bibliophilique ? Que retiendrez-vous de cette année 2011 en la matière ?

Vous pouvez vous exprimer en toute liberté, sur tout ce qui vous vient à l'esprit, nous dire ce que vous pensez, ce que vous ressentez de votre passion, vos envies, etc.

Tribune libre ! A vos claviers ! (et pas de timidités inutiles... merci !)

Bonne soirée et meilleurs vœux pour cette nouvelle année 2012 Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 29 décembre 2011

Nouvelle acquisition : un dessin à la mine de plomb par Paul Gavarni (sans date). La songeuse.


Dessin original à la mine de Plomb par Paul Gavarni (1804-1866).
Format 38 x 27 cm - 25 x 20 cm pour le sujet
Signé en bas à droite


Le Père Noël, comme le facteur (la factrice en l’occurrence), sonne toujours deux fois ! Il vient de passer à nouveau.

Il a délicatement déposé un gros paquet, pas très lourd, confectionné avec soins par l'expéditeur attentionné (ce qui fait toujours plaisir). Ce gros colis contenait un dessin que je viens d'acquérir. Encore un dessin original signé GAVARNI. Vous retrouverez ICI l'ensemble des billets que j'ai consacré cette année et les années précédentes à cet artiste à mon sens injustement reconnu aujourd'hui (mais ça je ne vais pas le crier non plus trop fort...).


Signature de Paul Gavarni.


Quid de ce dessin ? C'est un dessin à la mine de plomb, encore dans son cadre ancien (probablement un cadre des années 1880-1900 portant au dos l'étiquette de la Maison G. Amaury, 62 rue de La Boëtie, près le Faubourg St-Honoré, à Paris). Ce cadre est en bois stuqué blanc avec bordure intérieure dorée. L'ensemble mesure 38 x 27 cm. Le dessin a été encadré tel quel sans passe-partout. Il occupe la presque totalité de la surface du cadre. Le sujet mesure 25 x 20 cm environ mais la signature GAVARNI est tout au bas de la feuille, au ras de la baguette d'encadrement (voir photo de la signature). Ce dessin n'est ni daté, ni légendé.


Détail
s


Il représente une jeune fille ou une jeune femme, le regard baissé, les mains l'une contre l'autre près de la poitrine. On devine un dossier de fauteuil sur lequel elle est assise. Elle porte une petite coiffe et une belle robe dont la partie basse n'est qu'esquissée pour s'évaporer rapidement et laisser place à l'imagination de celui qui regarde cette œuvre. Le visage de cette jeune femme est très abouti et très finement dessiné, on y reconnait sans conteste la patte de Gavarni "croqueur de femmes". Que fait cette jeune femme le regard ainsi baissé ? Je viens de demander à mon épouse, elle m'a répondu instinctivement : "elle brode peut-être (...) ou elle pleure (...) ou un homme étant en train d'essayer de la séduire, elle baisse les yeux et regarde le sol et ne sait plus quoi faire de ses mains..." Belle imagination !... Je vous laisse y voir ce que vous voulez.

Je n'ai pas encore eu le temps de chercher dans le catalogue raisonné de l’œuvre de Gavarni si ce dessin y avait déjà sa place où s'il n'a pas encore été répertorié.

Je suis bien évidemment preneur de toute information concernant ce charmant dessin qu'on pourrait intituler "la songeuse".

Je suis très heureux de cette nouvelle acquisition qui ira rejoindre les quelques autres dessins rassemblés depuis quelques années.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part X : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière (suite) ...


Lot 15, "Une Liseuse de Romans" by Vincent Van Gogh, oil on canvas, 28 3/4 by 36 1/4 inches, November 1888. Christie's sale, nov. 3, 2010.

"Another oil on canvas by Van Gogh is Lot 15, "Liseuse de Romans." It measures 28 3/4 by 36 1/4 inches and was painted in November, 1888. It has a modest estimate of $3,000,000 to $4,000,000. It sold for $3,106,500. It was once in the collection of John Hay Whitney of New York. It has been widely exhibited and published. Van Gogh disagreed with Paul Gauguin's emphasis on painting from "abstraction" and from "memory," but this painting was done from "memory." "The formal aspects of the present painting," the catalogue noted, "also point to Gauguin's influence. The flat planes of color, framed in heavy black outlines, recall the style of cloisonnisme established by Gauguin, Bernard, and Louis Anquetin at Pont-Aven earlier in the year. Particularly noteworthy is Bernard's Les Bretonnes dans la prarie from August 1888...which anticipates both the emphatic contours and the distinctive palette...of Van Gogh's Liseuse. Bernard gave this canvas to Gauguin, who brought it with him to Arles; Van Gogh found the painting so original that he made a watercolor copy." (source : http://www.thecityreview.com/f10cimp1.html) By Carter B. Horsley

Il vous suffisait de 3 millions de dollars pour voir cette "liseuse" trôner dans votre salon... ou pas.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part IX : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière (suite) ...


Carte postale ancienne des années 1920.


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part VIII : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière (suite) ...


Étude de nu (bibliophile ?)
Tirage photographique des années 1910-1920.
Vue stéréoscopique (image en relief grâce à des lunettes stéréoscopiques).


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 28 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part VII : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière...


Tirage photographique des années 1920-1930. Allemagne.
Carte postale à usage très privé.
Collection particulière B. H.-R.


Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

Les devantures de librairies anciennes en images par la carte postale : la librairie P.-V. Stock au 155 rue St-Honoré à Paris.


La Librairie P.-V. Stock au 155 rue St-Honoré
devant le Théâtre-Français, à Paris.

Carte postale ancienne, vers 1910.

Les familiers de Kropotkine, Cornelissen et Bakounine, entre autres libertaires-révolutionnaires, connaissent bien les éditions de P.-V. Stock publiées au tournant du XIXe et du XXe siècle. Je pense particulièrement à la Bibliothèque Sociologique avec sa célèbre couverture imprimée sur papier rouge. Nous en reparlerons bientôt. Célèbre éditeur qui prit tous les risques pour donner à lire des idées subversives et bien souvent condamnées par le pouvoir en place, P.-V. Stock marqua son temps et bien plus encore.

Le nom de P.-V. Stock fait résonner (raisonner) à mes oreilles de lecteur comme à celles des indignés du siècle dernier, comme une douce musique de liberté.

Le site internet de la maison d'édition P.-V. Stock est si bien fait qu'il serait inconvenant de la ma part de reprendre le travail, aussi me contenterais-je de vous donner l'adresse du site. Ainsi vous trouverez tout l'historique de cette célèbre maison d'édition ICI. C'est une bien vielle maison ! C'est pourtant Pierre-Victor Stock qui lui donnera son nom en 1877 en en prenant la direction. Il la dirigea de 1877 à 1921. En 1921, elle est rachetée par Maurice Delamain et Jacques Boutelleau - alias Jacques Chardonne.

Et qu'y-a-t-il encore aujourd'hui au 155 rue St-Honoré, juste en face le Théâtre-Français ? Voyez ci-dessous. La libraire Delamain a résisté à l'envahisseur dans ce si joli quartier de Paris à deux pas du Louvre et du Palais-Royal.

Le 155 rue St-Honoré à Paris. Photo Google Map (2008).
Librairie Delamain.

J'aurai bientôt l'occasion de vous reparler de l'éditeur Pierre-Victor Stock, mais patience...

Et pour finir sur une note libertaire, je dois vous dire que ce court billet m'a été inspiré ce soir par la lecture d'une fiche biographique d'un illustre inconnu sur lequel je cherchais quelques informations sur le net. Et je trouvai : "(...) a fait carrière dans la banque internationale. Il se consacre maintenant à l'histoire et à la littérature." J'ai trouvé ça si beau ! et si encourageant ! (pour les banquiers et leur potentiel de reconversion évident je veux dire) que je n'ai pu m'empêcher de relire deux pages de Kropotkine (Paroles d'un révolté) avant de m'éteindre jusqu'à demain.

Je suis certain que 2012, sans prophétiser, sera un bon cru ! (je veux dire pour les esprits libertaires... ou pour les banquiers... qui sait ?).

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

lundi 26 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part VI : Daumier est-il mort en pauvreté ? Des nouvelles de nos amis du Daumier Register www.daumier-register.org



Voici quelques nouvelles d'Honoré Daumier via nos amis du Daumier Register, Lilian & Dieter Noack www.daumier.org & www.daumier-register.org

===============================

Chers amis de Daumier,

Daumier est-il mort en pauvreté ? Cette question a souvent été étudiée et personne n'a été en mesure de donner une réponse satisfaisante. Dans notre site Daumier (http://www.daumier.org/index.php?id=176) nous avons essayé de composer une liste de prix et coûts différents pour donner un aperçu général de la vie quotidienne du temps de Daumier.

Par chance, nous venons maintenant de découvrir une lettre manuscrite de Daumier, qui se trouve dans une collection privée. Elle montre que Daumier, le 16 Décembre 1862, a dû vendre certains de ses meubles. Vous trouverez une copie de la lettre dans l'annexe à ce mail.

Nous devons supposer que cette lettre est une indication de la mauvaise situation financière pendant cette période de la vie de Daumier. Vous vous rappelez peut-être qu' en Février 1860 Philipon avait démissionné Daumier. En conséquence Daumier se trouvait en difficultés financières au moins jusqu'en Décembre 1863, quand après la mort de Philipon il travaillait de
nouveau pour le Charivari. La pauvreté est un thème récurrent dans l’œuvre de Daumier. Notre petit vidéo « DAUMIER et la pauvreté » sous http://www.youtube.com/watch?v=e2ZQ9y4v9Ag en donne une impression.

Lilian et Dieter Noack du Daumier Register vous souhaitent bonnes fêtes et une heureuse Année.

Cordialement,

Lilian & Dieter Noack
www.daumier.org & www.daumier-register.org
Center for International Daumier Research

***Videos: http://daumier-videos.webs.com/***

Brèves de fin d'année, Part V : un dessin original non signé, encre de chine et aquarelle, vers 1960-1970 ?



Format 25 x 15 cm. Encre de chine et aquarelle.
Vers 1960-1970 ?


Tout droit sorti de l'imagination fertile d'un artiste inconnu ... un dessin original à l'encre de chine et mis en couleurs. Ce dessin date probablement des années 60 ou 70. Le carton support semble dater de quelques dizaines d'années. A-t-il servi pour illustrer une couverture de BD adulte ? C'est ce que j'entends bien savoir.

Et vous ? Vous en pensez quoi de ce dessin ?

PS : ce dessin acheté en même temps que d'autres (que je vous montrerai peut-être si vous êtes sages...) doit être l'oeuvre d'un anglo-saxon compte tenu de la légende que comporte certains d'entre eux.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

=========================

Dessin que je suppose être du même artiste ?
A voir...

dimanche 25 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part IV : le Père Noël est passé... une assiette Creil & Montereau "bouquiniste" pour bibliomane ...




Assiette en faïence de la fabrique Creil & Montereau
(fabriquée entre 1884 et 1895).
Décor imprimé polychrome. Diamètre 20,5 cm.
Très bon état.
Cette assiette fait visiblement partie d'une série consacrée aux bouquinistes,
celle-ci porte le n°6 et est titrée au dos de l'assiette
"Bouquiniste. (pour savants). 6."


Curiosité bibliomanique... inutile de vous dire que je recherche les autres assiettes de cette série...


Joyeux Noël à toutes et à tous,
Bertrand Bibliomane moderne

samedi 24 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part III : la bibliophilie c'est chouette !


Photographie ancienne. Tirage argentique, vers 1920 (USA).
Collection privée B. H.-R. (depuis pas très longtemps...)

La bibliophilie c'est chouette non ?

Joyeux noël à toutes et à tous,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part II : huile sur toile de Gabriel Hervé intitulée "Pendant le repos".


Huile sur toile de Gabriel Hervé intitulée
"Pendant le repos"

Quelqu'un sait-il où se trouve ce tableau exposé au Salon de 1910 ?

Joyeuses fêtes à toutes et à tous,
Bertrand Bibliomane moderne

vendredi 23 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part I : De la lecture moderne... ou pas.


CLAUDE B. TENOT PHOTOGRAPHE PORTRAITISTE

Pensez-vous que cela vous ferait la même chose si vous voyiez cette demoiselle lire sur un iPad ?


Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

Charmante et délicieuse bibliophilie féminine d'antan.





Que lit-elle ? J'opterais pour un volume du Larousse Universel Illustré, pas vous ?


Bonnes fêtes de fin d'année à toutes et à tous,
je vous laisse en compagnie ce joli minois bibliophile 1900,


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 21 décembre 2011

Annuaire des ventes de livres 1984-1991 : un argus des livres de collection méconnu et peu courant.



Si vous lisez le Bibliomane moderne depuis le 15 octobre 2008 alors vous avez lu l'article consacré à l'Annuaire des ventes de livres de Léo Delteil, publié entre octobre 1918 et 1930 avec un volume supplémentaire pour l'année 1931 par M. Lang (imprimé en 1933). En 1934 paraitra de manière séparée mais dans le même esprit et reprenant à peu près la même ligne éditoriale le "Vade mecum du libraire et de l'amateur ou liste alphabétique et prix des livres adjugés à l'hôtel des ventes de Paris d'octobre 1933 à juillet 1934." Ce volume possède les mêmes qualités que les volumes du "Delteil". Soit 13 volumes regroupant plusieurs dizaines de milliers de résultats de ventes aux enchères de livres. Une mine ! mais il faut chercher dedans volume après volume... c'est parfois assez décourageant sauf si le livre que l'on cherche en vaut vraiment la peine. Je vous laisse lire ou relire mon billet de l'époque où vous pourrez retrouver les autres "argus" parus les années suivantes et ce jusque dans les années 80 (Grolier, Maetterlin, Argus du livre de collection). Je m’aperçois qu'à l'époque ce billet n'avait reçu aucun commentaire... sans doute le sujet est-il quelque peu rébarbatif. Celui-ci risque de l'être également. Tant pis ! Je poursuis le chemin dans le même sens.


Il y a quelque temps déjà j'ai fait l'acquisition d'un ensemble qui m'avait paru très intéressant et surtout qui m'était totalement inconnu. Il s'agit de l'Annuaire des ventes de livres pour les années 1984 à 1992. Soit 8 volumes grands in-4 (27,5 x 22 cm) de plusieurs centaines de pages chacun. 8 volumes reliés pleine toile beige, titre imprimé à froid en marron sur les plats et aux dos. Jolie série imprimée sur beau papier. Le premier volume est pour l'année 1984 et a été publié chez Hubschmid & Bouret, 11, rue de Sèvres, Paris 6e. (volume imprimé en 1985 - dépôt légal : avril 1985 - imprimé en France par Pollina à Luçon).

Que nous disent les éditeurs en préambule ?

"Voici la première édition de l'Annuaire des Ventes de Livres. Nous l'avons conçu en fonction de quatre impératifs. Premièrement : la parution annuelle, qui permet de saisir très rapidement les tendances d'un marché qui évolue constamment. Deuxièmement : pas de sélection. Nous publions tous les résultats et notre but sera d'être de plus en plus complet. Troisièmement : présenter une vue d'ensemble des prix du livre ancien. Pas seulement des prix obtenus en salle de vente mais aussi ceux pratiqués par les libraires. Ainsi chacun pourra se faire une idée du cours à l'achat et à la vente de tel ou tel ouvrage. Quatrièmement : le prix de vente le plus bas possible, afin de faciliter la diffusion et une meilleure connaissance de la valeur des livres anciens. Nous espérons servir ainsi le Livre Ancien : la profession, mais aussi les amateurs. Afin d'améliorer les prochaines éditions, nous demandons à tous les utilisateurs de nous communiquer leurs suggestions et critiques. Il nous faut remercier les vingt libraires qui ont eu le courage de donner publicité à leur prix de vente(*). Nos remerciements vont aussi à Messieurs les experts et commissaires-priseurs qui nous ont aidés avec une amabilité constante et beaucoup de bonne volonté." Signé : "Les éditeurs". (première année, 1984)

L'entreprise était louable et fort bien annoncée.


Qu'en est-il du point de vue de la réalisation ?

A vrai dire, la maquette est assez curieuse. Les notices sont classées par ordre chronologique des auteurs (parfois des titres). Elles sont imprimées dans différentes tailles de caractères et différentes polices. On dirait que ce sont les notices des catalogues "photocopiées" (et non recopiées - voir photo). Les prix ont été ajoutés à la main en dessous de chaque notice, ce qui n'est pas sans donner un certain "charme" à cette documentation qui fait presque "artisanale".

Reste à savoir si cet Annuaire est aussi complet qu'il le prétend ? ... je serais bien incapable de le dire. Les volumes, de grand format, imprimés sur deux colonnes, avec quelques illustrations, renferment néanmoins plusieurs dizaines de milliers de résultats pour les années concernées ce qui est fort intéressant.

Ainsi, dans le premier volume, si je me reporte à MONTAIGNE, on lit sous le n°29 (numéro de la vente - voir table en début de volume - et ici reporté à la main comme le prix), ESSAIS, Bourdeaux, 1580, 2 vol. petit in-8, maroquin lavallière de Cuzin père etc. Superbe exemplaire. Adjugé 175.000 francs (vente Ader Picard Tajan, 29 mars 1984).

Accès facile. Résultat rapide. Évidemment les prix sont de vieux prix... mais cela donne tout de même une indication et permet surtout de retrouver assez facilement des exemplaires vendus aux enchères entre 1984 et 1992.

Quid de la deuxième année ?

Je laisse la parole aux éditeurs (les mêmes) du second volume :

"Voici la seconde édition de l'Annuaire des Ventes de Livres. On remarquera que ces dernières années le marché du livre s'est particulièrement développé en France. Paris avec l'Hôtel Drouot reste la première place du monde pour les ventes de livres aux enchères. La librairie française se porte bien, même si l'amateur se plaint de la difficulté croissante de trouver des exemplaires de qualité à des prix raisonnables. Le prix des livres n'a cessé de croître à tel point que certains lorgnent avec la gourmandise d'un financier les vitrines des libraires et les catalogues de ventes publiques. Sans vouloir sublimer la passion des livres il est préférable pour tous, d'écarter ces tentations souvent malsaines. Le marasme dû à la spéculation intensive qui s'est produit il y a quelques années dans la numismatique peut être un bon rappel de ces dangers. Cette envolée particulièrement sensible pour les livres illustrés (livres de peintres, illustrés modernes) n'a pourtant pas encore donné de signe d’essoufflement. Elle s'est même étendue à tous les exemplaires exceptionnels et il faut reconnaître que l'année 1985 nous a offert de belles ventes. On devra donc davantage considérer les résultats de ventes en tant que cote maximum alors qu'autrefois professionnels et amateurs consultaient les annuaires de ventes pour se faire une idée de base (les résultats étant souvent inférieurs à ceux pratiqués en librairie). Le phénomène aurait donc tendance à s'inverser ou du moins à se modifier considérablement. Puisse notre annuaire avec ses milliers de cotes obtenues en cette année faste aider nos lecteurs dans leur choix." (avan-propos pour l'année 1985).

Que de sagesse !


Quid de la troisième année ?

"Nous vous présentons la troisième édition de l'Annuaire des ventes de Livres. Bonne continuité dans la progression des résultats de ventes de livres même si en quelques domaines des signes de stabilité apparaissent au cours des ventes. Comme pour 1985 plusieurs belles ventes ont eu lieu à l'Hôtel Drouot mais aussi en province où l'on aura remarqué les 7 800 000 francs d'adjudication pour un manuscrit exceptionnel exécuté vers 1200 (Maître Pierre Poulain commissaire-priseur et Monsieur Jean Morel expert). A Paris on notera aussi les 1 700 000 francs d'un manuscrit de Jean Genet : Journal d'un voleur, 155 pages (Maître Ader, Picar, Tajan, commissaires-priseurs associés, expert Maryse et Michel Castaing), dans cette même vente du 4 juin, le Bestiaire ou Cortège d'Orphée d'Apollinaire illustré par Dufy et relié par Sonia Delaunay atteignait 800 000 francs (Maître Guérin et Courvoisier experts). Un autre manuscrit exceptionnel du début du XVIe siècle et consacré aux chevaux était adjugé 1 900 000 francs le 25 février (Maîtres Couturier et Nicolay, expert Monsieur Guy Martin). Même les Jules Verne que chaque année l'on dit moribonds, atteignent le 20 avril de belles cotes chez Maître Hervé Poulain (expert Monsieur Michel Roethel) avec 62 000 francs pour le fameux "Sans dessus dessous", les exemples seraient trop nombreux pour que l'on puisse grever cet avant-propos de résultats contenus dans le présent annuaire. Cependant on notera avec un peu de tristesse que tous ces bons résultats qui font de Paris la première place pour le livre ancien, n'ont pas empêché l'année suivante de laisser se dérouler à Monaco et sous les auspices d'une maison de ventes anglaise l'une des plus belles dispersions de ce siècle d’ouvrages consacrés à la chasse. Pour garder le sourire signalons un autre évènement de taille qui a eu lieu au printemps : la première vente aux enchères à Moscou depuis la Révolution d'Octobre, et bien sûr cette grande première était consacrée aux livres anciens." (avant-propos pour l'année 1986).

Pas mal ! Disons peut-être que "Tous les livres" se résume un peu à "très beaux livres exceptionnels" (mais c'est l'avant-propos... effectivement dans l'Annuaire on retrouve de tout et à tous les prix.


1987 c'est 15 000 notices annoncées extraites de 64 catalogues parisiens (Hôtel Drouot) et de 26 catalogues provinciaux. Pas de commentaires spéciaux pour 1987. Idem pour 1988. Idem pour 1989. Il n'y a pas de volume pour 1990. Et pour cause, une erreur sur les couvertures indique 1991 pour le volume qui donne les résultats "du 1er janvier au 31 décembre 1990". Idem pour 1992 qui donne les résultats "du 1er janvier au 31 décembre 1991". Le titre est cependant différente puisqu'il n'est plus question d'Annuaire mais de "Résultats de ventes publiques de livres anciens". C'est sans doute une erreur de la part des relieurs. La page de titre indique les bonnes dates. A noter que ces deux volumes pour 1990 et 1991 donc, et non pour 1991 et 1992, ont été édités par Ides et Calendes (Neuchâtel), conjoint au nom de l'ancien éditeur Hubschmid & Bouret. La présentation ainsi que les reliures sont identiques en tous points.

Voilà de quoi est composée ma série. Question : le volume marqué "1992" (pour l'année 1991) est-il le dernier de la série ?

J'ai téléphoné à la maison d'édition Ides et Calendes. J'ai eu quelqu'un de visiblement peu renseigné. La demoiselle en question ne savait pas me dire... Je n'ai pas insisté. Ce qui est certain c'est que j'ai cherché sur le moteur Vialibri pour savoir quels volumes étaient à la vente, et je n'ai trouvé que ceux que j'ai. Je suppose donc la série complète ainsi de tout ce qui a paru.

Nous voici donc avec une documentation riche (environ 15.000 notices sur 8 années soit environ 120.000 résultats de vente de livres entre 1984 et 1991), peu maniable mais agréable à consulter.

A noter que cette entreprise a été lancée en même temps que l'Argus du Livre de Collection. En effet, l'Argus du Livre de Collection édité par Promodis puis par le Cercle de la Libraire, puis par la société Artprice, existe depuis 1982 et 2008 (visiblement l'Argus papier édité par Artprice s'est arrêté à L'Argus du livre de collection 2008 : Ventes publiques avril 2007 - mars 2008). Internet a sans doute contribué à sa chute...

Bilan : une belle documentation (une de plus dirons certains) - utile ? ça dépend. Agréable : oui assez. Curieuse et sympathique entreprise en tous cas. D'ailleurs j'aimerais bien connaître les noms de celles et ceux qui étaient à l'origine de ce projet qui dura tout de même 8 années. Si vous souhaitez vous constituer la collection il vous en coûtera entre 20 et 60 euros le volume (source Vialibri), ce qui est somme tout assez raisonnable pour des volumes solidement reliés et très présentables.

Possédez-vous cette série ? Vous en servez-vous ? Comment considérez-vous la documentation de type "Argus" à l'heure du tout internet ? Votre avis nous intéresse.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

(*) voici les 20 librairies en question : d'Argences (Paris), A. Bellanger (Nantes), Bourguignat (Paris), Chaminade (Annecy), Dasté (Paris), Jean-Paul Delon (Marigny-St-Marcel), G. Durance (Nantes), Geley (Paris), Guénégaud (Paris), Herbinet (Paris), Laffitte (Paris), Léonce Laget (Paris), Gérard Oberlé (Montigny-sur-Canne), Picard (Paris), Rossignol (Les-Arcs-sur-Argens), Rousseau-Girard (Paris), Stendhal (Paris), Table d'Emeraude (Paris), Le Tour du Monde (Paris).

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...