dimanche 23 janvier 2011

Petit intermède uzannien : deux nouvelles cartes de voeux entrent dans ma collection.


Petit intermède uzannien. Je viens de faire l'acquisition de ces deux très jolies cartes de vœux faites pour Octave Uzanne pour les années 1890 et 1896. Ce petit billet fait donc suite et complément aux article déjà consacrés aux cartes de vœux artistiques dessinées et gravées par les meilleurs artistes de son temps pour son usage personnel. Le premier billet est à lire ICI, le second ICI et enfin le troisième ICI. Je vous laisse admirer le travail !

Eau-forte (cuivre), tirée sur papier japon (86 x 75 mm pour l'image - 117 x 96 mm pour la cuvette), cette eau-forte n'est pas signée mais ressemblerait bien au travail de Félix Buhot qui a déjà travaillé pour Uzanne (??).



Eau-forte tirée sur papier japon épais (120 x 91 mm pour l'image - 125 x 95 mm pour la cuvette), elle est signée Massé qui a travaillé avec Uzanne notamment pour la femme et la mode.


Ces deux cartes sont vierges de toute écriture au verso. Elles n'ont jamais servi. S'agit-il d'épreuves d'artiste que Uzanne se réservait ? de simples essais ? J'ai acheté en même temps que les estampes ci-dessus, deux épreuves pour les vœux de 1891 imprimées en bistre sur papier Japon pelure (très mince). Je possède maintenant 4 épreuves sur ce papier pour 1891, le papier dans ce cas, impropre à l'écriture, ne laisse aucun doute quant à la destination de ces épreuves. Ce sont des tirages artistiques d'essai. D'ailleurs j'ai acquis également cette même estampe pour 1891 sur carton fort type papier d'Arches. Restée également vierge. La voici.

Eau-forte tirée sur papier d'Arches épais (113 x 92 mm pour l'image - 118 x 100 mm pour la cuvette), elle n'est pas signée mais si l'on se réfère à la femme aux bras racine en arrière plan, cette estampe pourrait bien être le travail de Félicien Rops qui a travaillé plusieurs fois avec Octave Uzanne notamment pour Son altesse la femme (1885).


Bon dimanche,
Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 20 janvier 2011

Courrier des lecteurs : une superbe reliure de la fin du XVIe siècle. A qui l'attribuer ?



Je vous transmets le courrier d'un lecteur qui fait appel à votre érudition collective afin de démêler le vrai dans une histoire de très belle reliure de la fin du XVIe siècle. Lisez plutôt :


"Bonjour, Suite à notre discussion de ce matin, je vous fais parvenir quelques photos de "la bête". Il s'agit d'un Plutarque (Les vies des hommes illustres, chez Jacques Du Puys à Paris en 1572). Il mesure 395 x 285m et fait près de 10 cm d'épaisseur. Pour couronner le tout, les tranches sont finement ciselées avec des restes de polychromie. Voici un petit texte qui pourrait accompagner les illustrations que je vous transmet, mais vous êtes libre de le modifier ou de me demander de le faire si vous pensez que c'est utile. Cette reliure en maroquin brun semble être sortie hier de chez le relieur alors qu'elle a plus de 4 siècles.


Je n'y vois aucune trace de restauration. Des fers ont été utilisés pour le médaillon central, pour les fleurons encadrant les plats ainsi que pour décorer le dos de petits fleurons au centre des 8 caissons, encadrés par de petits médaillons dorés.
Le reste de la décoration est constitué de jeux d'arabesques se terminant par des feuilles d'acanthe. Ces lignes sont composées de petits points juxtaposés (visibles si on grossit les clichés). Le manque de symétrie de ce décor donne l'impression qu'il a été exécuté à "main levée". En cela il est caractéristique d'un relieur qu'on appelait "le grand doreur d'Henri II" à qui cette reliure est attribuée par la personne qui le possédait. Dans la littérature que j'ai consultée, et en particulier dans "La reliure française de Marius Michel (1880)", il est fait mention de ce grand relieur, mais il est indiqué que la dernière reliure connue de celui-ci serait de 1561... La date de publication de ce Plutarque (1572) semble donc tardive pour que ce soit de lui... La question de son attribution reste donc ouverte ! Avis aux experts !!!"

MD pour le Bibliomane moderne



mercredi 19 janvier 2011

Au hasard des acquisitions bibliomaniaques... Albert Cim (1845-1924) et son épouse. Trois cartes postales photographiques avec autographe.


Albert Cim dans sa bibliothèque, à son bureau, vers 1911. Albert Cim est alors âgé de 66 ans. Il a déjà donné de 1905 à 1908 les 5 volumes de sa monumentale compilation bio-bibliographique sur le livre.


Billet simple ce soir, j'ai reçu ce matin l'une de mes dernières acquisitions bibliomaniaques. Trois cartes postales photographiques assez rares. Je ne suis pas collectionneur de cartes postales sauf celles qui concernent mon village et le martyre de Sainte Reine (avis aux collectionneurs...), mais lorsque je suis tombé sur ces cartes postales photographiques je me suis dis qu'elles seraient en bonne place dans mon exemplaire broché de Le livre par Albert Cim(*). Voyez plutôt !


Madame Albert Cim, dont j'ignore totalement l'identité (si quelqu'un sait ??), sans un petit salon, vers 1911.
Au verso de la carte il a été ajouté au stylo, d'une écriture plus récente, "Mme Cim. 90 rue de Vaugirard (Paris)."


Carte postale photographique avec le portrait d'Albert Cim en médaillon et lettre autographe à l'encre noire. Elle est datée du 14 décembre 1911.


(*) Albert Cim, ou de son vrai nom Albert-Antoine Cimochowski, dit Albert Cim, né à Bar-le-Duc le 22 octobre 1845 et mort le 8 mai 1924, est un romancier, critique littéraire et bibliographe français. Né d'une mère française et d'un père officier polonais réfugié en France après l'insurrection de 1830, Albert Cimochowski entame à Paris en 1861 une carrière de fonctionnaire aux Postes et télégraphes et, sous le nom d'Albert Cim, débute dans le journalisme par des articles de philologie, de critique et de bibliographie qui sont vite remarqués. Il collabore à de nombreux journaux et tient la rubrique Revue littéraire du Radical de 1881 à 1894, puis du National de 1895 à 1897. Il participe également à la rédaction du Dictionnaire de la langue française de Littré. Parallèlement, il publie en librairie des ouvrages pour la jeunesse et des romans, qui lui valent d'être cinq fois lauréat de l'Académie française, ainsi que des études documentaires, littéraires et bibliographiques. En 1896, il devient bibliothécaire au sous-secrétariat d'État des Postes et des télégraphes. Il est également membre de la Société des gens de lettres, dont il est deux fois vice-président. Il est surtout connu des bibliophiles pour son ouvrage : Le Livre : historique, fabrication, achat, classement, usage et entretien (5 volumes, 1905-1908), véritable référence et compilation en la matière. Éléments biographiques d'après C.-E. Curinier, Dictionnaire national des contemporains, vol. II, 1899-1919, p. 329-330.

Je ne désespère pas de trouver un jour prochain les mêmes cartes postales photographiques avec en vedette Octave Uzanne (pas avec sa femme il n'en n'a jamais eu...) ... qui sait ? le hasard est parfois heureux...


Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

mardi 18 janvier 2011

Paléographie janinesque... ou Jules Janin déchiffré par les lecteurs du Bibliomane moderne...


Ce soir, peu de temps...

Je vous laisse en compagnie d'une jolie lettre que je viens d'acquérir. Une lettre de l'ami des livres et des lettres bien connu des colonnes du Bibliomane moderne, je veux dire Jules Janin.

Je vous laisse lire cette lettre, la déchiffrer, n'hésitez pas à donner votre "version" en commentaire, tout le monde en profitera.

Cliquez sur l'image pour l'agrandir


Nous en reparlons très vite...

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

dimanche 16 janvier 2011

Tribune libre du Bibliomane moderne : Vous pouvez être bibliophile ? Bibliomane ? mais êtes-vous monomaniaque ?



La question est toute simple. On peut être bibliophile, avec toute la noblesse que beaucoup veulent accorder à ce terme parfois un peu surfait. On peut être bibliomane, avec toute la petitesse que beaucoup veulent accorder à ce terme parfois un peu méprisant. On peut être monomaniaque !

Je m'explique.

On peu aimer les livres illustrés du XVIIIe siècle comme Martin ou bien les livres du XVIe siècle comme Textor, ce qui, vous en conviendrez, laisse la place à pas mal de folie... réunir une bibliothèque entière composée de livres illustrés du XVIIIe siècle prendrait en effet beaucoup de temps, d'efforts et d'argent ... quant à réunir une bibliothèque entièrement composée d'ouvrages du XVIe siècle, est-ce encore possible aujourd'hui ? Mais dans ces deux cas est-on monomaniaque pour autant ? Le champ à moissonner est vaste et laisse des portes ouvertes... on peut glisser sur le XVIIe siècle, s'intéresser aux reliures, etc. Non, ma question est plus précise et à la fois plus restrictive et j'espère qu'elle trouvera un écho dans vos divers témoignages que je souhaite nombreux.

Je veux parler de ces bibliophiles ou de ces bibliomanes là : ceux qui ne collectionnent et ne recherchent QUE des reliures signées TRAUTZ-BAUZONNET ! ceux qui n'achètent que les éditions du vivant et de Voltaire ! Rousseau ! Molière ! Corneille ! Racine ! Qui sais-je encore ? Ceux qui ne recherchent et ne collectionnement que les reliures en maroquin rouge ! vert ! bleu ! citron ! Ceux qui ne rassemblent que des livres avec envoi de Céline ! de Proust ! de Lautréamont ! ... Bref, vous l'aurez compris, je cherche à dépister parmi vous les toqués de tous poils, les fondus d'un auteur, d'un relieur, d'un thème, qui n'achètent QUE cela, JAMAIS rien d'autre, sans jamais regarder ailleurs si l'herbe est plus verte ou plus tendre.

Vous aurez compris que si je vous interroge sur cette question (que j'espère intéressante - pour moi elle l'est), c'est que moi même je me suis souvent posé la question : suis-je monomaniaque ? En tant que libraire c'est impossible, mais en tant que collectionneur c'est tout à fait envisageable.

Je nous laisse en débattre ensemble si vous le voulez bien.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

samedi 15 janvier 2011

L'affaire de Madame la baronne Double.



Voici un histoire que je viens de découvrir au hasard d'une de mes dernières acquisitions. Je la partage avec vous, la curiosité étant sans aucun doute le meilleur moteur de la passion bibliophile.

Je vais essayer de vous résumer l'affaire de Madame la baronne Double. De son nom de jeune fille (ça fait toujours plaisir aux dames de glisser "jeune fille" dans une conversation ...) Henriette-Marie-Adelaïde Biard d'Aunet était née en Suisse en 1848. Elle épousa en premières noces le vicomte Jules de Peyronny (mariage du 1er juillet 1863), puis en secondes noces le baron Double, et c'est précisément cette union qui nous intéresse ici. Le baron Double, célèbre collectionneur, bibliophile émérite, chasseur de reliures historiques aux armes des plus grands personnages et des rois, avait littéralement craqué pour les beaux yeux de la veuve Peyronny.

Ainsi que nous le rappelait l'excellent Bibliophile Rhemus dans l'un de ses savants biblio-commentaires : "Le baron Lucien Double (1848-1895)a été élevé au milieu des livres de la bibliothèque de Louis XIV que son père, Léopold, avait acquise en 1848. Ses deux centres d'intérêt étaient les livres de provenance royale ou princière et les livres d'une haute curiosité bibliographique (incunables, etc.). Sa bibliothèque fut dispersée à Paris en 1897."

Si vous souhaitez lire quelques lignes autographes du Baron Double, je vous invite à lire ou à relire le petit billet que j'avais rédigé il y a de cela quelques mois à propos d'un billet que le Baron Double avait adressé au libraire Durel, ICI.

Mais reprenons le fil de cette histoire conjugale fort distrayante...

Donc, comme je disais, le baron double souffre pour les yeux de la belle dame Peyronny...et comme l'écrit si bien Jules Clarétie dans La vie à Paris en 1896 : "Le Baron Double, le collectionneur célèbre, l'homme qui, de son salon, avait fait un Louvre, un musée de curiosités uniques, avec tel vase de porcelaine, le fameux vase de Fontenoy, qui valait quatre cent mille francs, le baron, libre de sa destinée et de sa vie, rencontre, un jour, une femme charmante (en général on évite de rencontrer les autres... NDLR...), d'un esprit délicat et supérieur, avec la bonté dans cet esprit, - ce qui est rare ; il s'en éprend, il veut l'épouser, il la supplie de lui donner sa main, et, comme est mariée, séparée, comme il faut du temps pour le divorce, on demande le secours d'une législation étrangère, ... et l'on divorce en Saxe. Le mariage du baron a lieu, le père du baron (Léopold) adore sa belle-fille, les salons de la baronne s'ouvrent à tout ce que Paris compte de notoriétés et même d'illustrations. (...)"

Et voilà comment un second mariage, célébré à l'étranger (Londres), en 1885, rend la toute nouvelle baronne Double coupable de Bigamie, son premier mariage n'ayant été annulé qu'en 1887 ! Et tout un imbroglio s'en suit... cette affaire défraiera la chronique mondaine parisienne pendant de nombreuses années. En 1896, la cour d'appel de Paris prononce un arrêt pour l'annulation pure et simple de ce second mariage en raison du caractère frauduleux de sa naturalisation. Évidemment, derrière tout cela, vous vous doutez bien que l'immense richesse du baron Lucien Double, décédé en 1895, suscita de la part de sa famille de viles réticences à continuer de considérer Dame Perrony comme une belle plante gracieuse et aimable... et ce même si le baron lui y voyait des yeux de velours... Ah l'amour !! Enfin...

J'ai retrouvé le texte intégral d'un des arrêts important dans cette affaire, je vous laisse le lire ci-dessous.

Cliquez sur les images pour lire le texte







En 1890, sans préciser son nom sur la page de titre, le baron Lucien Double offre au public un catalogue des merveilles de son "cabinet" de bibliophile. Il est publié sous le titre : "Cabinet d'un curieux. Description de quelques livres rares. Se donne chez l'auteur, A Paris, 1890" (1 vol. in-8 de 134-(1) pages avec des planches. Ce catalogue a été imprimé aux frais de M. le baron Lucien Double par les soins de la librairie Téchener, ainsi qu'il est précisé au collophon. J'ai la chance de posséder l'exemplaire de Gustave Mouravit, non moins célèbre bibliophile de l'époque, et qui a écrit à la mine de plomb sur la page de garde du volume : "Volume très rare : Description de la collection Léop. Double (et Lucien Double). Précieux à divers points de vue. G. Mouravit." Mon exemplaire sort de la librairie Auguste Fontaine avec le cachet de cette librairie en haut de la garde blanche. Le volume s'ouvre sur une petite présentation par Lucien Double lui-même de sa bibliothèque et surtout de celle de son père, Léopold. Je l'ai lue et relue, je n'y ai trouvé aucune allusion à son épouse tant aimée ... (c'est humain !)

Mais voilà ! La Baronne Double ou celle qui se faisait appeler comme cela dans les cercles mondains du tout Paris à la fin des années 1880 n'était pas que cela... elle était femme de plume ! Et elle s'en sortait très honorablement si l'on en croit la presse de l'époque et la critique. Elle écrivait dans les journaux et publiait des livres sous le pseudonyme prédestiné d'"ÉTINCELLE" ! Très joli non ? C'est d'ailleurs l'acquisition d'un de ses ouvrages qui me fit découvrir toute cette histoire cocasse. Il s'agit de L'irrésistible, par Etincelle. Paris, Calmann-Lévy, 1893. 1 volume in-12. Un des dix exemplaires sur papier impérial du Japon. Demi-maroquin havane de l'époque signé Canape. Il me reste à le lire pour savoir comment écrivait cette brave dame.

Étincelle alias Mme la baronne Double donc. Il est même écrit dans les arrêts de ce long procès qu'elle pouvait s'enorgueillir d'une "situation brillante et fructueuse que son talent d'écrivain lui avait conquise". Elle avait cependant cessé sa collaboration au Figaro depuis juin 1882 (date à laquelle elle avait demandé sa séparation de corps d'avec son premier époux). Vous suivez toujours ? ... Pas simple les affaires conjugales ! Je continue donc.

J'adore ce passage de l'arrêt : "Attendu que toutes les circonstances qui ont précédé, accompagné ou suivi le mariage célébré à Londres sont donc exclusives de toute bonne foi, et établissent, au contraire, que la célébration de ce mariage a eu pour but unique de voiler une liaison préexistante, et de permettre à Lucien Double et à la défenderesse de revendiquer la situation d'époux auprès d'amis qui n'avaient pas à apprécier la validité du lien qui les unissait (...)" ... Il y a des amis dont on se passerait bien non ? ...

Comment finit toute cette histoire ? Lucien Double meurt le 5 janvier 1895. On sait d'après l'arrêt ci-dessus que le baron avait formé contre elle une demande en nullité de ce mariage (19 novembre 1894)... l'amour ne jouait peut-être plus tant alors... ??? Attendu que ledit Baron avait deux filles naturelles... reconnues (le coquin...) Attendu que la maman dudit Lucien, toujours de ce monde, demande la nullité du mariage également après le décès de son fils... Bref, conclusion, le mariage est annulé et la succession Double revient à sa mère et à ses filles naturelles... Étincelle s'éteint quant à elle à Paris courant de l'année 1897.

Tout est bien qui ne finit pas toujours bien... les histoires d'amour finissent mal... en général, comme dit la chanson.

Je ne sais pas si vous avez tout suivi, je crains avoir été un peu brouillon, sans doute afin de vous permettre d'écrire la suite et la fin de cette histoire que je trouvais amusant de remettre en lumière.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 13 janvier 2011

Noel du Fail, Sieur de la Herissaye, conteur au pays breton.


Une fois n’est pas coutume, je voudrais faire la promo d’un voisin qui s’invite souvent à la maison (il est vrai que le manoir du sieur de la Herissaye à St Erblon n’est qu’à une quinzaine de kilomètres du mien ! Fao bin vaïzineu un p’tit !*)

Cet auteur-là est un personnage cabotin en diable, doté d’un sens de l’observation incroyable et qui manie la dérision avec bonheur pour en tirer une certaine morale très personnelle. Comme il dit souvent : « Le ris n’empesche pas qu’on ne die vérité ». Par exemple, le livre ici présenté est intitulé « Les Contes et Discours d’Eutrapel, par le feu seigneur de la Herissaye, gentilhomme breton. » Et bien, lors de sa parution, en 1585, l’auteur est encore bien vivant et nous fait comme un pied-de-nez d’outre tombe, en parlant de lui au passé.

Fig 1 Page de titre des Contes et discours d’Eutrapel par le feu seigneur de la Herrissaye.

La vie de Noel de Fail est déjà un conte en elle-même : Issu de la petite noblesse de Haute Bretagne, il naquit vers 1520 dans le manoir familial de Château Létard à Saint-Erblon (Ille et Vilaine). Vers 1540, il quitta sa famille pour entreprendre des études juridiques, la coutume de Bretagne sous un bras, le mousqueton sous l’autre. On le retrouve dans les universités de Poitiers, d'Angers, de Bourges, de Toulouse. Son humeur joyeuse ne parait pas avoir été affectée par ses embarras financiers qui l’obligèrent à entrer dans l’armée. Il participe en 1544 à la bataille de Cérisoles. Rentré de la guerre, sans doute pour cause de paix prématurée, il débarque à Lyon, termine sa formation universitaire et y publie, en 1547, chez Jean de Tournes, ses « Propos rustiques de maistre Léon Ladulfi, champenois ».

Ces Propos Rustiques ont un certains succès ; Noel du Fail y brosse un tableau étonnamment vivant de la campagne rennaise, agrémenté des conversations de paysans qui semblent enregistrées sur place et de nombreuses réminiscences humanistes nourries de Virgile et d'Horace.

À son retour en Bretagne, en 1548, il est « licencié es loix ». Un bon mariage (avec Jeanne Perreauld) et l'achat de charges au présidial de Rennes (en 1552) puis au Parlement (en 1572) font de lui un notable de la région. Il poursuit pour autant son œuvre facétieuse, à la fois divertissante et sérieuse, dont l’ensemble constitue un témoignage intéressant sur la société rurale du XVIe siècle :

- Les Baliverneries d'Eutrapel (Paris, 1548)
- Les Contes et Discours d’Eutrapel (Rennes, Noël Glamet de Quinpercorentin, 1585, in-8°)

Les Contes d’Eutrapel furent publiés une première fois en 1585, puis remis en vente l’année suivante avec pour seul changement le feuillet de titre, au format in-8, même collation et même erreur de pagination, puis au format in-12. Il existe aussi une impression in-12 de 1587. L’édition présentée, de 1597, est la sixième, toujours à l’adresse du fameux Noel Glamet de Quimpercorentin, qui semble n’avoir publié que ce titre. C’est la version la plus complète et la dernière révisée par l’auteur sur celle de 1587.

A. De la Borderie avait réalisé des recherches approfondies sur cet imprimeur mystérieux : Un imprimeur tout entier dévoué à la seule impression des 9 éditions des Contes d’Eutrapel, cela méritait une longue notice ! Au final, le bandeau de départ et certaines lettrines des Contes d’Eutrapel ressemble étrangement à ceux utilisés par Jean Richer pour les Matinées de Guillaume Cholières et pour les Touches et les Bigarrures de Tabourot. Jean Richer serait-il Noel Glamet ? (2)

Fig 2 l’imprimeur Glamet s’adresse à ses lecteurs.


Fig 3 le premier conte d’Eutrapel : Lupolde, magnifique songeur de finesses, pour un teston, pouvait babiller très longtemps …

A quelques lieues de St Herblon, se trouve le village de Sion les Mines qui fut au 16e siècle le fief des seigneurs de la Chapelle et l’un des foyers de la « nouvelle opinion ». En 1562, René de la Chapelle de la Roche Giffart se convertit au protestantisme et entraina dans son sillage d’autres familles nobles et tous les manants qui en dépendaient.

Soupçonné de protestantisme, Noel du Fail est exclue du Parlement de Bretagne entre 1572 et 1576. Réintégré après avoir prêté serment de catholicité, il participe à la réforme… du droit breton en publiant ses Mémoires recueillis et extraits des plus notables et solennels arrests du Parlement de Bretagne (1579). À sa retraite en 1586, il est fait prisonnier par la Ligue et n'est libéré qu'après rançon. Catholique ? Protestant ? L’anagramme de son nom restera : le fol n’a Diev.

Fig 4 De l’escolier qui parla latin à la chasse. Où l’on apprend que les lièvres de Bretagne entendent le latin comme ceux de Paris.

Les sources de du Fail sont multiples : Les classiques anciens, bien sur, mais aussi les modernes comme Rabelais, au premier chef, qu’il savait par cœur et allait jusqu’à parodier ; Pierre Messié, que du Fail a lu comme tous ses contemporains et dont il emprunte certaines situations (cf les Diverses Leçons) ; mais aussi Erasme. Ainsi le chapitre « De la moquerie » dans les Contes d’Eutrapel doit tout à un petit opuscule peu connu du Maitre de Rotterdam, le De Lingua, où l’on retrouve des anecdotes communes à Pierre Messié et à du Fail. Ce dernier a vraiment suivi de très près son modèle au point de traduire souvent des passages entiers du De Lingua , qui est un petit traité sur l’art du discours, et notamment la manière de se comporter face aux écarts de langage et à la plaisanterie. (3)

Fig 5 - Le chapitre « de la moquerie »


Fig 6 - Les Diverses Leçons de Maitre Pierre Messié, chez N.Bonfons, 1584, source d’inspiration pour N. du Fail.


Fig 7 - Le De Lingua d’Erasme, dans une version éditée à Lyon chez Gryphe, 1534. Du Fail y puisa généreusement pour rédiger le chapitre de la moquerie.

Truculent, son style est … motieu d’gallo motieu d’françoys**, comme on le parle encore ici, et les personnages dont il nous conte les mésaventures existent toujours. Ils se nomment Tailleboudin, Gobemouche ou Perrot Claquedent. On y cause de la misère du Monde, on y boit force pintes et puis on en arrive à se quereller, et tout finit par une bagarre générale, comme celle des Propos Rustiques, entre les villages de Flameaux et de Vindelles dont voici quelques extraits pour vous donner une idée du ton, jamais très loin de Rabelais :

« Au mois de Mai que les ébats amoureux commencent à se remettre aux champs, ceux de Flameaux firent une archerie, où toutes les fêtes s’exerçaient fort, tellement qu’on ne parlait que d’eux dans tous le pays, et à leur grand avantage. Mais ceci ne leur dura guère que ceux de Vindelles (comme vous savez) prochains voisins, mus d’une envie, conspirèrent une haine couverte, oyant le los et bon bruit qu’on leur donnait, et qu’on ne parlait d’eux, attendu mêmement qu’ils étaient gentils galants, et hauts à la main que voisins qu’ils eussent. ….. (Les Vindelles viennent leur chercher querelle) Les Flameaux, sages, ne répondirent rien, pour ce qu’il n’est point de pire sourd que celui qui ne veut ouïr, sinon : Bien, bien, bien, nous leur dirons ; vous êtes gentils et beaux enfants ; allez, allez ; vous etes ivres de lait caillé. Ceux de Vindelles répondaient pour leurs défenses, bien échauffés, que les Flameaux n’étaient que des petits sotereaux, petits glorieux, moucheurs de chandelles, et masques de cheminé, se souciant peu du labeur de leur terre, aussi pauvres comme rats, et qu’il n’avaient que le bec. …. (La bagarre se déclenche et les Flameaux prennent l’avantage) Ces pauvres Vindellois se voyant ainsi surpris et tout doucement mener, criaient à l’aide, à la force, au meurtre. Hé Messieurs ayez merci de nous, hélas, pardonnez-nous ! par le sang bieu, disaient ceux de Flameaux, les pardons sont à Rome, vous en aurez : Tu Dieu! vous faites les rustres ! et quoi ? comment ? torche, lorgne. Faut entendre, car voici le beau du jeu, que les femmes des deux villages pouvaient facilement ouïr les alarmes qui là se faisaient. Au moyen de quoi chacune se délibéra aller voir que c’était. …. (Les femmes rappliquent, bagarre générale !) Bref, il n’y en avait pas une qui ne fit le diable. Et y fussent encore ces bonnes dames, si la nuit ne les eût départies. A cette cause, chacun se retira en son enseigne, n’ayant lacs ni couvre-chef en tête, le visage tout égratigné, les oreilles presque arrachées, et les cheveux Dieu sait comment accoutrés, et les robes rompues. Par le moyen de la nuit survenue, commencèrent à belles injures, comme putains, vesses, ribaudes, paillardes, prêtresses, bordelières, tripières, lorpidons, vieilles édentées, méchantes, larronesses, maraudes, coquines, sorcières, infâmes, truies, chiennes, commères de fesses, foireuses, morveuses, chassieuses, pouilleuses, baveuses, merdeuses, glorieuses, malheureuses, teigneuses, galeuses, vieilles haquebutes à croc, vieilles dogues plus ridées qu’un houseau de chasse-marée, vieux cabas, demeurants de gendarmes, maquerelles, brouillons, effrontées, puantes, rouillées, effacées, mâtines, tannées, louves. Et tellement criaient et braillaient ces déesses, que tout le bois de la Touche en retentissait. »

Bonne soirée, restons calme…
Textor

* Il faut bien se rendre visite entre voisins (Patois gallo)
** Pour partie du parler de Haute Bretagne, pour partie du français. (Patois gallo)
(1) Coll. In-12 de (4), 223, (1) ff
(2) Voir commentaires de Louis Loriot in la Revue des Livres Anciens 1916 TII Fasc. 3 p 313.
(3) Emmanuel Philipot, La vie et l’œuvre littéraire de Noël du Fail gentilhomme breton, Paris, Champion, 1914.

mardi 11 janvier 2011

Le coup de gueule du Bibliomane moderne ou satire contre les faquins, pendards et aultres gredins es librairie ...



Chose promise, chose due ! Je vous avais dis que je pousserais mon coup de gueule, c'est parti !

Je commencerai tout d'abord par une énumération linéaire et circonstanciée : paltoquet, gougnafier, gredin, fripon, vil maraud, bougre d'âne, cornichon, fils de Satan, moule à gaufre, zapotek, bachi-bouzouk, vermine, canaille, fripouille, scélérat, garnement, bandit, voyou, sacripant, arsouille, petite frappe, malhonnête, filou, voleur, méchant, faquin, vaurien, pendard, dévoyé, crapule, brigand, requin, malandrin, pirate, flibustier, escarpe, misérable, perfide.

Cornegidouille ! Que cela fait du bien ! Il fallait que ça sorte !! Mais diable pourquoi ce soir le Bibliomane moderne est-il aussi remonté et déverse-t-il sa bile avec autant d'âpreté dans les colonnes du blog ? Ah Mesdame, Messieurs ! l'heure est grave ! il est temps de dire aux faquins que ce sont des faquins !


Mais commençons par le commencement... Ce weekend j'ai été, comme on pourrait dire ... un peu occupé voyez-vous... samedi matin à l'heure du passage du facteur pour la livraison des colis de la librairie... je n'avais pas encore fermé l'œil (pour cause d'accouchement intempestif de ma femme qui avait décidé sans me demander mon avis de devancer l'appel de près de 10 jours... ) et je savais que je ne serais pas en mesure de réceptionner les quelques paquets que j'attendais.

Rien de grave jusque là me direz-vous, j'attendrais donc lundi pour passer prendre mes colis en dépôt au bureau de poste. Ce qui fut fait. Et pour tout vous dire, c'était bien la première fois que je rentrais dans une maternité avec un sac rempli de trois petits colis. J'avais laissé les plus gros à la maison pour les déballer tranquillement le soir à mon retour.

Bref, me voilà avec quatre paquets de petite taille à déballer, gentiment, sans faire trop de bruit pour ne pas réveiller bébé... sur les trois paquets, un était sous carton rigide et les deux autres des enveloppes souples. Une des enveloppes, enveloppe blanche avec face intérieure avec plastique à bulles avait méchamment souffert du voyage postal, c'était flagrant. On aurait dit qu'un 38 tonnes était passé dessus !! Ce qui fut d'ailleurs sans doute le cas ! Un peu paniqué par l'aspect délabré du colis, je décidai de l'ouvrir en premier. Je n'eus pas beaucoup de mal à le faire d'ailleurs, l'enveloppe étant presque entièrement déchirée. Dès le départ, je sentais assez mal ce qui allait suivre... je ne savais pas quel livre contenait ce paquet... je fus vite au courant ! Seul, sans protection que le plastique à bulle de l'intérieur de l'enveloppe, je sortis le volume... un plein veau brun de la fin du XVIIe siècle. Au premier coup d'œil je vis que le volume avait souffert ! Plus même ! Le 38 tonnes avait du rouler dessus... le premier plat était cassé net en deux, entrainant également la rupture des mors de la reliure. Volume écrasé, tordu, rompu, pour ainsi dire saccagé ! Dans ces cas là je ne peux même pas vous dire ma fureur ! (le fait d'être dans une maternité a retenu mes cris et mes gestes...) ... j'étais en rage, un vil gredin de basse espèce, qui croyant que parce qu'on vend un livre ancien peu cher, pas assez cher à ses yeux sans doute, on expédie le livre dans les pires conditions possibles, à la va vite, à la j'en foutre, bref, on saccage un livre de plus de 300 ans, par négligence, facilité voire malhonnêteté ! Il s'agissait de l'édition originale en reliure de l'époque des Poésies de Madame Deshoulières (in-12, Paris, Mabre-Cramoisy, 1688). Je précise que le vendeur de ce livre n'est pas un professionnel et qu'il s'agissait d'une femme... ce qui dans les deux cas n'excuse ni n'explique rien... Dramatique voyage donc pour ce livre qui finit en piteux état et qui désormais aura besoin d'une restauration qui sans doute ne suffira pas à lui redonner tout son lustre ! Beau gâchis pour un emballage inadapté ! Je demande pourtant systématiquement à ce que les livres, quel qu'en soit le prix, soit emballés avec soin, dans du plastique à bulle, le tout renfermé dans un carton rigide plus grand et solide. Je passe sur les vendeurs de livres qui s'assoient sur le fait que vous leur demandez expressément à ce que le livre vous soit expédié en colissimo recommandé (donc avec signature) et qui vous l'expédient sans aucune recommandation ni suivi... Ni vu ni connu... allons-y gaiement ! ... Vous voyez là j'étais déjà passablement énervé, avec raisons je pense (vous me donnerez votre sentiment sur la question). Mais ce n'est rien comparé à ce qui a suivi ...

Le deuxième colis était une enveloppe de papier kraft, un peu gonflée. Expédiée en recommandé (j'ai signé à la poste le matin pour récupérer ce colis), je n'avais pas regardé le nom de l'expéditeur. Une fois à la maternité (oui je vous rappelle le lieu pour la solennité du récit...), je regardai le nom de l'expéditeur. Ah ! M. XXX. libraire de son état (ou déclaré comme tel), donc je savais de quel livre il s'agissait ! les Heures Royales dédiées à la Reyne etc..., 1778, reliure plein maroquin rouge de l'époque avec décors de tulipes et de grenades mosaïqués sur les plats, pièce de mosaïque au dos, dentelle dorée, volume supposé en parfait état, bref, une merveille que j'attendais de pied ferme ! Mon sang ne fit qu'un tour, vous imaginez ! Une reliure digne de figurer dans Michon, en parfait état, envoyée dans une simple enveloppe kraft !!! J'ouvris le colis délicatement mais à vitesse accélérée... outre l'enveloppe kraft le petit volume (c'est un in-12) était enroulé dans deux ou trois tours de plastique à bulles puis pour finir dans un film plastique étirable alimentaire (vous voyez de quoi je parle)... volume démailloté... ouf !!! miracle !!! trois fois miracle !!! le volume était sain et sauf !!! Mais quelle chance !!! Quelle stupidité ! Quel faquin ! Quel gredin ! Quel pendard !! peut bien oser envoyer un volume de cette préciosité d'une valeur historique (outre la valeur financière non négligeable) dans une simple enveloppe kraft !! même sous quelques couches de plastique à bulles !! Aucun carton fort pour protéger les coins et les coiffes de la reliures, aucun carton plat pour protéger le volume des chocs sur les plats, bref, une négligence totale ! un dédain du livre ! un non-science de la librairie ! à vomir ! De la part d'un libraire qui fréquente Drouot assidument, qui propose régulièrement de bons livres à la vente, c'est impardonnable ! c'est inqualifiable ! Comment peut-on se moquer de la sorte du destin d'un livre rare, parfaitement conservé après plus de deux siècles. Il se trouve que j'avais repéré que ce livre avait figuré au catalogue de la librairie Morgand et Fatout dans les années 1880. On aime à croire que Morgand n'expédiait pas ses livres de la sorte ! Dans ce cas le volume a miraculeusement été préservé, mais c'est vraiment un miracle ! il était dit que ce volume ne serait pas endommagé, parce que toutes les conditions étaient réunies pour que ce petit volume finisse pulvérisé dans sa simple enveloppe kraft souple sans aucune protection. Il ne servira à rien de désigner nommément ce vendeur sans aucun scrupule vis à vis des beaux livres, ceux qui cherchent un peu le reconnaitront facilement en voyant le livre que je vous montre en photographie ci-dessus. Espérons simplement qu'un excès de remords lui fasse changer sa manière de faire... rien n'est moins sûr !


Voilà, voilà comment mes nerfs sont parfois mis à rude épreuve en matière de librairie ! Mais mon témoignage serait injuste si je ne disais que d'autres libraires prennent un soin tout spécial à ce que les livres soient emballés de la plus sûre façon. Un des gros colis que je déballai le soir en rentrant était de ceux-là. Et c'est heureux... De multiples couches de plastiques à bulles pour emballer un volume, le tout replacé dans un carton plus grand, bien solide, l'ensemble bien calé, bien ajusté. Certains (une majorité) connaissent leur métier et surtout ont du respect pour les livres qui vendent ! C'est heureux !

Vos réactions m'intéressent ! Suis-je le seul à m'insurger contre ces pratiques douteuses de vendeurs sans scrupules et surtout sans aucun égard par rapport aux livres qu'ils expédient ? Ai-je tort de m'énerver ainsi lorsque je défend qu'un livre est un morceau d'histoire, un objet qui a souvent traversé des siècles sans encombres et qui doit être choyé et préservé ? Suis-je trop radical ?

On pourrait étendre le débat ou la question à ces libraires qui désormais, par facilité, de peur de se tromper ou par négligence, indiquent "plein cuir" ou "demi-cuir" sans plus jamais préciser s'il s'agit de basane, de veau, de chagrin ou de maroquin ?!! J'en reste parfois complètement ébahi. Je me dis que le métier de libraire est en train de partir en vrille... que pourtant dans ces libraires il y en a qui ont leur carte de membre du SLAM qui normalement garantit déontologie et professionnalisme... Je ne sais plus alors à quoi ni à qui il faut se vouer. Et dans ce cas je me dis que ce qui me guide moi ne doit guère être loin du bon chemin : la passion des livres !

A bons entendeurs,
A bons lecteurs,
A bons commentateurs

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

lundi 10 janvier 2011

Tristan, 3kgs et 50 cm pour une édition originale rare parue le 8 janvier 2011 à 2h05. Exemplaire unique !



Le nouveau Bibliophile Gaulois c'est lui !
Édition originale parue le samedi 8 janvier 2011 à 2h05
Exemplaire unique !


Le Bibliomane moderne revient très vite avec de nouveaux articles,

Bonne nuit...
Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 6 janvier 2011

Connaissance de la reliure par l'image : Une reliure en daim sur une impression parisienne de 1574.




Quelques mots seulement. Tout est dans les images ce soir. Voici une reliure sobre, on pourrait dire fruste. Il s'agit d'une reliure en daim sur une impression parisienne de la fin du XVIe siècle, 1574 pour être précis. Ce type de reliure est aujourd'hui assez difficile à rencontrer en bon état, de par sa fragilité évidente lorsqu'on l'a en mains. Et pourtant il arrive comme ici d'en voir quelques unes qui ont réussi à traverser les siècles sans trop d'encombres. Quelques petits trous de vers sans gravité, quelques taches. Le titre au dos se trouve ici à l'état de lambeaux, anciennement écrit à la plume sur un morceau de papier collé. On voit clairement que la couture des cahiers sur nerfs s'est faite sur quatre nerfs, deux nerfs en haut du dos, rapprochés, et deux nerfs en bas du dos, rapprochés également. A noter que deux nerfs (les plus au centre du dos) sont plus apparents et plus saillants. On distingue l'emplacement des lacets (en daim également), qui ont ici disparu. La doublure à l'intérieur des plats et la garde blanche (formée par un seul feuillet plié) est de papier blanc tout à fait ordinaire. On notera la présence de tranchefiles, ici de couleurs unie, ton beige. L'ouvrage est complet mais les cahiers sont tous plus ou moins partiellement déboités ou mal alignés. Le temps a fait son œuvre... Le papier a subi quelques outrages (taches grasses en marge et débordant sur le texte sur une bonne partie de l'ouvrage), sans endommager l'intégrité physique (solidité) de ce dernier cependant. Voilà pour la présentation et le diagnostic du malade.


Cette reliure est la première reliure qu'a reçu l'ouvrage comme en témoigne des notes et des cotes sur les gardes blanches, d'une écriture totalement encore de la fin du XVIe siècle. Le volume est de format in-8 (env. 17 x 11 cm).


Au delà de l'aspect esthétique de cette reliure, ce volume pose une véritable question fondamentale à tous les bibliophiles (normalement) : Un volume ancien peut-il être dignement conservé par un bibliophile malgré des imperfections notoires du support, ici en l'occurrence le papier ? Sachant que l'ouvrage est bien complet de tous ses feuillets, que la reliure est intègre et d'époque, que l'ouvrage est un ouvrage qu'on peut sans hésiter qualifier de rare voire très rare. Je crois qu'il faut sans hésiter répondre : oui ! deux fois oui ! peut-être même trois fois oui !


Dans le cas qui nous intéresse, voici de quel ouvrage il s'agit : Histoire de Barlaam et de Iosaphat roy des Indes, composée par Sainct Iean Damascene, et traduicte par F. Iean de Billy, prieur de la Chartreuse de Nostre-Dame de bonne Espérance, près le Chasteau de Gaillon. Ouvrage publié à Paris par Guillaume Chaudière, libraire installé rue Saint Jacques, à l'enseigne du Temps & de l'Homme sauvage, en 1574. L'épître à Monseigneur le Cardinal de Bourbon est datée du 28 juillet 1574. L'extrait du privilège qu'on trouve à la fin du volume indique la date du 12 septembre 1574. C'est la première année du règne d'Henri III. Au verso du feuillet de privilège et dernier feuillet il y a la marque de Guillaume Chaudière. Je ne ferai pas ici l'éloge de cet ouvrage rare...

Voilà donc pour cette évocation, ce livre a vécu mais il est charmant. D'ailleurs il me charme fort, son toucher est délicat, le daim, à l'aspect velouté, apporte une chaleur et une douceur particulière à ce type de reliure qu'on pourrait croire faite pour recevoir un incunable ! Étonnant non ?

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 5 janvier 2011

Un ex libris gravé à l'eau-forte vers 1880 et monogrammé AS.


Le Bibliomane moderne fait appel à vous pour tenter d'identifier ce joli ex libris :



L'eau forte n'est pas signée, la vignette mesure 61 x 50 mm et est collée au contre plat d'une belle demi-reliure à coins signée Victor Champs, sans doute exécutée autour des années 1880. Elle recouvre une belle EO de Victor Hugo, Les chants du crépuscule (Paris, Renduel, 1835).

Avis aux connaisseurs d'ex libris de cette époque...

Merci d'avance de votre aide,

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

lundi 3 janvier 2011

Courrier des lecteurs : L'EO du Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes (1755) en questions.



Le Bibliomane moderne vous transmet le courrier suivant qu'il vient de recevoir d'un fidèle lecteur :

"Bonsoir à toutes et à tous,

Puis-je vous poser une question ?

J’ai acheté le mois dernier un livre décrit comme suit :

« 41 - ROUSSEAU Jean-Jacques - Discours sur l’origine et les Fondemens de l’Inégalité parmi les Hommes. Amsterdam, Marc-Michel Rey 1755, in-8° de lxx- 1f.- 262 pp.- 1f. Édition originale, avec les caractéristiques décrites par Dufour (I-55) : Le frontispice gravé en taille-douce par D. Sornique d’après C. Eisen, la vignette sur le titre gravée par S. Fokke et la vignette en tête de la dédicace gravée par S. Fokke d’après P. Soubeyran signées. La dédicace est signée «Jean-Jacques Rousseau » et la page 262 commence par « cune différence des méchans» Cet exemplaire est bien complet du feuillet d’errata et de l’avis au relieur pour le placement des trois cartons en fin de volume. Le frontispice a été placé face à la page 259, où il y est fait référence. Rel. post. (milieu XIXe) à la Bradel, demi-basane verte, dos lisse orné, petites usures. »


En faisant quelques recherches pour vérifier si j’avais bien l’E.O. ( il y a eu plusieurs contrefaçons cette même année), je trouve des descriptions comme celle-ci :

« Édition originale conforme à la description de Dufour [N° 55 de sa bibliographie]. A savoir : frontispice d'après Eisen gravé par Sornique ; titre en rouge et noir ; la vignette de titre est signée Fokke ; Armoiries de la ville de genève gravées et non pas imprimées ; page LII de la préface signée « Jean Jaques » sans le [c] ; les 3 cartons ; l'accent aigu ajouté à la main par l'éditeur en page 11. Notre exemplaire est bien complet du feuillet d'errata et d'Avis au relieur en fin de volume, ce qui n'est pas toujours le cas. Dans le Discours sur l'origine de l'inégalité, Jean-Jacques Rousseau présente pour la première fois sa vision complète de l'homme et du monde. Ce livre, qui raconte l'émergence de l'humanité, apporte une contribution décisive à l'esprit des Lumières. »


Ou celle-là :

« Édition originale, avec la correction "à la plume", p. 11, faite par l'imprimeur et les 3 cartons aux pp. LXVII-LXVIII, 111-112 et 139-140, tout à fait conforme à la description de Tchcémerzine (X,32) »


Mon exemplaire a bien l’accent page 11 et le Jaque sans ‘c’, mais n’a rien de particulier aux pages LXVII-LXVIII, 111-112 et 139-140. Pourtant l’avis au relieur précise : « les trois cartons attachés à cette demi-feuille doivent être placé proprement aux pages indiquées ».

Du coup, je me demande ce qu’il faut comprendre par 3 cartons, je pensais y trouver des gravures, mais il y a rien sinon le frontispice d’Eisen, placé à la fin.

Si vous avez une idée ….

Bonne soirée,
M.T.

dimanche 2 janvier 2011

Saugrain, sixième libraire de ce nom de père en fils depuis 1518. Une histoire de famille à faire...



Dernièrement j'ai acheté une petite eau-forte gravée par Fiquet. Elle date du milieu du XVIIIe siècle, je ne sais d'ailleurs pas encore de quel ouvrage est elle extraite. Il s'agit du portrait en médaillon de Saugrain, libraire, sixième de ce nom de père en fils depuis 1518, ainsi qu'il est gravé sur la tablette (voir photo).

Une famille de libraires depuis 1518 ! Diantre ! Mais cela devrait intéresser son Textor cette histoire !!





C'est dans Werdet, Histoire du livre en France depuis les temps les plus reculés jusqu'en 1789, que je suis allé chercher quelques informations sur cette prestigieuse lignée de libraires aux origines lyonnaises, mais pas seulement... je lis quelque part "Les Saugrain eux-mêmes étaient une famille d’anciens libraires, venus de Pau avec Henri IV, très honorés dans leur profession, ayant donné des syndics au corps." (Revue des deux mondes, tome 45, année 1863).

Je ne vais pas essayer de faire ici l'historique des Saugrain, il a dû être fait ailleurs déjà. Jean-Paul se fera un plaisir de compléter de manière didactique ces quelques bribes.

Personnellement je n'ai rien trouvé venant confirmer la date de 1518 comme date d'établissement de cette famille dans la corporation des libraires, et vous ?

Je vous laisse faire la suite de cet article en commentaires tout aussi érudits qu'instructifs, c'est la nouvelle philosophie du Bibliomane moderne pour 2011... faire de la bibliophilie participative... (sourire)

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

COPIE DES PREMIÈRES PAGES DU BAUDRIER
IMPRESSIONS DE JEAN SAUGRAIN




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