lundi 31 octobre 2011

Le blog du Bibliomane moderne en quelques chiffres (fin octobre 2011).

A quelques minutes de la fin du mois d'octobre de cette année 2011, voici quelques chiffres de la fréquentation du Bibliomane moderne.



Tout d'abord, après la trêve estivale qui marque toujours une très nette baisse de la fréquentation des blogs en général (la plage, le soleil, etc.), on note une nette reprise de la fréquentation et ce dès septembre dernier, pour arriver à la fin de ce mois à plus de 19.000 pages vues. Ce qui situe ce mois parmi les meilleurs depuis la création du blog en septembre 2008. Les statistiques prises en compte ici ne comptabilisent les visites que depuis mai 2009 d'ailleurs. La courbe générale de la fréquentation fait plaisir et m'incite, une fois de plus, à remercier tout à la fois les lecteurs et lectrices fidèles, mais également ceux qui donnent de leur temps au Bibliomane moderne pour en faire un blog vivant et que j'espère instructif tout en étant abordable au plus grand nombre et varié dans le choix des thèmes abordés. Encore une fois, merci à toutes et à tous.

Le nouveau look du Bibliomane moderne semble plaire. Les retours que j'ai pu en avoir ont été favorables et m'ont encouragé à poursuivre avec quelques nouveautés qui verront bientôt le jour.

Je consacre personnellement environ 1 heure à 2 heures par jour pour faire de ce blog un outil vivant et dynamique pour les bibliophiles, les libraires et les bibliothécaires et mêmes les simples curieux ou curieuses. Ce temps passé ne me coûte pas tant que le résultat est à la hauteur de vos attentes et que je continue de prendre du plaisir à le faire vivre. C'est chose acquise à cette heure. Poursuivons donc l'aventure ensemble !

Je vous laisse regarder la liste des billets les plus lus ainsi que l'origine des connexions au Bibliomane moderne de par le monde.



Sachez que le Bibliomane moderne reste en permanence à la recherche de collaborateurs (et surtout même de collaboratrices... parité oblige...) alors n'hésitez pas et lancez-vous ! Envoyez-moi vos contributions à bertrand.bibliomane@gmail.com

Bonne nuit,
Bertrand Bibliomane moderne

Nouvelle acquisition : un dessin original à la plume avec rehauts de gouache par Paul Gavarni (sans date).

Dessin original à la plume à l'encre de chine
avec rehauts de gouache blanche et argent,

signé "Gavarni" en bas à droite.
Vers 1840 ?


Pour faire suite au billet d'hier concernant l'une des mes dernières acquisitions liées à l’œuvre de Paul Gavarni, dessinateur et lithographe, en voici une seconde, faite presque en même temps que la précédente (les hasards des trouvailles...) mais d'un autre genre, d'une autre technique.

Il s'agit cette fois d'un dessin original exécuté à la plume et à l'encre de chine, avec quelques rehauts de gouache blanche et argent dans les plis de de qui semble être une grande étole jetée sur les épaules d'une frêle damoiselle bien dans le genre de Gavarni. Visage tourné vers la gauche, l'air songeur, voici une lorette qui a l'air bien triste ...

Ce dessin, exécuté sur un papier teinté (et qui a encore foncé avec le temps), mesure 20 x 19 cm environ. A cette heure, je n'ai pas encore réussi à retrouver ce dessin reproduit en gravure sur bois ou refait en lithographie (s'il s'agit d'une esquisse c'est tout à fait possible que ce premier jet ait servi à l'élaboration d'une lithographie plus tard), dans l'oeuvre imprimée de Paul Gavarni. Je poursuis les investigations et vous laisse faire de même de votre côté si cela vous dit. Ce dessin est signé en bas à droite "Gavarni", à l'encre violette (voir photo de détail ci-dessous). Sans autre mention. Il a été contrecollé anciennement sur carton fort sans doute peu de temps après réalisation, ce qui a permis de le préserver. Il n'est plus encadré.

Signature "Gavarni". Détail.


Je vous laisse en compagnie de cette jeune demoiselle et de son auteur-artiste, champion incontesté du romantiques féminin des années 1830-1850.

Visage d'une lorette songeuse. Détail.


Je vous retrouve ce soir ou demain pour un billet qui sera sobrement intitulé "Chatteries" ...

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

dimanche 30 octobre 2011

Nouvelle acquisition : un dessin original à la mine de plomb par Paul Gavarni (1845).


Dessin original dans son encadrement d'origine
avec passe-partout à bordure dorée.

Si vous lisez régulièrement le Bibliomane moderne, vous savez que je collectionne les dessins ou esquisses dus au talent de Paul Gavarni (1804-1866).

Voici la liste des quelques billets que je lui ai consacré ces dernières années :

Deux très jolies lithographies coloriées et gommées à l'époque de la première main de Paul Gavarni (vers 1830-1835 ?).

Il faut sauver le soldat Gavarni ! Trois lithographies aquarellées à l'époque d'une suite de six sur la jeunesse de Jean-Jacques Rousseau.

Album comique par Gavarni : Les étudiants de Paris. 30 lithographies coloriées et gommées à l'époque (1839-1840).

Douze nouveaux travestissements par Gavarni (1856)

Encore un dessin original signé Paul Gavarni (1804-1866) : Le fumeur de pipe (vers 1840).

Paul Gavarni (1804-1866) n'a pas croqué que des Lorettes ! ... des bouquineurs aussi.

Poursuivons notre aventure en compagnie de Paul Gavarni (1804-1866), avec un nouveau dessin à la mine de plomb fait pour le Diable à Paris (1845).

Un autre dessin original de Paul Gavarni (1804-1866) : La réussite.

Un dessin original non identifié non signé attribuable à Paul Gavarni (1804-1866)

En marge de la bibliophilie : Une lettre autographe de Paul Gavarni qui demande son argent ! (11 décembre 1834).

Deux dessins originaux de Paul Gavarni en questions ou l'Ecole du bibliophile.

Un dessin inédit du poëte par Gavarni pour les Français peints par eux-mêmes (1840).

Voilà qui vous laisse quelques heures de lectures sur les bras !

Dessin original à la mine de plomb par Paul Gavarni
pour le Diable à Paris (Paris, Hetzel, 1845-1846),
série "Les gens de Paris - Parisiens de Paris - 4."

Je viens d'acquérir une nouvelle pièce du puzzle Gavarni : un dessin original réalisé à la mine de plomb et signé G. Il ne me restait plus qu'à retrouver ce dessin traduit en gravure sur bois ou en lithographie (si ce dessin avait été un dessin préparatoire pour une lithographie). Je n'ai pas eu à chercher très longtemps, les deux volumes de planches de mon exemplaire du Diable à Paris (Paris, Hetzel, 1845-1846) et quelques minutes plus tard le dessin était localisé dans la série "Les gens de Paris". Ce dessin a été gravé sur bois par Leblanc pour cet ouvrage. Il s'agit du dessins faisant partie des Parisiens de Paris, planche 4. (voir la photo ci-dessous de la gravure sur bois extraite du Diable à Paris). On distingue quelques variantes dans le cadrage notamment mais l'essentiel y est. Le dessin original mesure 15,5 x 11 cm, taille identique au dessin gravé sur bois. Dessiné sur papier vélin blanc, il a été coupé autour du dessins et mis sous cadre sans doute assez peu de temps après son exécution. Le passe-partout qui l'accompagne étant datable de la fin du XIXe siècle tout au plus.

Gravure sur bois par Leblanc d'après le dessin original de Gavarni.

Si vous avez une explication quant à la légende de ce dessins, je suis preneur. J'avoue ne pas avoir bien compris sa signification.

Les dessins originaux de Gavarni sont légions ! Il en aurait laissé plusieurs milliers, plusieurs centaines rien que pour le Diable à Paris ! Reste à les dénicher lorsqu'ils réapparaissent sur le marché. Je m'y emploie.

Demain je vous montrerai une autre découverte concernant Gavarni.

Bon dimanche,
Bertrand Bibliomane moderne

samedi 29 octobre 2011

Des papiers dominotés du XVIIIe siècle ou Essai de base de données en cours de réalisation. Pour servir de complément à l'ouvrage d'André Jammes.


Papier dominoté utilisé pour le contre-plat et la garde volante.
Impression de Paris, 1748.


Il y a déjà plus d'un an que le livre de André Jammes sur les papiers dominotés est sorti aux Editions des Cendres. Ainsi présenté : "Volumineux ouvrage consacré aux papiers qui, au XVIIIe siècle, recouvraient les livres avant leur passage chez le relieur. Ces éphémères, devenus d’une insigne rareté, témoignent d’un goût inné pour les arts décoratifs. André Jammes présente sur un merveilleux sujet, qui n’a jusqu’à ce jour été l’objet d’aucune monographie, un premier inventaire où sont reproduits au format quelque trois cents papiers aux motifs et couleurs foisonnants, d’une singulière beauté."

Ce livre a obtenu Le "Prix SNA (Syndicat National des Antiquaires)" (2011). 564 p. (25 x 25) ; ISBN: 2-86742-176-1 ; 2010 ; 180 €. Il a été fait un tirage de luxe à 15 exemplaires augmentés d’un papier dominoté original (N. I/XV) : 450 €. Ouvrage relié. Impression couleur sur papier lessebo 150 gr. 350 illustrations au format réalisées à partir des documents originaux. Tirage limité à 999 ex.

Voici l'extrait de la préface d'André Jammes :

"Les images populaires produites au XVIIIe siècle à Chartres, à Orléans, au Mans et dans d’autres centres provinciaux forment un ensemble particulièrement brillant dans le panorama des arts et traditions populaires. Tout le monde connaît La Folie des hommes ou le monde à l’envers, Le Vrai Portrait du Juif errant, l’Histoire de l’enfant prodigue, gravés à grands traits et vivement coloriés au pochoir. Ces images ont été sauvées par des amateurs éclairés ; elles ont fait l’objet d’enquêtes érudites, de publications richement illustrées et d’expositions où les conservateurs de musées et de bibliothèques ont montré tout leur savoir. Les hommes qui produisaient ces images appartenaient à une corporation qui gravait et éditait en même temps des papiers de tenture (tirés feuille à feuille et raboutés en rouleaux) et des papiers dominotés. L’origine du mot est obscure et les domaines de la gravure qu’il recouvre sont mal définis, car les dominotiers gravaient sur leurs planches de bois aussi bien des images pieuses, historiques et allégoriques, que des papiers décoratifs à motifs répétitifs. Ils se mettaient parfois au service des fabricants d’indiennes. Le présent livre conduit à reconnaître que papiers de tenture et dominos se confondent, sinon dans leur conception, au moins dans leur utilisation, mais c’est en général aux feuilles de dessins géométriques ou d’ornements répétés que l’on accorde le nom de “domino”. Les spécialistes de l’imagerie populaire n’ont pas manqué d’évoquer ces dominos, mais il manquait une étude spécifique sur ces feuilles et sur l’emploi qui en a été fait pour orner et préserver les livres à leur parution ; c’est l’objet du présent volume."

Un très beau livre assurément. Très complet. Mais qui hélas n'est pas à la portée de toutes les bourses. J'avais de mon côté fait le projet d'en acquérir un exemplaire, et puis j'ai finalement renoncé. Pourquoi ? Au delà du texte passionnant d'André Jammes (j'ai parcouru le volume au salon du Grand Palais l'an passé sur le stand des Editions des Cendres), je pense que l'intérêt de l'ouvrage réside dans l'aspect catalogue de "papiers dominotés" reproduits au format et en couleurs. Or, je suis convaincu que le nombre de papiers reproduits, fut-il important, ne reflète de fait qu'une infime partie de cette vaste production de papiers décorés. Je pense que la forme "livre" n'est pas forcément la mieux adaptée pour ce genre de documentation qui demande d'être constamment remise à jour avec les nouvelles découvertes. J'ai été dès lors convaincu que la seule forme utile et évolutive serait celle de la base de données. Une base de données qu'il serait utile et instructif autant qu'agréable à l’œil, de mettre à la disposition de toutes et tous, gratuitement. Je suis en train de mettre au point ce lieu de stockage virtuel d'images bien réelles. Je vous en donnerai bientôt la primeur.

En attendant, voici deux papiers dominotés décorés du XVIIIe siècle. Le premier (voir ci-dessus) est un papier qui se trouve avoir été utilisé pour décorer la doublure intérieure et les gardes d'un volume imprimé en France en 1748 (format in-8). Le deuxième (voir ci-dessous) est un papier qui sert de couverture pour une impression d'Arras de 1763, avec cette mention imprimée sur la bordure de la feuille de papier décoratif "CI FAIT ET VEND A ARRAS CHE ...] (la suite n'apparait pas - dommage sinon nous aurions eu le nom du fabricant de papier dominoté à Arras).

Papier dominoté utilisé pour la couverture de brochage.
Impression d'Arras, 1763. Papier fabriqué à Arras.


Par ailleurs je vous invite à lire ou à relire le billet que notre ami Léo a consacré à ces papiers sur son blog ICI.

PS : si vous avez sous les yeux des spécimens de papiers dominotés du XVIIIe siècle, je vous invite à m'envoyer une photographie de celui-ci en précisant sur quel ouvrage il se trouve et ce qu'il recouvre (plats ou gardes). Envoyez à bertrand.bibliomane@gmail.com

Dans un premier temps les exemples de papiers dominotés seront stockés ICI avec une légende explicative.


Album Picasa qui sert dans un premier temps de base de données publiques regroupant des exemples de papiers dominotés du XVIIIe siècle.


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane

vendredi 28 octobre 2011

Séquence émotion : Tristan fait ses premiers pas dans une librairie ancienne dijonnaise.



L'avenir économique de notre pays n'étant pas au mieux de sa forme, il faut se remonter le moral comme on peut en se disant que 1. nos enfants auront un métier agréable 2. ils seront fiers de ce qu'ils feront. 3. l'argent ne sera pas leur principale motivation.

Ainsi j'apprenais hier à Tristan (9 mois) à reconnaitre une reliure en vélin du XVIIe siècle présente sur les rayonnages d'une des principales librairies dijonnaises (pour ne pas dire la seule désormais, la Librairie ancienne Le Meur). Ce faisant il a décidé de faire ses premiers pas (encore très chancelant) dans ce lieu très solennel pour moi.

Il va falloir qu'il réfléchisse très vite à son orientation professionnelle ce petit (sourire).

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 27 octobre 2011

Fiche de libraire : Le Tombeau de Marguerite de Navarre (1551) en maroquin doublé de Capé. Le livre dont on ne saura jamais le prix ...


Doublure de la reliure de Capé décrite au catalogue du libraire


Bon ! Le curiosa c'est bien, mais je ne voudrais pas lasser ... d'autant que j'ai une très bonne nouvelle à vous annoncer, le Vicomte Kouyakov est de retour et vient de m'envoyer son dernier billet fraîchement et abondamment illustré ... billet qui j'en suis certain plaira aux lecteurs et lectrices de tous poils, mais chut ! ...

Donc, plus sérieux ce soir, une fiche de libraire. Montaigne c'est bien aussi (comme les curiosa hein) mais il faut varier les plaisirs bibliopolesques, donc je vous propose de nous pencher ce soir sur un livre non moins prestigieux : Le Tombeau de Marguerite de Navarre. (1551).

D'ici je vois le Textor frétiller .. .. ..... (je n'ose terminer ma phrase tant elle semblerait déplacée en ces temps d'hôtels de luxe plus célèbres pour leurs festivités pour VIP que pour le menu du jour ou le luxe de la literie... tout fout l'camp !) ...

Ronsard ! 1551 ! Maroquin ! ... Ne manque plus que des marges immenses et une belle reliure de l'époque pour que l'attaque apoplectique ne survienne sans crier gare (de l'Est évidemment) !

Bref, voici donc une notice de libraire, sélectionnée de haute lutte et en plein travail (il faut dire que les catalogues de cette librairie se trouvent sur l'étagère du haut du meuble situé juste derrière ... enfin vous voyez ...)

Donc, la voici.

RONSARD, Pierre de. Le Tombeau de Marguerite de Navarre. Faict premièrement en Distiques Latins par les trois soeurs Princesses en Angleterre... Avecques plusieurs Odes, Hymnes, Cantiques, Epitaphes, sur le même subject.

Paris, M. Fézandat, R. Grandjon et V. Sertenas, 1551. In-8 de 144 feuillets non chiffrés. Reliure de maroquin vert doublé de maroquin rouge richement décoré (reliure signée de Capé exécutée au milieu du XIXe siècle).

Raté donc pour la reliure d'époque ! Textor passe son chemin ...

L'exemplaire avait pourtant de quoi faire frétiller. Exemplaire en parfait état (ce qui signifie à l'époque exemplaire probablement lavé et réencollé, laminé, étiré, ... bref, rajeuni et lifté ... mais si c'est bien fait .... pourquoi pas). Le catalogue ce cette librairie parisienne montre la doublure de la reliure uniquement (très jolie).

Je vous laisse lire plus en détails la notice fort bien rédigée par le libraire. Ce livre a été catalogué avant 2002 ... mais nous n'en saurons jamais le prix ... même en francs, car il a été mentionné "vendu" au catalogue.

Cliquez sur l'image pour agrandir et lire le texte


Une belle pièce assurément. Fort coûteuse ou pas ?. Mais comme tout est relatif ... sans doute moins cher qu'une dette grecque à demie effacée ... à voir.

A titre de comparaison et pour étoffer ce billet un peu léger, voici la fiche d'un exemplaire vendu aux enchères en mars 2003 (source auction.fr). Même édition (erreur dans la pagination donnée vraisemblablement). Maroquin doublé de Trautz-Bauzonnet.

Exemplaire Piasa, Paris, 2003

Lire la fiche ci-dessous :

TOMBEAU DE MARGUERITE DE VALOIS ROYNE DE NAVARRE (LE). Faict premierement en disticques latins par les trois sœurs princesses en Angleterre. Paris, Michel Fezandat et Robert Granjon, 1551 ; in-8 de [104] ff., reliure janséniste du Second Empire maroquin bleu nuit, dos à nerfs, dentelle intérieure dorée avec fleurs de lis aux angles, doublures de même maroquin orné d'une large dentelle dorée, tranches dorées sur marbrure (Trautz-Bauzonnet).

Édition originale de ce rare et curieux "tumulus", composé à la mort de Marguerite de Valois. Le titre porte la marque "à la vipère" utilisée par l'imprimeur Michel Fezandat pendant son association avec Robert Granjon ; au verso se trouve le portrait de Marguerite de Valois, âgée de 52 ans, gravé sur bois. Le recueil se compose des vers des princesses Anne, Marguerite et Jeanne de Seymour, suivis de leurs traductions grecque, italienne et de deux traductions françaises par J.P. de Mesme, Joachim du Bellay, Antoinette de Loynes et Jean-Antoine de Baïf. Ces mêmes auteurs, ainsi que Ronsard, Scévole de Sainte-Marthe, etc., ont composé des poèmes personnels pour cette œuvre publiée par Nicolas Denisot, dit comte d'Alsinois. Cette édition contient plusieurs distiques changés dans la seconde.

Très bel exemplaire dans une reliure doublée et dorée à petits fers signée de Trautz-Bauzonnet.

De la bibliothèque du baron de La Roche-Lacarelle, l'un des plus pres- tigieux bibliophiles du XIXe siècle (cat., Paris, 1888, n° 188), avec ex-libris.

estimé 2 000/3 000 € - adjugé 5.000 euros

Vente Piasa Paris du 12 mars 2003, lot n° 132.


Pas si cher que cela en fait !

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 26 octobre 2011

Quelques illustrations érotiques. Une belle vente de curiosa, mais laquelle ?



Le mois d'août est bien loin déjà, l'automne est bel et bien là, moins gai. Il faut égayer les jours qui s'annoncent plus tristes que les précédents (je parle de météorologie... par d'économie mondiale).

Je vous laisse donc réfléchir à l'énigme du billet précédent en compagnie de quelques illustrations coquines toutes issues d'une vente de livres du genre, l'une des plus belles ventes sur ce thème de ces dernières années. Mais laquelle ? Vous souvenez-vous de cette vente aux enchères ? Avez-vous participé à cette vente ? Quels ont été vos achats ?

Je vous laisse en bonne compagnie.










Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

lundi 24 octobre 2011

Quel auteur Quel titre ? Quelle date d’édition ? Une impression rare d’un écrit tout aussi rare dans le style ordurier comme disent les bibliographes.


Gravure illustrative ...
mais qui n'a rien à voir ni de près ni de loin avec l'ouvrage en question ...



Pièce de théâtre en quatre actes et en vers libres (c’est le cas de le dire…) Un auteur faussement cité dans le texte. Un auteur présumé coupable. Un véritable auteur cité par les bibliographes. Un texte très obscène, « ordurier » disent même les pudibonds bibliographes du XIXe siècle.

Voici quelques passages pour vous faire une idée de l’ouvrage en question (*).


La Comtesse s’étendant dans son lit en s’éveillant.

Ah ! que je fout… bien maintenant quater coups !
Et que j’ay dans mon lict du plaisir à m’estendre.



La Comtesse.

Non, laisse moy, de grace, encore un peu resuer,
Il n’est rien de si doux quand on est éveillée.
Que de goûter un peu la chaleur de son lit.
Et d’y promener son esprit.
Sur mille objects divers, dont l’ame est chatouillée.
Du moins l’on y contente a demy son desir.
Et pour moy souvent de plaisir
Je m’en trouve toute mouillée.
Ouy, je voudrais bien, tant j’ayme le deduit
Que chaque doigt de l’homme eust pris forme de vit.
Et qu’au lieu du bas ventre, ou nos cons sont sans grace.
La paulme de la main fust desormais leur place,
En tout temps, en tout lieu, lors fort commodement.
Nous aurions toujours nostre contentement
Qui finissant d’ailleurs aussi tost qu’il commence,
Auroit en fin par là, plus longue subsistance
Un doigt relevant l’autre, il ne se vertoit pas.
Que ces vigoreux vits devinssent jamais las.
Car enfin c’est par moy chose trop avorée,
Que le deduit ancien a trop peu de durée.



La Comtesse.

Enfin, mon cher Cousin, je te tiens en mes bras
Et puis enfin jouir du sujet de ma flame,
Embraise moi, fou.. moy, coule toy dans mes draps,
Que je te baisse ! ah ! je me pasme !
Vistes, les chausses bas, ne perdons point de temps,
Est il roide mon cœur, ouy mets le moy dedans,
Et sans qu’il flechisse ou deconne,
J’en attends d’abor 4. Coups
Pour le retour si Cupidon l’ordonne,
Vienne quand il pourra, me sera toujours doux,
Je tressaille d’espoir d’estre bien chatouillée
Tost, qu’en deux coups de cul ma fesse soit mouillée,
Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! mon cœur, tost disje a gros bouillons
Arrose moy le Con d’essence de Couillons,
Et qu’ainsy de ton fait ma matrice feconde
Puisse d’un beau Poupon enfin peupler le monde :

Mais o Dieu ! je sens ton vit plat !



Le Comte.

(…) Je Passe pour un Galand Homme,
Quoy qu’on me puisse reprocher,
S’il se trouvoit quelqu’un qui pust mieux chevaucher, (…)
De douze coups autant de fois,
Sçachez que je les ay foutues, (…)
Qui sont les plus aspres fouteuses
Qui vescurent jamais sous l’empire du Vit, (…)
Et d’autres fouteuses encore,
Qui veulent tous les jours qu’on les foute a Gogo.
Sans Compter vingt putains Fameuses,
Qui, si l’on ne les fout tres vigoureusement
Vont raillans malheureusement
Avec leur langues venimeuses,
Peuvent suffire a faire foy,
Qu’il n’est pas dans le monde un fouteur comme moy, (…)
Que je bande toujours d’une roideur extrême :
Car cent fois, par-dessus mon habit
Ses deux pudiques mains ont manjé mon Vit.



La Comtesse.

Ah ! certe en voila beaucoup dire

Et cela n’est plus surprenant
Que voys ayez le Vit rempant
Il faudroit qu’il fust bon pour y pouvoir suffire,
Apres en avoir foutu tant.



Le Comte.

Arresté la, de grace, & ne passez pas outre,
Mon vit ne fut jamais de ces vits languissants
Que les coups redoublez peuvent rendre impuissants.
Plus il fout, plus il veut foutre. (…)

...

La Comtesse.

(…) Ces excez ont beacoup d’appas,
Et peuvent, je le croy, charmer une maistresse,
Mais quand certaine rage presse,
Le Con ne se contente pas.

...

Le Comte.

Appaisez vous, je sens mon vit qui se redresse (…)
...

La Comtesse.

(…) Moy que sans deconner on fout 3. coups de suitte. (…)

...

Le Comte (un autre).

Je sçay ce que l’on dit, d’un homme qui souffre,
Sa femme a ses yeux foutre. (…)

...

Le Comte (un autre).

Vostre con est mouillée madame.

...

La Comtesse.

C’est que c’est déjà fait.
Ah ! Ah ! Ah ! j’ay fait, que tu m’en as Coulés !
Ton sperme a gros bouillons m’a ma foy toute esmue. (…)
Qu’il revienne tantost, Car ma foy je m’engage
Qu’aujourdhuy je foutray à double & triple Estage. (…)

...

L’Abbé.

Moy ? j’en foutrais bien trois
Car le foutre en mes reins croupit depuis un mois.
Prenons cette foutée
Tout de bout à la derobée (…)

...

La Comtesse.

J’apprehende ton vit car la derniere fois que tu me le fis,
Tu m’escochas dessous la motte. (…)
Ah ! depeche leve la Cotte
Ton vit est déjà tout en feu. (…)


Voilà, je vais m’arrêter là. Vous en savez assez. Trop peut-être même (sourire).

Comme dirait un amateur-moderne bien au fait de la gaudriole es damoiselles :

« Les caprices de la chair n’ont que bien peu à voir avec les choses de l’esprit. »

Alors ? Cet ouvrage … ça vous parle ? (sourire)
A vos méninges,

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

(*) j'ai conservé ici scrupuleusement l’orthographe telle qu'elle est imprimée, ainsi que les fautes d'orthographes évidentes.

Deux petites brèves à propos de deux ouvrages publiés par Octave Uzanne à la fin du XIXe siècle.



Octave Uzanne est de retour ! J'en apprends tous les jours sur cet homme complexe et son oeuvre qui ne l'est pas moins.

Aujourd'hui je partage avec vous deux petites choses découvertes récemment.


Premier plat de la chemise de protection.
Broderie en encadrement et impression sur soie.



La première est un exemplaire de "La femme à Paris, nos contemporaines" (Pairs, Ancienne Maison Quantin, 1894), ouvrage magnifiquement illustré par Pierre Vidal. Cet ouvrage tiré à petit nombre sur papier vélin teinté satiné filigrané de fleurs (et dont il a été tiré 110 exemplaires sur papier du Japon) est orné d'une très jolie couverture dessinée par Léon Rudnicki dans le plus pur style Art Nouveau alors en vogue (voir photo). L'exemplaire que j'ai en mains est de ce tirage à petit nombre mais possède en plus sa jolie couverture de protection recouverte de soie décorée et avec lacets. Je n'avais à ce jour jamais rencontré cette couverture ou chemise décorée. Une photographie valant mieux qu'un long discours je vous laisse admirer le décor brodé du premier plat avec au centre imprimé en bistre, une variante de la vignette de titre de l'ouvrage, par Pierre Vidal, ainsi que le titre imprimé également en bistre.


Second plat de la chemise de protection et dos.
Impressions sur soir, or et à froid.


Je trouve cette broderie en encadrement d'une beauté remarquable. Malgré quelques usures de la soie beige (soie de fond), des bords effilochés, des lacets cassés par endroit, cette chemise est un document bibliophilique fragile et rare. Existe-t-il des variantes de cette chemise pour cette édition ? Sans aucun doute (Uzanne aimait les variantes et les essais...). Je joins ci-dessous la photographie du second plat et du dos de cette chemise. Si vous possédez un exemplaire de cette chemise ou une variante, je suis bien évidemment intéressé et publierai ici même les photographies que vous voudrez bien m'envoyer à bertrand.bibliomane@gmail.com



L'autre brève concerne un bel envoi d'Octave Uzanne à son ami et collège Angelo Mariani sur un exemplaire de "La femme et la mode, métamorphoses de la parisienne de 1792 à 1892" (Paris, Ancienne Maison Quantin, 1893). L'envoi est écrit au crayon de couleurs bleu. L'exemplaire n'est pas des moindres puisqu'il s'agit d'un des très rares exemplaires sur papier de Chine (20 exemplaires), le plus petit tirage pour ce beau livre avec 25 ex. sur Japon et 955 ex. sur vélin. Cet exemplaire de luxe contient le très joli frontispice de Félicien Rops en deux états, en couleurs et en noir. Angelo Mariani est très connu à la fin du XIXe siècle pour sa boisson tonique à la "coca du Pérou". Le "vin Mariani", mis au point dès 1863, est l'ancêtre (alcoolisé) de la célèbre boisson gazeuse américaine (depuis 1887) ... A la fin du XIXe siècle, tous les auteurs en vogue de l'époque furent des supports publicitaires dans les Albums Mariani (sorte de Digest des meilleurs auteurs, acteurs et artistes de l'époque avec notices biographiques et portraits gravés). Ces albums sont une véritable mine d'informations. Angelo Mariani et O. U. étaient amis, collègues en journalisme aussi par certains côtés. Joseph Uzanne, le frère d'Octave, préfaçait d'ailleurs ces albums et rédigeait les notices biographiques. Octave Uzanne publia "La panacée du Capitaine Hauteroche" dans un livre intitulé "Cinq contes à Mariani" (Paris, Librairie Henry Floury, 3 janvier 1900). Cet ouvrage est ainsi dédicacé sous le faux-titre : "Pour mon vieil et excellent ami Angelo Mariani digne compatriote du corse Napoléon."

Je vous parlerai bientôt d'une autre découverte concernant Octave Uzanne et son oeuvre.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

samedi 22 octobre 2011

Les Essais de Montaigne (1595) en reliure ancienne de maroquin attribuée à Le Gascon (estimation 80.000 / 120.000 euros)



Si vous voulez un beau Montaigne, qui plus est dans l'édition de 1595 "la meilleure des bonnes" (NDLR : et non je vous jure qu'il n'y a aucune allusion salace à quelques pratiques de fond monétaires internationales...), élégamment relié en beau maroquin "attribué à Le Gascon" ... alors il vous faudra compter et recompter vos économies à hauteur des 80.000 / 120.000 euros estimés. Et je gage que ces estimations risquent fort d'être largement dépassées. Pourquoi ?

Cet exemplaire est un exemplaire qui cumule les bons points. Édition reconnue prestigieuse et toujours recherchée comme on l'a vu dernièrement ici même (voir ICI). Une reliure de grand luxe attribuée à l'un des plus grands noms de la première moitié du XVIIe siècle (donc exemplaire relié très peu de temps après l'impression de l'ouvrage). Enfin, un état de conservation pratiquement irréprochable avec de minimes restaurations signalées et fort bien exécutées semble-t-il.

D'après la notice il s'agirait du seul exemplaire en maroquin ancien encore en mains privées (jusqu'à ce qu'on en découvre un autre...). Exemplaire provenant d'une ancienne collection suisse, jamais répertorié (autrement dit il n'a jamais été catalogué chez aucun libraire et n'a jusqu'au 9 novembre 2011 jamais été présenté aux enchères). Bref, une rareté !

Cet exemplaire sera vendu parmi une pleiade d'autres beaux ouvrages lors de la vente de livres du 9 novembre chez Sotheby's Paris (voir le catalogue de la vente ICI).



Pour ma part je me contenterai de conserver l'image cet exemplaire dans ma mémoire faillible mais assez exercée pour pouvoir le retrouver un jour prochain, si d'aventures il tombe à nouveau sous mon regard ahuri par tant de beauté et de rareté.

Je vous laisse faire vos comptes ! Voici encore quelques photos extraites du site internet de Sotheby's Paris (site très bien fait et qui permet de zoomer sur les photos comme si on y était... c'est toujours ça !)













Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 20 octobre 2011

Le relieur de Salel : reliures décorées du milieu du XVIe siècle.


Reliure du manuscrit de Démosthène (1546) par le « relieur de Salel » (conservé à la BNF, tiré de M. P. Laffitte 2001)


Textor nous a montré de belles éditions, des textes et des marges immenses ; je m’attacherai modestement à l’apparence extérieure en vous présentant, pour ceux qui ne le connaissent pas encore, le relieur de Salel.

Reliure du » relieur de Salel « sur Pline le Jeune (Alde, Venise, 1518) (conservé à la British Library)


Hugues Salel (1504-1553), valet de chambre puis maître d’Hôtel de François Ier est passé à la postérité pour avoir traduit, à la demande de son souverain, les dix premiers livres de l’Iliade d’Homère en Français, seconde traduction après celle donnée par Samxon en 1530. Cette édition, parue en 1545 chez Vincent Sertenas est réputée pour la beauté des ses illustrations et de sa typographie.

Salel offrit, comme il se doit, sa traduction à François Ier, faisant relier séparément et différemment chacun des dix livres. Un atelier en connexion avec celui d’Etienne Roffet, alors relieur du roi, se chargea de ce travail et plusieurs de ces précieux volumes sont encore conservés dans les collections publiques françaises. Cet atelier actif à Paris entre 1540 et 1545 environ a travaillé pour des amateurs restés anonymes , mais également pour le roi et le connétable Anne de Montmorency.

M. T. Ciceronis Epistolae ad Atticum, Brutum, et Q. fratrem.
Ex diversorum exemplarium, praecipuè Victorii ac Manutii, collatione diligentissima castigatae. T. Pomponij Attici vita
784[-46] p. (sig. a-z, A-Z, aa-ff8,)
Maroquin noir, dos à cinq nerfs, tranchefiles vertes, coupes filetées, tranches dorées. Décor de rubans entrelacés et de rinceaux tracés au filet et agrémentés de fers.


Ses reliures, caractérisées par l’utilisation de maroquins sombres et de plaques proches de celles d’Etienne Roffet, utilisent également différents fers assez caractéristiques.

Je partage avec vous ce soir une acquisition récente : deux volumes des œuvres de Cicéron dans une édition donnée par S. Gryphe en 1546 : les lettres à Atticus et les lettres familières. Ces deux ouvrages présentent des décors distincts, l’un utilisant une plaque que l’on retrouve sur une édition aldine de Pline le jeune (1518) et la seconde comporte un décor au filet intégrant plusieurs fers que l’on retrouve notamment sur une traduction manuscrite de Démosthène, également de 1546, conservée à la BN (ms français 25394).

M. T. Cic. Epistolarum, ut vocant, familiarium libri XVI. Denuo collatison paucis venerandae fidei exemplaribus, quàm accuratissimè castigati.
619[-5bl] p. (sig. a-z, A-Q8)
Maroquin noir, dos à cinq nerfs, tranchefiles vertes, coupes filetées, tranches dorées. Le décor est composé d’une plaque dorée centrale. Les écoinçons mêlant fers vides et filest sont remplis de pointillés.


Les reliures des Cicéron n’étaient pas destinées au roi et leur premier propriétaire demeurera vraisemblablement anonyme ; les seules indications consistent en une mention d’appartenance manuscrite du XVIIe s. Une cote de bibliothèque des XVIIe-XVIIIe s. au contreplat supérieur indique « R21n°418 » sur un volume et « R21n°421 » sur le second, indiquant implicitement l’existence d’autres volumes (cette édition compte 10 volumes), peut-être reliés de façon similaire. Ah les dépareillés, quelle plaie …

Les entre-nerfs sont ornés de fers à motif d’arabesques que l’on retrouve également sur des reliures de dédicace offertes au roi ou au connétable de Montmorency. Comme on le remarque, ces reliures sont non restaurées …


Voir notamment Marie-Pierre Laffitte : Reliures royales (1515-1559), BNF 2001 et Marie-Pierre Laffitte et Fabienne Le Bars, Reliures royales de la Renaissance. La librairie de Fontainebleau, 1544-1570, BNF, 1999.

Bonne soirée,
Philippem pour le Bibliomane moderne

mardi 18 octobre 2011

Grand de marges !

S’il est un sujet sur lequel libraires et bibliophiles s’accordent volontiers, c’est bien celui de la marge : il faut qu’elle soit importante pour l’un comme pour l’autre !

Bertrand m’a fait souvent remarquer que certains des ouvrages que je présente à vos yeux ébahis ont de grandes marges, au point qu’il n’y a souvent plus beaucoup de place pour le texte au milieu. C’est vrai, j’aime bien ! Et peu importe si le texte semble un peu perdu sur une page trop grande pour lui ! Le facétieux propriétaire de l’Amour qui Bouquine avait même conclu que si je pouvais trouver un ouvrage dont toutes les pages seraient entièrement blanches, j’aurais atteint le Nirvana de la bibliophilie ! Je pense qu’il avait raison.

Fig 1. Impression de Leipsig, Jacob Thanner, 1507. Ici la marge a une fonction, celle de cahier d’écolier.


Serais-je un marginal ? un marginal obsessionnel, j’entends. Peut-être ... Pourtant ce goût pour la partie non imprimée de la page ne date pas d’hier. J’ai trouvé chez Richard de Bury un tropisme similaire : « Il y a aussi des jeunes gens impudents auxquels on devrait défendre spécialement de toucher aux livres, et qui, lorsqu’ils ont appris à faire des lettres ornées, commencent vite à devenir les glossateurs des magnifiques volumes que l’on veut bien leur communiquer, et où se voyait autrefois une grande marge autour du texte on aperçoit un monstrueux alphabet ou tout autre frivolité qui se présente à leur imagination et que leur pinceau cynique a la hardiesse de reproduire... » (Philobiblon. Tractatus pulcherrimus de amore librorum, vers 1345)

C’est vrai qu’un livre aux marges peintes n’est pas très zen, et d’ailleurs, j’ai tout simplement refusé d’enchérir sur ce livre d’heures à l’usage de Limoges, de l’école de Fouquet : marges trop encombrées ...

Mais, au fait, c’est quoi une grande marge ?

Fig 2. Domenget. Faits et observations sur les eaux de Challes en Savoie, Puthod,1845 ; Un in-octavo de 29x23 cm !


Un éditeur du XVIIIe siècle, Jean-Michel Briolo, avait semble-t-il une idée sur la question et il s’en est ouvert à ses lecteurs : « Des personnes m’ont fait des reproches d’avoir employé pour le premier volume un papier trop long. Je conviens que ce volume relié en carton ne se présente pas si bien à la vue ... »

A peine quelques années plus tard Massicot et Guillotin allaient devenir à la mode.

J.M. Briolo ajoute : « C’est le relieur qui doit régler la marge avec une équitable proportion et enlever ce pouce de marge qu’il y a en trop au pied de la page. »

Et notre éditeur de trancher une bonne fois la question en donnant la dimension de la marge idéale : « Elévation au dessus de la première ligne : ______ Marge du devant ______ Abaissement au dessous de la dernière ligne ______. » Mais, malheureusement pour moi, dans une suprême coquetterie, cet éditeur n’a pas imprimé la réponse. J’imagine qu’il réservait son secret à quelques initiés et mon exemplaire n’est pas passé par ce client-là ...

Fig 3. Guichenon, Histoire généalogique de la royale Maison de Savoie, 1780. Avis de l'éditeur.


Il ne me reste plus qu’à lancer le grand sondage de l’Automne : à partir de quelle largeur en pouce attribuez-vous le qualificatif « Grand de marges » à vos ouvrages.
Vous avez quatre heures !

Bonne journée,
Textor

dimanche 16 octobre 2011

Bibliophilie de circonstance : les temps changent ... les idées aussi !



Quand j'étais au lycée on se plaisait à écrire sur nos tables : "le communisme c'est l'exploitation de l'homme par l'homme, le capitalisme c'est exactement le contraire !" 25 ans plus tard la sentence reste d'actualité. Entre une Chine, qui propage urbi et orbi un communisme-capitaliste basé sur une économie liée à l''exploitation des masses, et des USA (et les vieux pays européens) qui s’aperçoivent qu'il faut mettre une pincée de social-communisme dans leur capitalisme débridé s'ils veulent conserver le contrôle de la Bête ... le monde va un peu de travers ...

Une part non négligeable des ouvrages que je conserve est composée des ouvrages rédigés entre le XVIIe et le XIXe siècle (début du XXe s.) par les réformateurs sociaux, connus, méconnus ou oubliés. Vous avez déjà pu lire ici quelques billets consacrés à Kropotkine et Bakounine (partisans d'une réforme Ultra à la limite de la ligne jaune), d'autres tels Proudhon, Fourier ou Cabet, utopistes dont les écrits fournissent encore aujourd'hui des pistes non négligeables. Quoi qu'il en soit, composer une bibliothèque autour de ce thème est un plaisir de lecture qui réconcilie le bibliophile avec le livre qu'on lit ! En effet, au delà de l'aspect matériel, ces volumes, souvent modestes, rarement bien imprimés, invitent à se concentrer sur le fondement : le texte. Mon instinct de chasseur-bibliophile m'invite pourtant le plus souvent à rechercher des exemplaires en belle condition, bien reliés lorsque cela se présente et sur grand papier lorsqu'il en existe.


Je vous propose ce matin de lire une double page sortie de l'intelligence de Benoît Malon (*). Lundis socialistes I. Précis historique, théorique et pratique de socialisme par B. Malon. I. Le socialisme dans le passé. II. Le socialisme idéaliste. III. Les socialistes de transition. IV. Le socialisme réaliste. V. Le collectivisme moderne. VI. Les réformes sociales urgentes. VII. Perspectives.


C'est un volume de format in-8 (20 x 15 cm) de (6)-XI-352-(6) pages, broché, sous couverture de papier fort rose (déjà...). Publié à Paris chez Félix Alcan et à la Librairie de la Revue Socialiste, en 1892. On trouve à la fin un catalogue de 6 pages de la "Revue socialiste", revue fondée et dirigée par Benoît Malon. Ce volume sort des presses de E. Arrault et Cie à Tours. Il a été imprimé 100 exemplaires sur papier de Hollande. Celui-ci en fait partie. Il a été ajouté (volant) à l'exemplaire un portrait de l'auteur en héliogravure (voir photo ci-dessous).


Au delà de toutes considérations politiques personnelles, la lecture de ce livre est vraiment passionnante. Malon trace avec verve un historique précis du mouvement socialiste et donne pour l'avenir les clés pour parvenir à l'éradication de la "servitude capitaliste". Beau programme ...

Je vous incite à lire cet ouvrage s'il vous passe par les mains.

Bon dimanche,
Bertrand Bibliomane moderne


(*) Benoît Malon est un militant ouvrier, communard, journaliste et écrivain, né le 23 juin 1841 à Précieux (Loire), et mort à Asnières-sur-Seine le 13 septembre 1893, inhumé au cimetière du Père-Lachaise (division 77). Fils de paysans pauvres, il avait le goût de l'étude : bon élève à l'école communale de Précieux, mais orphelin de père, il dut se placer comme ouvrier agricole dans l'Ain. Malade, il revint en Forez et fut recueilli par son frère Jean Malon, instituteur, et bénéficia pendant deux ans de ses leçons ; puis il fut élève à Lyon d'une école cléricale qui préparait au petit séminaire. Cette formation explique comment il put devenir ensuite journaliste et écrivain. Ayant perdu la foi, Benoît Malon renonça à entrer au séminaire, gagna Paris en 1863 et trouva un emploi d'ouvrier teinturier dans une usine de Puteaux. Zéphyrin Camélinat le fit adhérer en 1865 à l'Association internationale des travailleurs (AIT). En 1866, à Puteaux, Malon organisa la grève des ouvriers teinturiers et fonda une coopérative de consommation. Devenu avec son ami Eugène Varlin, l'un des dirigeants de la section française de l'Association internationale des travailleurs qui avait été interdite, il fut emprisonné à deux reprises (1868 et 1870). En 1870, devenu journaliste à La Marseillaise, le journal de Rochefort, il rendit compte, dans une série d'articles remarqués, de la grande grève des usines Schneider du Creusot. En 1870, lors du troisième procès de l'Internationale il est condamné à un an de prison. Il était devenu le compagnon de la romancière féministe et révolutionnaire Léodile Champseix (pseudonyme littéraire : André Léo) qu'il "épouse librement" en 1872. Il est libéré par la proclamation de la République le 4 septembre 1870. Pendant le siège de Paris par les Allemands, il organise avec Eugène Varlin l'assistance publique pour les parisiens les plus pauvres. Il est membre du Comité central républicain des Vingt arrondissements et maire-adjoint du XVIIe arrondissement. En février 1871, Benoît Malon fut élu député, socialiste révolutionnaire, de la Seine mais démissionna, avec Victor Hugo et d'autres députés républicains, pour protester contre la cession de l'Alsace-Lorraine. Le 26 mars il est élu au Conseil de la Commune et maire de l'arrondissement des Batignolles dont il organisa la défense pendant la Semaine sanglante. Il siège à la commission du Travail et de l'Échange, et vote contre la création du Comité de Salut public. Après la Semaine sanglante, il s'exila à Lugano, en Suisse, puis en Italie où il participa au mouvement ouvrier. En décembre 1871, il adhère à la Fédération jurassienne de tendance bakouniniste. Il publie La Troisième défaite du Prolétariat français. Contraint à l'exil en Suisse, il y devient le compagnon de la féministe André Léo. Rentré en France après l'amnistie de 1880, Benoît Malon présida le congrès socialiste de Saint-Etienne (1882) qui vit la rupture entre réformistes (possibilistes) menés par Paul Brousse, dont il faisait désormais partie, et guesdistes (« marxistes »). Socialiste indépendant, il fut le fondateur, avec Elie Peyron et le premier directeur, de 1885 à sa mort, de La Revue socialiste qui fut ouverte à toutes les tendances du socialisme français. Il publia de nombreux ouvrages, dont Le Socialisme intégral (1891) qui influença toute une génération de militants et dans lequel il prône la création d'un Ministère de l'Assurance sociale. A sa mort, 10 000 personnes accompagnèrent son corps au Père-Lachaise. En 1913, un monument destiné à recueillir ses cendres fut érigé face au Mur des Fédérés et Jean Jaurès prononça un discours. (Source Wikipedia) Lire à son sujet VINCENT K. Steven, Between marxism and anarchism : Benoît Malon and French reformist socialism, Berkeley, University of California Press, 1992, XIV-193 p.

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