lundi 2 mai 2016

Grand Palais (Salon du livre rare et de l'autographe), cuvée 2016, by Textor. Le De Sphera de Proclus, 1547, etc.


Une brève incursion au salon du livre rare et de l'autographe au Grand Palais à Paris, la semaine dernière, m’a permis de repérer un joli petit ouvrage en truie estampée contenant un certain nombre de traités d’astronomie grecque dans une édition baloise de 1547 ayant appartenu au fameux Joannes Sarrander. Il faut avoir du groin pour dénicher cette pépite au milieu des milliers d’ouvrages proposé aux chalands.


Fig 1 Proclus De Sphera, reliure de l'époque en peau de truie
estampée à froid

L’imprimeur Heinrich Petri a réuni en un volume plusieurs ouvrages grecs relatifs à l’astronomie, avec des notes et la vie des auteurs, le tout en 600 pages. On y trouve le livre de la Sphère de Proclus, célèbre philosophe néoplatonicien de Byzance (412-485), qui possédait des connaissances étendues en mathématiques et en astronomie. Son traité de la sphère expose toutes les divisions de la sphère céleste avec autant de clarté que dans nos meilleurs traités d'astronomie. Quitte à  passer la nuit debout autant contempler la voûte céleste avec cet ouvrage en mains. Bien qu'attribué à Proclus depuis le XVe siècle, ce traité ne serait pas de lui mais d’un obscur auteur byzantin, qui avait compilé des passages extraits de Geminus, selon Paul Tannery. Le texte est en grec avec une traduction latine en regard par Giorgio Valla.


Fig 2 Page de titre

On y trouve aussi le poème des Phénomènes et des Apparences d’Aratus de Solès, poète et astronome grec vivant vers 300 - 250 av. JC. Il mit en vers deux ouvrages d'Euxode de Cnide, Miroir et Phénomènes et en fit un seul poème qui emporta l'admiration des anciens. Ce poème serait le texte grec le plus ancien que la Grèce nous ait laissé.  'Toutes choses dépendent de Jupiter' nous dit Aratus au début de son poème auquel Saint Paul se référa à différentes reprises dans son discours aux Athéniens. Aratus a été traduit en latin par Ciceron Germanicus et Rufus Festus Aviénus. C'est Alde l'ancien qui publia Aratus pour la première fois à Venise en 1499.


Fig 3 L'Espérance

Entre ces deux classiques, maintes fois réédités au XVIème siècle (1), une œuvre confidentielle de Cléomède : du Monde ou théorie circulaire des corps sublimes, en deux livres.  Cléomède ne nous est pas autrement connu que par cet écrit qui est un exposé de cosmographie et de géographie astronomique situé dans un cadre philosophique destiné à des étudiants et par là-même simplifié. Cléomède, en reprenant des écrits plus anciens, nous donne ainsi des informations précieuses qui auraient été perdues autrement comme la connaissance des procédés utilisés par Eratosthène pour mesurer la circonférence de la terre.


Fig 4 La justice

Et pour finir Denys l’Africain (Denys le Périégète) nous propose sa Description des terres habitées, dont j’avais déjà la deuxième impression incunable de 1478.


Fig 5 La foi

Jean Sarrander, en 1551, a voulu couvrir son livre d’une reliure solide et durable qui pourrait faire de l’effet aussi bien sur ses voisins que dans le carré Vip du salon du SLAM, 450 ans plus tard. Il a choisi comme décor les vertus théologales et cardinales : Foi , Espérance, Charité et Justice. On remarquera tout particulièrement la Justice avec ses attributs, son glaive et sa forte poitrine, ou encore l’Espérance, bien accrochée à son ancre et cheveux aux vents. Par ailleurs il n’a pas hésité à rajouter des commentaires de son cru dans le texte, comme sur cette première page des Phénomènes : Hoc opus Arati est ecphrasis sphaera ! On n’aurait pas pu mieux dire…

Bonne Journée
Textor


Fig 6 La charité


(1) Pour le De Sphera Proclus, E.0. à Venise en 1498 pour la traduction latine de Valla, puis édition bilingue en grec et latin à Bâle en 1535 chez Johann 1er Herwagen, suivie d’une édition à Paris en 1543. Il faudra attendre la réédition de Petri en 1561 pour voir le traité agrémenté de cartes.


Fig 7 Commentaires de Sarrander

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