Pour servir de complément et de correction à notre billet intitulé
Petite découverte bibliographique à propos des Confessions de Saint-Augustin de la traduction d'Arnauld d'Andilly (1649) : Il n'existe pas de seconde édition à la date de 1649 chez la Veuve Jean Camusat et Pierre Le Petit (de l'imprimerie d'Antoine Vitré).
Voici ci-dessous le message que nous a envoyé récemment Monsieur Jean-Marc Chatelai, Directeur de la Réserve des livres rares à la Bibliothèque nationale de France.
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A l'attention de M. Bertrand Hugonnard-Roche (Bibliomane moderne)
Monsieur,Un généreux donateur ayant tout récemment offert à la Réserve des livres rares de la BnF, département dont j'assure la direction, un exemplaire de la première édition de la traduction des Confessions de saint Augustin par Arnauld d'Andilly (Paris, Veuve Jean Camusat et Pierre Le Petit, 1649), laquelle manquait jusqu'à présent aux collections de la Bibliothèque, j'ai lu avec intérêt le billet de blog que vous avez consacré il y a quelques mois aux deux premières éditions de cette traduction fameuse, dans lequel vous concluez que ce qu'on nomme, sur la foi des exemplaires dont la page de titre porte une mention de "seconde édition", première et seconde édition, n'en sont en réalité qu'une : les deux pages de titre (très légèrement) différentes ne recouvriraient qu'une seule composition typographique.
Je me permets aujourd'hui de vous écrire car j'ai à mon tour comparé l'exemplaire de première édition qui vient de nous être donné avec un exemplaire portant la mention de seconde édition que la BnF conserve de longue date et dont vous trouverez ici la numérisation : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9617327d
Comme vous pourrez le constater à votre tour, la consultation de cet exemplaire numérisé invite à remettre en cause votre conclusion : de toute évidence, il existe bien deux éditions en 1649, c'est-à-dire deux compositions typographiques qui sont certes proches l'une de l'autre mais néanmoins différentes. Je n'ai pas encore eu le temps de le vérifier pour tous les cahiers, mais l'enquête que j'ai menée sur les dix premiers cahier du texte (cahiers A à K) montre qu'il y a eu pour chacun d'eux une nouvelle composition typographique. Je suis moins sûr que ce soit le cas pour les cahiers des pièces liminaires, ce qui laisserait à penser que les deux éditions se sont succédé dans un délai très court, mais cette hypothèse reste à vérifier.
Quoi qu'il en soit, je suis enclin à penser que les bonnes conclusions à tirer sont :
- que deux éditions successives ont paru au cours de l'année 1649 ;
- que le volume que vous possédiez au moment de la rédaction de votre billet de blog est un exemplaire de première édition ;
- que certains exemplaires de la première édition, à l'exemple du vôtre, ont été pourvus, par carton, d'une page de titre de seconde édition. Cette dernière hypothèse reste à fortifier en consultant un plus grand nombre d'exemplaires que ceux que vous et moi avons consultés. Je note toutefois que la présentation d'une édition sous un titre cartonné comportant une mention qui ne correspond pas à l'édition en question n'est pas sans exemple au XVIIe siècle : dans l'histoire de l'édition des Pensées de Pascal, on connaît le cas de la troisième édition, de 1671, dont la majorité des exemplaires présentent une page de titre cartonnée annonçant la seconde édition, à la date de 1670.
Toutes ces choses sont des minuties bibliographiques mais elles font le plaisir de nos professions respectives, et je vous remercie de m'avoir donné, par la lecture de votre billet de blog, l'occasion de le partager avec vous.
Cordialement,
Jean-Marc Chatelain
Directeur de la Réserve des livres rares
Bibliothèque nationale de France
Quai François-Mauriac
F-75706 Paris Cedex 13
Tél. + 33 (0)1 53 79 54 50
Fax + 33 (0)1 53 79 54 60
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Nous ajoutons quelques pages de l'exemplaire de "seconde édition" numérisé sur Gallica comparées aux mêmes pages de notre exemplaire de manière à convaincre qu'il existe bien des exemplaires de seconde édition avec des différences de justification et d'ornements quand il existe également des exemplaires de l'édition originale, tels que le nôtre, avec une page de titre de relais avec fausse mention de "seconde édition".
Un très grand merci à Monsieur Chatelain pour ces éclaircissements qui ajoutent un peu à l'histoire de cet ouvrage.
Bertrand Hugonnard-Roche,
Bibliomane moderne
Page 141 de l'exemplaire de "seconde édition" de la Bnf (Gallica)