jeudi 20 octobre 2011

Le relieur de Salel : reliures décorées du milieu du XVIe siècle.


Reliure du manuscrit de Démosthène (1546) par le « relieur de Salel » (conservé à la BNF, tiré de M. P. Laffitte 2001)


Textor nous a montré de belles éditions, des textes et des marges immenses ; je m’attacherai modestement à l’apparence extérieure en vous présentant, pour ceux qui ne le connaissent pas encore, le relieur de Salel.

Reliure du » relieur de Salel « sur Pline le Jeune (Alde, Venise, 1518) (conservé à la British Library)


Hugues Salel (1504-1553), valet de chambre puis maître d’Hôtel de François Ier est passé à la postérité pour avoir traduit, à la demande de son souverain, les dix premiers livres de l’Iliade d’Homère en Français, seconde traduction après celle donnée par Samxon en 1530. Cette édition, parue en 1545 chez Vincent Sertenas est réputée pour la beauté des ses illustrations et de sa typographie.

Salel offrit, comme il se doit, sa traduction à François Ier, faisant relier séparément et différemment chacun des dix livres. Un atelier en connexion avec celui d’Etienne Roffet, alors relieur du roi, se chargea de ce travail et plusieurs de ces précieux volumes sont encore conservés dans les collections publiques françaises. Cet atelier actif à Paris entre 1540 et 1545 environ a travaillé pour des amateurs restés anonymes , mais également pour le roi et le connétable Anne de Montmorency.

M. T. Ciceronis Epistolae ad Atticum, Brutum, et Q. fratrem.
Ex diversorum exemplarium, praecipuè Victorii ac Manutii, collatione diligentissima castigatae. T. Pomponij Attici vita
784[-46] p. (sig. a-z, A-Z, aa-ff8,)
Maroquin noir, dos à cinq nerfs, tranchefiles vertes, coupes filetées, tranches dorées. Décor de rubans entrelacés et de rinceaux tracés au filet et agrémentés de fers.


Ses reliures, caractérisées par l’utilisation de maroquins sombres et de plaques proches de celles d’Etienne Roffet, utilisent également différents fers assez caractéristiques.

Je partage avec vous ce soir une acquisition récente : deux volumes des œuvres de Cicéron dans une édition donnée par S. Gryphe en 1546 : les lettres à Atticus et les lettres familières. Ces deux ouvrages présentent des décors distincts, l’un utilisant une plaque que l’on retrouve sur une édition aldine de Pline le jeune (1518) et la seconde comporte un décor au filet intégrant plusieurs fers que l’on retrouve notamment sur une traduction manuscrite de Démosthène, également de 1546, conservée à la BN (ms français 25394).

M. T. Cic. Epistolarum, ut vocant, familiarium libri XVI. Denuo collatison paucis venerandae fidei exemplaribus, quàm accuratissimè castigati.
619[-5bl] p. (sig. a-z, A-Q8)
Maroquin noir, dos à cinq nerfs, tranchefiles vertes, coupes filetées, tranches dorées. Le décor est composé d’une plaque dorée centrale. Les écoinçons mêlant fers vides et filest sont remplis de pointillés.


Les reliures des Cicéron n’étaient pas destinées au roi et leur premier propriétaire demeurera vraisemblablement anonyme ; les seules indications consistent en une mention d’appartenance manuscrite du XVIIe s. Une cote de bibliothèque des XVIIe-XVIIIe s. au contreplat supérieur indique « R21n°418 » sur un volume et « R21n°421 » sur le second, indiquant implicitement l’existence d’autres volumes (cette édition compte 10 volumes), peut-être reliés de façon similaire. Ah les dépareillés, quelle plaie …

Les entre-nerfs sont ornés de fers à motif d’arabesques que l’on retrouve également sur des reliures de dédicace offertes au roi ou au connétable de Montmorency. Comme on le remarque, ces reliures sont non restaurées …


Voir notamment Marie-Pierre Laffitte : Reliures royales (1515-1559), BNF 2001 et Marie-Pierre Laffitte et Fabienne Le Bars, Reliures royales de la Renaissance. La librairie de Fontainebleau, 1544-1570, BNF, 1999.

Bonne soirée,
Philippem pour le Bibliomane moderne

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...