lundi 16 février 2009

Les résultats de la première vente Edouard Rahir au peigne fin...




Je ne vais pas donner à nouveau ici ce que j'ai déjà écris ailleurs en d'autres temps. Notre ami Xavier n'ayant pu produire comme il le souhaitait son excellent article "Edouard Rahir" sur nos ondes, nous passons à d'autres horizons, plus clairs.

Je vous propose aujourd'hui de revenir sur les résultats de la première vente des livres de la bibliothèque choisie du libraire Edouard Rahir. Cette vente eut lieu les mercredi 7, jeudi 8 et vendredi 9 mai 1930, en l'hôtel Drouot. L'expert de la vente et l'éditeur du luxueux catalogue qui l'accompagne était M. Lefrançois, libraire-expert.

J'ai la chance de posséder un exemplaire de cette première partie de la vente, pour laquelle tous les prix d'adjudication ont été reportés au crayon en marge, accompagnés du nom de l'adjudicataire du lot. Precieuses informations ! On pourrait croire que le méticuleux bibliophile a assisté assiduement à la vente... Il n'en n'est rien. En tous les cas, s'il y a assisté, ce n'est pas au cours de la vente que les prix ont été notés. Comment ? Quand ? C'est assez simple. La Gazette de l'Hôtel Drouot publiait peu de temps après chaque vente, comme aujourd'hui, la liste des prix obtenus dans une vente. Mais pas seulement les prix... Je ne sais jusque vers quelles années cette tradition perdura, mais à cette époque, 1930, il est important de noter que tous les noms des adjudicataires étaient publiés dans les colonnes de la Gazette Drouot !! Hérésie crieraient aujourd'hui les ténors de la place. Avez-vous vu publié un seul nom de "vainqueur" dans les dernières luttes "Bérèsoidales" ?? Non, aucun. Jamais ou presque, sauf indiscrétion dans la salle ou oreille pendante, vous ne saurez qui a acheté tel ou tel lot dans les ventes Bérès, de Villepin, et bientôt Jean Meyer (Alde). Jamais. Les temps changent. La tradition semble à la discrétion. Est-ce un bien ? Est-ce un mal ? Je ne sais. Toujours est-il qu'en 1930 on peut aisément faire le bilan chiffré de la première vente Rahir. Et c'est ce que j'ai fais pour vous aujourd'hui.

A part quelques lots adjugés pour lesquels je n'ai pas de noms, tous les lots peuvent être imputés à tel ou tel acheteur, bibliophile, libraire ou inconnu, et c'est très instructif et fort enrichissant.

Voilà, en très résumé ce qu'on peut en tirer.

Ne vous êtes-vous jamais retrouvé dans une salle des ventes, un peu ébahi, la truffe au vent, et pourtant vous n'avez rien humé ou presque... et bien, dites-vous que si vous aviez été présent à la première vente Rahir, cela aurait sans doute été le cas...

Deux acheteurs se sont partagés pour ainsi dire le gâteau. Il s'agit des libraires Maggs de Londres (qui existent encore) et du libraire Lefrançois à Paris, expert de la vente (eh oui... fut un temps qui n'est pas totalement révolu où les experts des ventes pouvaient allègrement et "en gros" acheter à tour de bras, pour leurs clients, certes, et pour eux aussi très certainement. Il paraîtrait que ce temps est révolu... lex dixit... enfin presque...). Passons.

Voici les chiffres, sur un peu moins de 250 numéros de cette vente (j'élimine quelques lots sans noms d'adjudicataires signalés ?? ont-ils été ravalés ??), le libraire Lefrançois remporte la bagatelle de 27 lots (soit un peu plus de 10% des lots... ou un lot sur dix si vous préférez c'est plus parlant). Le libraire Maggs quant à lui pulvérise le record en se voyant adjugé 38 lots soit près de 16% des lots... Pour un total en numéraire pour chaque d'un peu plus de 1.950.000 francs chacun. Soit près de 4.000.000 francs déboursés par ces deux libraires.

Le podium ne serait pas complet sans le troisième meilleur acheteur de cette vente en terme de sommes dépensées... le libraire Carteret arrive ainsi médaille de bronze avec seulement 10 lots adjugés mais pour la coquette somme de 889.000 francs environ.

La part belle était donc pour les libraires... et les suivants ?


Voici la liste complète des adjudicataires dans l'ordre décroissant de leurs dépenses (à partir du quatrième meilleur acheteur) :

Goldschmidt (Londres) 725.000 francs
Gibour 695.000 francs
Besombes
Dr Rosenbach (New York)
Bloch
De Samblanx (Bruxelles)
Giraud
Lardanchet 292.000 francs
Mme Belin
Davis
Comtesse de Behague 215.000 francs
Mensin(g)
Wells
Briquet
De Meulenaëre (Bruxelles)
Gumuchian 109.100 francs
Mincieux (Genève)
Michelmoore
Chr. Lazard
Chrétien
Gruel
Bibliothèque nationale 52.000 francs
Eisemann (Franckfort)
Escoffier
Schlumberger
Eggemann
Rauch (Genève)
De Marinis
Desbordes
Moussa
Chamonal 15.100 francs
Valentin de Courcel
Princesse de Faucigny-Lucinge
Devilder
Baudoin

Rouquette 9.700 francs

Ed. Allez

Breslauer

Bosse
Baer (Franckfort) 2.000 francs

Il y eut donc au total 43 meilleurs enchérisseurs pour cette première partie de la vente Rahir, pour 250 lots.

Je vous laisse découvrir les chiffres en détail ICI.

Je vous laisse également reconnaître les bibliophiles des libraires et inversement.

Pour information cette première partie de la vente Rahir produisit un peu plus de 11.000.000 francs. Si l'on s'en tient à l'indice INSEE sur les prix en 1930/2008 qui est de 0,53262, on arrive à un total en francs constants (ce qui ne veut rien dire j'en suis bien conscient) de plus de 5,8 millions d'euros (soit une moyenne d'adjudication par lot d'un peu plus de 20.000 euros).

Je vous laisse analyser tout ça à tête reposée.

PS : Dommage que nous ne puissions faire pareille étude pour les 6 ventes de la bibliothèque de Pierre Bérès. Cela aurait été fort instructif.

Bonne journée,
Bertrand

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