mercredi 31 décembre 2008

Le mystérieux Menon et ses livres de cuisine vous invitent à réveillonner à l'ancienne (1749-1750)



Réveillon de la Saint Sylvestre oblige, le billet de ce soir est consacré à l'un de nos plus renommé auteur culinaire du XVIIIe siècle. Auteur dont on ne sait rien ou presque, mais dont on connait au moins le paraphe puisqu'il est apposé en gage d'authenticité sur plusieurs premières éditions de ces ouvrages de cuisine, notamment sur l'édition originale de "La science du maître d'hôtel cuisinier" (1749), où l'on trouve sa signature autographe au feuillet 1 comme c'est d'ailleurs annoncé à la page xxxij de l' "Avis à ceux qui voudront faire usage de ce livre". Vous pouvez la découvrir ci-dessous :


Cet avis est par ailleurs très intéressant et explique la méthode de travail de l'auteur et les buts qu'il se fixait en rédigeant cet ouvrage. Lisez plutôt :

1. J'ai taché d'être concis sans obscurité, afin que ceux qui voudront se servir de cet ouvrage, pour s'instruire dans l'Art de la Cuisine moderne, ne soient point rebutés par la longueur du discours, ni embarrassés à saisir mon idée. Le style simple était le seul qu'il convenait d'employer. 2. Quoique je n'aye ordinairement prescrit qu'une méthode de travailler, je n'ignorais pas qu'il y en eût d'autres. Je me suis arrêté à celle que j'ai crû la meilleure, sans prétendre y assujetir les autres. 3. Je me suis attaché à éviter, autant qu'il m'a été possible, les grosses dépenses dans les ragoûts, sans que la délicatesse en souffrît. Ainsi je ne me suis pas moins proposé pour but le service des tables médiocres, que celui des tables somptueuses, dans le goût de la cuisine nouvelle. 4. J'ai mis au commencement une table des mets contenus dans cet ouvrage, pour ordonner des repas selon les quatre saisons, en gras et en maigre. 5. On trouvera réunis sous un seul article tous les mets qui ont du rapport et entre lesquels il n'y a qu'une légère différence. 6. Pour ordonner les entrées qui ne sont pas toute l'année, il faudra avoir recours aux saisons du rôti, parce que cet article leur fournira ce qu'ils voudront choisir pour entrées. 7. Comme les observations sur les qualités et les propriétés des alimens sont répandues dans le corps de l'ouvrage, on trouvera à la fin une table alphabétique qui renvoyera à la page où il est parlé de chaque espèce d'aliment. 8. Comme le cerf, la biche, le faon, le chevreuil, le daim, la poule d'eau, le pluvier, l'ortolan, le vanneau, la gelinotte des bois, le bequefigue, le guignard se servent ordinairement rôtis, la façon de les préparer se trouvera à l'article du rôti.

L'article 9 et dernier de cet avis est celui qui indique que les exemplaires qui ne porteront pas la signature de l'auteur seront réputés contrefaits (voir ci-dessus).

Menon est plus connu pour sa "Cuisinière bourgeoise", publiée pour la première fois en 1746 et depuis de très nombreuses fois rééditée, augmentée et corrigée, par lui et par d'autres, et ce jusqu'au dix-neuvième siècle.

Gérard Oberlé (à qui l'on doit beaucoup sinon tout dans l'histoire bibliographico-culinaire et bacchique) consacre quelques lignes à Menon et ses ouvrages dans ses incontournables "Fastes de Bacchus et de Comus ou Histoire du boire et du manger, en Europe, de l'antiquité à nos jours, à travers les livres" (Belfond, 1989) :

"On ne sait rien sur la vie de ce cuisinier. "Marin avait crée une cuisine raffinée, destinée aux soupers galants, aux réceptions royales, dit Cécile Eluard. Avec sa Cuisinière bourgeoise, Menon va donner un livre de recettes pratiques, faciles à exécuter, et poursuivre l'effort de simplification amorcé par Nicolas de Bonnefons au XVIIe siècle. C'est ce qui fit son succès, un succès durable, puisque son livre parut pour la première fois en 1746 et qu'il fut ensuite réédité jusqu'à la seconde moitié du XIXe siècle." Il est également l'auteur de deux traités pour les praticiens (La science du maître d'hôtel cuisinier (1749) et la science du maître d'hôtel confiseur (1750) et d'un important recueil, Les Soupers de la Cour, qui doivent beaucoup au cuisinier Marin, même si Menon ne l'avoue pas. Guégan trouve la cuisine de Menon banale, il y a même relevé quelques recettes franchement mauvaises comme celle de macaronis qu'il faut cuire dans du bouillon gras pendant des heures, jusqu'à ce qu'il épaississe et qu'il ne reste plus de liquide ! (je vous déconseille d'essayer ce plat pour le réveillon...) En revanche, il s'extasie sur ses recettes de pâtisseries qui sont parmi les plus remarquables du XVIIIe siècle."


La science du maître d'hôtel confiseur est presque entièrement consacré aux confiseries en tous genres : gaufres, glaces, coulis, biscuits, dragées, diablotins, pralines, macarons (pas touche Valérie !), massepains (hum que c'est bon !), mousses, liqueurs, etc. Oberlé annonce cet ouvrage comme "capital" et indique que dans cet ouvrage, Menon renonce à son souci de simplification et qu'il donne des recettes propres à figurer sur les grandes tables.

Je vous offre quelques recettes extraites de ces deux ouvrages dont vous pouvez voir la reproduction des titres ci-dessus. Peut-être serez-vous inspiré pour concocter à vos amis un repas de réveillon à la Menon ! (si vous le faites n'hésitez pas à laisser vos commentaires sur le Bibliomane moderne qui pour un soir de fête se transforme en plate-forme biblio-gastronomique.

Quelques titres de recettes pour saliver...


Les Cailles au Duc à la Menon (1749) ! Sans aucun doute grandiose.


Le Saumon en Bresolles à la Menon ! (1749). Facile non ?


Les pralines à la Reine... Sucrissime !


Quelques confiseries à essayer issues de la Science du maître d'hôtel confiseur, 1750


En vous souhaitant à toutes et à tous les meilleures choses possibles pour la nouvelle année 2009 qui est presque déjà là, et au plaisir de vous retrouver très bientôt sur le Bibliomane moderne parmi les livres anciens, rares et curieux, importants ou insignifiants, riches ou pauvres, mais toujours émouvants.

A vous lecteurs fidèles,
Bertrand

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