dimanche 3 octobre 2010

Une brève histoire des manuels Roret : Le manuel du relieur en première édition (1827).



Nicolas Edme Roret nait à Vendeuvre-sur-Barse le 29 mai 1797, il est le fils de Pierre Roret et d'Anne Charigaut. Son père était menuisier et son grand-père paternel simple manouvrier, son arrière grand-père simple laboureur. Si l'on remonte la lignée paternelle, on trouve un certain Didier Roret, vers 1650-1670, procureur d'office en la justice de Jorquenay. De la lignée paternelle on ne sait rien de plus ancien. La patronyme Roret semble originaire du petit village de Corlée en Haute-Marne, près de Langres. Corlée et Vendeuvre-sur-Barse sont distants d'une centaine de kilomètres seulement. La famille n'a donc que très peu bougé entre le milieu du XVIIe siècle et la fin du XVIIIe siècle. Du côté de la lignée maternelle, les Charigaut, le père de sa mère, décédé en 1788, était sabotier. Les origines sociales de Nicolas Edmé Roret sont plus que modestes.

Ainsi Nicolas Edme Roret est le premier de la famille a exercé le métier de libraire et éditeur. "C’est à la fin de ses études que Nicolas Edme vînt à Paris – fin 1813 – pour commencer son apprentissage en librairie, d’abord à priori chez son beau-frère M.FERRA et ce environ deux ans, puis au Palais Royal dans une librairie de la galerie du bois puis enfin chez Arthus Bertrand jusqu’en 1821. C’est durant cette période que Nicolas Edme ressentit la nécessité de créer une édition bon marché d’ouvrages d’informations pratiques touchant tous les métiers." (extrait D’après l’histoire des manuels Roret écrite par Francis RORET, arrière-petit fils du fondateur de la librairie, dans Bibliographie des Manuels Roret, par Bruno Fieux, 2008). Nicolas Edme Roret fut breveté libraire - taille-doucier - le 21 juin 1820, (brevet n° 1419). Je reprendrai ici l'historique issu de bonnes sources bibliographiques exposé dans l'encyclopédie en ligne Wikipédia, qui indique :

"En 1822, fort de son expérience et de son brevet de libraire, il s’installe à son compte comme éditeur. Il recherche de nouvelles formules, tout en poursuivant les éditions appartenant au fonds de son cousin Pierre Deterville, libraire, 8 rue d'Hautefeuille, qui détenait d’intéressants textes d'histoire naturelle dont ceux de Buffon (1707-1788), Jean-Baptiste de Lamarck (1744-1829) ou Jean-Jacques Rousseau (1712-1778). Il s'engage dans la production des Suites à Buffon (rééditée parfois sous le titre des Nouvelles Suites à Buffon) auxquels participent des naturalistes comme Pierre André Latreille (1762-1833), Charles-Nicolas-Sigisbert Sonnini de Manoncourt (1751-1812), Charles-François Brisseau de Mirbel (1776-1854), Louis-Augustin Bosc d'Antic (1759-1828) ou René Richard Louis Castel (1758-1832). Il édita, de plus, quelques grands auteurs mais surtout, il entreprit de lancer la « Collection encyclopédique Roret »: regroupant des manuels qui se voulaient pratiques et destinés à la vulgarisation des sciences, des bonnes manières, des arts et métiers, etc… l’Encyclopédie Roret” plus connue sous le nom de “Manuels Roret” regroupa plus de 300 volumes (environ), un par sujet, traitant de l'histoire et de la pratique des métiers les plus divers, t. q. astronome ou garde national, équarrisseur ou sorcier... Pour cela, il fit appel à de nombreux professionnels de l'époque. S'agissant des « Manuels », Roret, au format poche (in 16° ou in 18° = 15 x 9,5 cm), le succès, qui répondait aux besoins du public, fut immédiat, il y eut de multiples rééditions et de nombreuses traductions. Chaque ouvrage regroupait le savoir jugé utile sur le sujet avec nombre d'illustrations et détails techniques, de plus souvent un atlas ou des planches dépliantes illustrées. Le succès populaire de cette encyclopédie dont personne n’avait encore eu l’idée (acheter sans souscription, au catalogue, un par un les volumes qui vous intéressaient le plus), fut indiscutable et se prolongea jusque vers 1900. A cette date, la maison d’édition disparut pour être rachetée par l'éditeur parisien L. Mulo (lui-même fut racheté par Edgar Malfère éd. à Paris après 1918). Ils continuèrent tous deux à publier les « manuels ». Mais Nicolas Roret fonda aussi deux journaux célèbres au XIXe siècle : “La Maison Rustique” et “L' Agriculture Française” et publia aussi de grands auteurs, tels George Sand ou Sade. Il habita à Savigny-sur-Orge, chez son beau-père, le fondeur Launay, dans les anciennes dépendances du domaine de Courterente connues depuis sous le nom de “Maison Roret”. Il y est inhumé au cimetière de la Martinière. A son décès le 18 juin 1860, il fut remplacé par son fils, Edme Roret, breveté libraire le 17 mai 1852 (n° 2674), et également taille-doucier.

Edme Roret était né à Paris le 22 septembre 1834. Sa mère, Marie Augustine Launay, était la fille d'un ingénieur originaire d'Avranches dans la Manche. Edme Roret mourut à Paris le 24 juillet 1894. Il avait eu 6 enfants. Nicolas Edme, le père fondateur, meurt à Paris le 18 juin 1860. Une bonne part de la généalogie complète de la famille des libraires Roret (ascendance et descendance) est disponible en ligne sur le site www.geneanet.org (source de ces informations).


Venons-en à ce qui nous réunit ici : les livres. Et plus précisément aujourd'hui, un petit coup de projecteur sur les célèbres manuels Roret. Ces manuels, encore prisés aujourd'hui et réédités presque sans cesse depuis les premières éditions jusqu'au milieu du XXe siècle et encore plus récemment, sont une mine d'informations pratiques traitant de tous les métiers de toutes sortes.

Il y a quelques temps j'ai eu la chance de mettre la main sur la première édition (rare) du Manuel du relieur (voir photographie de la page de titre). Parue en 1827, ce manuel est dédié par L. Sébastien Le Normand à monsieur Berthe aîné, relieur à Parie, rue Hautefeuille, n°10. On notera que M. Berthe et la librairie Roret sont tous deux dans la même rue de Paris. Ce manuel se compose d'un feuillet d'annonces placé devant le titre (explications sur la collection de manuels formant une encyclopédie des sciences et des arts), après les XII pages comprenant le titre, la lettre à M. Berthe et la préface, commence le manuel sur 344 pages. On trouve à la fin les deux grandes planches dépliantes montrant au total 60 figures (plaques, fers, outils du relieur, etc.). Outre un errata, on lit imprimé à la fin que le volume sort de l'imprimerie de Crapelet, rue de Vaugirard, n°9. Vous savez presque tout ! Ce petit volume in-18 (14,5 x 8,5 cm) est relié demi-veau brun avec sur les plats un papier à la colle qui imite le veau raciné. Les tranches du volume sont jaune citron. Le volume est encore solidement relié mais la reliure présente quelques usures en bas du dos avec manque de cuir. Par ailleurs je dois signaler que pour un manuel du relieur... celui-ci a été fort mal relié à l'époque. Il a été pour ainsi dire massacré au niveau des marges qui sont courtes, très courtes, avec des feuillets coupés en biais... bref, un véritable contre exemple de tous les préceptes énoncés à l'intérieur même du volume !


Voilà, je vous montre quelques détails des deux planches reliées à la fin et qui montre bien la période étudiée : la reliure romantique à la Thouvenin, à la Simier, etc. Voyez les plaques qui y sont montrées. Je ne vais pas faire le résumé de tout ce qui est exposé à l'intérieur. Je dirais seulement que ce petit livre est une mine d'information pour les curieux des pratiques de la reliure dans la première moitié du XIXe siècle. Il s'agit de la première édition. Les suivantes (que je ne possède pas pour le moment) doivent montrer les progrès de cet art au fil du siècle. Les posséder tous me parait un challenge pour le moins indispensable !


Nous avons pu repérer une seconde édition de ce manuel du relieur dès 1831 (286 pages). Nous avons même retrouvé l'exemplaire qui a appartenu à Pierre Berès (libaire qu'on ne présente plus ici) et à Léon Gruel (célèbre relieur de la deuxième moitié du XIXe siècle, aussi collectionneur de livres sur la reliure et la bibliophilie). En vente actuellement chez un libraire pour un peu plus de 400 euros. On trouve ensuite une réédition de 1853, 1879, 1907, 1921, 1923, etc. Comme tous les manuels de cette collection, de véritables succès de librairie ! Je n'ai trouvé aucun exemplaire de cette première édition de 1827 actuellement à la vente sur les sites de librairie en ligne, ce qui me laisse à penser qu'il ne doit pas être très facile à rencontrer. La BNF et la Mazarine semblent les seules bibliothèques publiques référencées au Catalogue Collectif des Bibliothèques de France (CCfr) à en posséder un ou plusieurs exemplaires.

Possédez-vous une édition de ce manuel du relieur par Le Normand chez Roret ? Si oui laquelle ? Pouvez-vous succinctement nous la décrire ?

Quant à la Bibliographie des manuels Roret par Bruno Fieux, ingénieur, parue en 2008, je ne vous donnerai pas mon avis ici. Je l'ai donné de vive voix à notre ami Jean-Paul au Grand Palais ce printemps, je n'ai pas changé d'avis depuis.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

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